Viva Cinélatino (4)
Au programme du jour : le Venezuela, le Brésil et le Chili, 2 fois.
El amparo, Rober Calzadilla, Venezuela
El amparo se base sur une affaire qui date de près de 30 ans quand l'armée vénézuélienne abattit sans sommation des pêcheurs, à la frontière de la Colombie, qu'elle avait pris pour des guérilleros. Une bavure jamais reconnue par le gouvernement de Caracas malgré les témoignages des deux seuls survivants. Le film prend le parti du réalisme et sonne parfaitement authentique, ménageant le suspense jusqu'à son dénouement. Une oeuvre ouvertement politique qui reconstitue les faits avec précision, avant et après l'affrontement sanglant, mais non pendant, ce qui est une excellente idée. Doté d'un budget très serré, El amparo impressionne par son humanisme et sa description d'hommes et de femmes dont la pauvreté n'empêche pas la profonde dignité. Evidemment, il s'agit d'un film engagé pour la vérité et cela signifie aussi un certain parti pris. Mais cela n'atténue pas sa force.
N'avale pas mon coeur (Nao devore meu coraçao), Felipe Bragança, Brésil
Là bas, à la frontière du Brésil et du Paraguay, les échos d'une guerre atroce, marqué par la mort de nombreux guaranis, ne sont pas encore éteints. Felipe Bragança présente son film comme une histoire d'amour entre deux adolescents ennemis. Quelque chose comme Roméo et Juliette ? Voire. Le film comporte bien d'autres aspects comme si le metteur en scène avait voulu l'enrichir ad nauseam de symboles et d'interprétations multiples. Il y a quelques séquences réussies mais l'ensemble du film est emphatique et allégorique, à croire que l'épure et la simplicité sont des gros mots pour Felipe Bragança. A force de rajouter des ingrédients et de tenter de s'élever à des hauteurs mythologiques, le film s'avère bien souvent fastidieux dans une surenchère agaçante.
Roi (Rey), Niles Atallah, Chili
Comme illuminé, le dénommé Orélie-Antoine de Tounens, périgourdin d'origine, se posait un peu là. Convaincant aussi puisqu'il réussit à se faire élire roi d'Araucanie et de Patagonie par les indiens Mapuche du Chili. C'est son histoire qui a inspiré Niles Atallah, artiste vidéo passablement allumé lui aussi. Avec des documents d'archives, en recréant l'itinéraire de ce roi fantoche, en affublant les comédiens de têtes d'animaux ou de masques grotesques, en rayant la pellicule, en finissant par un délire psychédélique, Atallah réussit le prodige de nous surprendre sans cesse même s'il aurait pu mettre la pédale douce sur les effets spéciaux, qui lui ont demandé 7 ans de travail. En fin de compte, malgré des artifices plus ou moins appropriés, l'aventure étonnante de Tounens reprend vie dans toute sa folie mégalomane.
Mauvaise influence (Mala junta), Claudia Huaiquimilla, Chili
En situant son premier film dans la communauté Mapuche des environs de Valdivia, au centre du Chili, Claudia Huaiquimilla, qui en est elle-même issue, n'a pas choisi la facilité et a eu beaucoup de mal à financer son long-métrage. Le film va bien évidemment à l'encontre des préjugés à l'encontre des populations indigènes et dénonce la discrimination et les violences officielles qui continuent de s'abattre sur elles. Film politique, certainement, mais aussi histoire touchante de la délinquance adolescente dans le contexte d'une relation père/fils contrarié. Le film est bien écrit, malgré quelques longueurs et une certaine prévisibilité. Dommage que la mise en scène soit à ce point passe-partout. Ce sera sans doute mieux quand Claudia Huaiquimilla parviendra à tourner un deuxième film, ce qui est loin d'être gagné.
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