Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Sorties 2025


Une escale sur la route (Mikado)

 

Il arrive que les noms des acteurs présents dans la distribution en disent déjà beaucoup sur la tonalité du long-métrage dans lequel ils apparaissent, presque autant que celui du ou de la cinéaste, qui les a dirigés. Dans le cas de Mikado, de Baya Kasmi, Félix Moati, Vimala Pons et Ramzy Bedia sont au générique. Faut-il attendre de la légèreté, de la poésie, de la fantaisie, voire même un brin de folie ? Pour sûr, et l'émotion sera aussi probablement au rendez-vous. Mikado raconte l'histoire d'une petite famille nomade, roulant en van, obligée de faire escale sur la route, pour un problème mécanique. L'occasion de faire une pause et, peut-être, de mettre à jour quelques frustrations ou malaise plus important. Mikado n'est pas le genre de film où il y a lieu de s'extasier sur la mise en scène ou sur l'originalité de son scénario. En revanche, l'ensemble de la distribution est au diapason d'un récit qui dispense, au fur et à mesure de sa progression, un air de gravité, dès lors que certains sujets y sont abordés. Avec pudeur, globalement, et avec des comédiens qui ne sont pas du genre à tirer la couverture à eux, les enfants y compris.

 

 

La réalisatrice :

 

Baya Kasmi est née en 1978 à Toulouse. Elle a réalisé 3 films.

 


12/04/2025
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Être une femme libérée (Her Story)

 

Le gros succès de Her Story en Chine dit bien quelque chose de la lassitude d'une certaine génération devant le conservatisme ambiant et l'envie d'une émancipation, du côté des femmes. Le film de Yihui Shao calque son scénario sur les comédies américaines d'avant mais la greffe est plutôt agréable, dans un ton doux/amer, rythmé par la pop locale. Le récit a pour lui de nous montrer des femmes indépendantes dans le Shanghai actuel, qui vivent plus ou moins bien leur désir de liberté. Être une femme libérée, ce n'est pas si facile, surtout en Chine mais les interprètes les rendent lumineuses, accompagnées par une fillette qui semble assez souvent plus adulte et équilibrée que sa mère célibataire et la nouvelle meilleure amie de cette dernière, chanteuse de son état et peu assurée dans sa vie sentimentale. Entre ces trois héroïnes, le film a tendance à patiner dans les dernières longueurs (une durée supérieure à 2 heures ne s'imposait pas) mais leur traitement dans l'ironie et la tendresse, vis-à-vis d'un environnement sinon hostile, du moins pas toujours très compréhensif, touche forcément. Une œuvre acidulée entre le film d'auteure et le divertissement pur qui nous rend la Chine plus proche, pas si loin dans ses préoccupations humaines et universelles d'épanouissement personnel.

 

 

La réalisatrice :

 

Yihui Shao est née le 21 mai 1991 à Taiyuan (Chine). Elle a réalisé O pour Occupé.

 


11/04/2025
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En une époque sordide (La jeune fille à l'aiguille)

 

Certains échotiers cannois ont expliqué au bon peuple en quoi le titre du film de Magnus Von Horn, La jeune femme à l'aiguille, se trouvait confirmé par une scène insoutenable. Moyennant quoi, la susdite, certes peu agréable, n'est qu'une des nombreuses épreuves que devra subir l'héroïne dans un bout d'existence qui n'est pas une promenade de santé. Manifestement, après Sweat, le cinéaste suédois tenait à passer à la vitesse supérieure en intégrant le gratin auteuriste avec ce long-métrage en noir et blanc, se passant dans le Copenhague du lendemain de la première guerre mondiale. Une époque sordide, pour les populations les plus misérables, ce que le film montre avec parfois trop de complaisance. Zola ou Dickens, à côté, ressortiraient presque de la bibliothèque rose. Nonobstant, La jeune femme à l'aiguille, si l'on ne tient pas compte de ses excès dramatiques, chemine avec une certaine fluidité, nous immergeant dans son univers poisseux avec ce que l'on bien doit appeler un certain talent. Dans le rôle principal, Victoria Carmen Sonne révèle un tempérament impressionnant mais elle ne peut pas concurrencer Trine Dyrholm, époustouflante dans l'interprétation d'un personnage immonde.

 

 

Le réalisateur :

 

Magnus von Horn est né le 21 décembre 1983 à Göteborg (Suède). Il a réalisé Le Lendemain et Sweat.

 


11/04/2025
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Une famille somalienne (Le village aux portes du paradis)

 

Il y a au moins trois bonnes raisons d'aller voir le long métrage du réalisateur austro-somalien, Mo Harawe. Tout d'abord, la splendeur des images dues à un chef opérateur égyptien ; ensuite, la qualité d'un scénario qui avance doucement, avec au détour d'un plan anodin, une révélation stupéfiante qui ne changera pourtant en rien la modestie et surtout la dignité du propos ; enfin, un voyage dans un pays, la Somalie, au cinéma quasi inexistant, et qui vit une guerre presque perpétuelle. Le récit suit une famille pauvre, du sud du pays, non loin de la côte, dans un village ironiquement nommé Paradis. Il y a là, le père, qui vit de petits boulots, fossoyeur assez souvent, son jeune fils dont l'école ferme et la sœur du premier, indépendante et décidée à ouvrir son propre commerce. Trois personnages attachants, qui ne s'en laissent pas conter et qui évoluent sous nos yeux en parallèle ou simultanément. Les mots sont rares dans le film mais ils disent l'essentiel et les visages expriment ce qu'il y a à comprendre d'autre. Sans véritable temps mort, malgré un caractère que l'on qualifiera trop aisément de contemplatif, The Village next to Paradise est une merveille tranquille, gorgée d'humanité, de pudeur et d'humilité

 

 

Le réalisateur :

 

Mo Harawe est né en 1992 à Mogadiscio (Somalie). Il a réalisé 8 courts-métrages.

 


10/04/2025
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La voie de la transhumance (Bergers)

 

Après son formidable Antigone, la cinéaste québécoise Sophie Deraspe est passée à tout autre chose avec Bergers, l'adaptation de l'autofiction de son compatriote, Mathyas Lefebure. Le résultat n'en est pas moins enthousiasmant, une plongée dans le monde déclinant du pastoralisme, sans naïveté, si ce n'est celle de son personnage principal, mais avec une volonté de réalisme qui n'exclut pas des a-côtés politiques, économiques, philosophiques, sociologiques, poétiques, et la liste n'est pas limitative. Un très beau long métrage qui reprend la réflexion intellectuelle du livre mais qui la transcende par ses images, forcément superbes dans la voie de la transhumance vers les alpages, tout en offrant une véritable expérience sensorielle et en n'oubliant pas le caractère physique et éreintant du métier de berger. Au sujet de l'esthétisme du film, d'ailleurs, la réalisatrice n'a pas souhaité en rajouter dans le beau, en se refusant à filmer à partir de drones, ce qui aurait été une facilité et assez contraire à la vision du berger (et de la bergère) et de son troupeau de brebis. Félix-Antoine Duval et Solène Rigot excellent dans les deux rôles principaux, aux côtés d'un certain nombre de comédiens amateurs (ou pas ?), avec accent, qui donnent au film une authenticité et une humanité de bon aloi.

 

 

La réalisatrice :

 

Sophie Desrape est née le 27 octobre 1973 à Rivière-du-Loup (Canada). Ella a réalisé 6 films dont Antigone.

 


09/04/2025
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De l'huile sur le feu (The Grill)

 

Le cinéma contemporain s'intéresse de plus en plus à ce qu'il se passe dans les cuisines des restaurants, vues comme un microcosme de la société tout entière où, le temps de l'heure de pointe, se concentre un stress palpable, au sein d'une hiérarchie prédéfinie, source de conflits en tous genres. Avec The Grill, censé se dérouler à New York, le réalisateur mexicain Alonso Ruizpalacios filme sa cuisine comme le pont du Titanic, submergé par les flots et proche de couler. Dans ce film choral, tourné dans un noir et blanc volontairement peu attrayant, où la nourriture n'est nullement valorisée, plusieurs nationalités cohabitent dans une animosité permanente, alimentant la vision du cinéaste sur ces travailleurs "illégaux" s'échinant pour donner à manger aux clients, tout en lorgnant l'inaccessible rêve américain. Le chaos ambiant fait office de symbole mais si le fond fait sens, la forme semble bien poseuse, manquant de simplicité, au fil d'un récit haché qui dépasse largement la durée adéquate pour pouvoir garder son efficacité et son côté cinglant. Le film s'étire en longueurs inutiles, c'est bon, on a compris l'idée, et raconte un naufrage en versant sans cesse de l'huile sur le feu, ignorant sans doute que l'excès ne rend jamais service à la clarté du sujet traité. The Grill a un peu la lourdeur des repas prolongés, bien trop copieux, qui restent sur l'estomac.

 

 

Le réalisateur :

 

Alonso Ruizpalacios est né le 11 septembre 1978 à Mexico. Il a réalisé 4 films dont Güeros.

 


08/04/2025
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Au galop (Lads)

 

L'on comprend bien que dans son premier long métrage, Lads, Julien Menanteau a tenté de filmer une histoire exaltante, l'ascension d'un apprenti-jockey, tout en décrivant, autant que faire se peut, le monde des courses hippiques, sans omettre d'en souligner les excès ou travers, le tout se développant dans le respect obligatoire du bien-être animal. Sans bénéficier d'une mise en selle audacieuse, Lads reste plutôt agréable à regarder, y compris pour les images des courses hippiques, sans recherche épique, alors que le film aborde pas mal de sujets qui risquent de fâcher dans le milieu concerné, mais sans avoir le temps d'approfondir, hélas, ce qui le rend parfois caricatural. Cependant, le scénario parvient à surprendre, en dépit de quelques sous-intrigues un peu lourdes, et notamment dans son dénouement, même si l'on peut considérer qu'il cherche ainsi à flatter les naseaux des spectateurs. Dans le rôle principal, Marco Luraschi montre un vrai charisme et tient la distance, confronté à des cracks du calibre de Jeanne Balibar et de Marc Barbé, parfaits malgré les quelques clichés inhérents à leurs personnages. En matière de course d'obstacles, bien définis, Lads a choisi le galop et soutient tant bien que mal la cadence, en oubliant peut-être que le simple trot permet de mieux voir le paysage environnant.

 

 

Le réalisateur :

 

Julien Menanteau a réalisé 4 courts-métrages.

 


07/04/2025
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Debout face au colonialisme (Fanon)

 

Quoique plusieurs documentaires lui aient déjà été consacrés, le nom de Frantz Fanon reste encore méconnu. Le film de Jean-Claude Barny n'entend pas raconter l'entièreté de son existence, malgré sa brièveté, mais se concentre sur son action en Algérie, entre 1953 et 1956. Cet humaniste, né en Martinique, engagé dans l'Armée française de la Libération, était assurément un homme courageux et l'a démontré tant dans l'exercice de son métier de psychiatre, à l'hôpital de Blida, que dans son engagement auprès des structures anticolonialistes algériennes, en guerre contre l’État français. Le film montre et fait comprendre la lutte de Fanon, son travail d'essayiste compris, mais hélas dans une forme bien trop neutre, sur un ton pédagogique, avec une interprétation générale sans éclat, à quelques seconds rôles près. Le personnage de Stanislas Mehrar; plein d’ambiguïtés, est celui qui aurait pu sortir le long métrage de son absence de flamme mais sa confrontation avec Fanon n'occupe qu'un espace limité et mal exploité. Reste l'hommage à un homme debout devant les excès (euphémisme) du colonialisme et un racisme viscéral, qui fait prendre conscience que la lecture de la guerre d'Algérie et de ses conséquences, aujourd'hui encore, est encore loin d'être complète et ne risque pas d'être apaisée avant longtemps.

 

 

Le réalisateur :

 

Jean-Claude Barny est né le 18 avril 1965 à Point-à-Pitre. Il a réalisé Nèg marron et Le gang des Antillais.

 


06/04/2025
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Hydrophobie (Wet Monday)

 

Le lundi de Pâques, en Pologne, la tradition veut que les garçons aspergent d'eau les jeunes filles. Dans Wet Monday, Klara, 15 ans, voit approcher ce jour avec appréhension, développant tous les symptômes de l'hydrophobie. Le film utilise le réalisme magique pour faire resurgir un traumatisme enfoui, afin de l'exorciser et de le le guérir. Ce premier long-métrage de Justyna Mytnyk se caractérise par un mélange prenant, quoique pas toujours convaincant, entre le conte de fées, qui prend parfois des allures de cauchemar, et le quotidien naturaliste d'adolescents dans une petite ville provinciale de Pologne, traversée par une rivière. La réalisatrice, qui a tourné plusieurs courts-métrages documentaires, montre une belle habileté à décrire l'approche de Pâques avec ses aspects religieux et festifs. L'interprétation est irréprochable, avec les adultes relégués à l'arrière-plan, loin de comprendre ce qui agite des garçons et des filles qui ne sont plus des enfants. Par ailleurs, le film, au-delà d'un climat parfois malaisant, s'attache à la sororité, comme élément indispensable pour soigner les blessures et les aider à cicatriser. Si ses aspects oniriques affadissent quelque peu le propos, ou le détournent, le film reste visuellement une réussite.

 

 

La réalisatrice :

 

Justyna Mytnyk est née le 20 octobre 1988 à Szczecin (Pologne). Elle a réalisé 5 courts-métrages.

 


05/04/2025
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Citoyens de seconde zone (Au pays de nos frères)

 

Il y aurait actuellement autour de 5 millions de réfugiés afghans en Iran. Même s'ils parlent la même langue que les habitants de leur pays d'adoption, ils n'en sont pas moins, la plupart du temps, que des citoyens de seconde zone, susceptibles d'être expulsés, pour des raisons plus ou moins sérieuses. Ce sont eux qui sont au premier plan dans Au pays de nos frères, premier long métrage de Raha Amirfazli et Alireza Ghasemi. Les réalisateurs ont habilement choisi de raconter trois histoires situées chacune au début d'une des décennies de ce siècle. Si les films à "sketches" se caractérisent assez souvent par leur intérêt inégal, ce n'est pas le cas ici, dans un triptyque qui varie les situations et les personnages pour, au final, dégager une impression homogène de mépris, voire de racisme, de la part de la population née en Iran vis-à-vis de ces "frères" néanmoins étrangers. Aucun excès, pas plus mélodramatique que outrancier, n'est à déplorer dans un film qui montre une grande tendresse pour ses personnages aux abois, soumis à un certain arbitraire, et obligés de composer en fonction, y compris par le mensonge, quand cela est vital. Le cinéma de Amirfazli et de Ghasemi n'a certes pas la puissance de celui d'un Mohammad Rasoulof, par exemple, mais leur maîtrise narrative et la douceur trompeuse de leur mise en scène se révèlent parfaitement adaptées au type d'histoires, édifiantes, pour lesquelles ils ont opté.

 

Les réalisateurs :

 

Raha Amirfazli a réalisé 4 courts-métrages. Alireza Ghasemi est né le 29 octobre 1990 à Téhéran. Il a réalisé 7 courts-métrages.

 


04/04/2025
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