Cinéphile m'était conté ...

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Inédits


L'étoile bleue (Espagne)

L'étoile bleue (La estrella azul), Javier Macipe, Espagne, 2023

Il importe peu de connaître la vie de Mauricio Aznar, musicien et poète aragonais, mort en 2000, car La estrella azul est moins un biopic qu'une fiction organisée autour des derniers mois de son existence et, en particulier, de son voyage à Santaigo del Estero, en Argentine. C'est ce périple qui constitue le cœur du film, sous un aspect proche d'un documentaire avec plusieurs protagonistes qui jouent leur propre rôle et qui ont connu Aznar lors de son passage. En pleine crise morale, alors qu'il était sur le point de devenir une véritable vedette du rock, bien au-delà de sa ville de Saragosse, le musicien s'est ressourcé au contact de musiciens locaux et d'une communauté où le folklore est comme une religion. Gorgé de musique, La estrella azul séduit par sa simplicité, son authenticité et son partage d'une culture chaleureuse qui s'exprime par la musique et la danse ou plus largement la fête, où rien d'autre n'est recherché que le bonheur d'être ensemble et de profiter du moment présent. Pepe Valente, l'un des rares comédiens professionnels du film, est plus que crédible dans le rôle d'un homme tourmenté, qui aurait pu être célèbre et a préféré essayer de se réinventer dans une pureté originelle, en s'éloignant de ses démons.

 

 

Note : 7/10

 


20/05/2025
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Sœurs (Lituanie)

Sœurs (Seses), Laurynas Bareiša, Lituanie, 2024

Parfois, certains films laissent une impression plus forte au final que celles ressenties pendant la projection. C'est le cas pour Drowning dry dont le titre en lituanien est d'ailleurs bien différent (Sœurs). Pendant une bonne moitié du film il ne se passe presque rien, autour d'un week-end à la campagne entre deux couples, les deux sœurs, donc, leur mari et leur enfant. Mais après un incident au cours d'une baignade, quelque chose se détraque dans le long-métrage. Les flashworwards et les flashbacks se succèdent, certaines scènes réapparaissent, avec des ajouts, comme si la mémoire de l'une des protagonistes essayait de revenir au moment-clé, qui ne fait que précéder la tragédie à venir. Le puzzle temporel n'est pas totalement reconstitué et reste sujet à caution, au spectateur de faire son travail. Autant dire que les voies du long-métrage sont plus qu'énigmatiques, noyade sèche à prendre au propre comme au figuré, avec des éléments épars qui suggèrent une virilité exacerbée, l'instabilité des couples et la précarité financière. L'aspect minimaliste et plutôt languissant du film de Laurynas Bareiša a de quoi lasser mais l'atmosphère trouble et les multiples interrogations d'un scénario a priori erratique possèdent aussi un fort pouvoir de déstabilisation et par conséquent de fascination.

 

 

Nota : 6/10

 


20/05/2025
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Montagnes (Etats-Unis)

Montagnes (Mountains), Monique Sorelle, Etats-Unis, 2023

Little Haïti, Miami. Mountains documente la vie d'un ouvrier du Bâtiment qui voit son environnement se gentrifier, à mesure que les démolitions de maisons, dont il est partie prenante, se multiplient. Monica Sorelle réalise un film simple et direct, sans chercher des péripéties dramatiques, enregistrant le quotidien d'une famille d'origine haïtienne, désormais bien installée en terre américaine, mais qui garde sa culture, par la langue, la nourriture et une vague nostalgie. Même le conflit de génération avec un fils qui cherche sa propre voie, ne donne pas lieu à un haussement de ton. Cette sérénité de style, y compris dans la mise en scène, qui cache évidemment de nombreuses failles, est l'atout principal mais aussi le défaut majeur d'un film peut-être trop sage et presque lisse dans son déroulement.

 

 

Note : 5,5/10

 


18/05/2025
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Confiance (Italie)

 

Depuis Le porteur de serviette, en 1991, et jusqu'à La nostra vita, 20 ans plus tard, Daniele Luchetti faisait partie des réalisateurs qui comptaient en Italie, presque à l'égal d'un Nanni Moretti, avec lequel il a collaboré, plusieurs années. Mais depuis au moins une décennie, ses films ne sortent plus dans les salles françaises et il faut bien avouer que leur qualité est en cause, sans qu'il soit devenu un cinéaste négligeable, pour autant. Avec Confidenza, Luchetti adapte pour la troisième fois un roman de Domenico Starnone. C'est une œuvre étrange, atmosphérique, dont tout l'intérêt repose sur un secret échangé entre un professeur de lycée et une ancienne élève, devenue sa maîtresse. Leur séparation et leurs succès respectifs n'empêchent pas l'enseignant de craindre que sa confidence soit divulguée et ruine sa vie. Un récit tendu, donc, avec une musique angoissante de Thom Yorke pour support, et plusieurs scènes qui n'existent que dans l'esprit anxieux (dérangé ?) du sombre héros. Le film avance à pas comptés vers un dénouement que l'on imagine dramatique mais qui se révèle, en définitive, assez frustrant. Elio Germano, fébrile, donne une certaine épaisseur à son personnage, ainsi qu'une grande ambivalence, ne cherchant en aucun cas à le rendre forcément sympathique.

 

 

Note : 6/10

 


17/05/2025
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La vie et l'amour (Estonie)

La vie et l'amour (Elu ja armastus), Helen Takkin, Estonie, 2024

Adaptation d'un roman célèbre en Estonie, le premier long métrage de Helen Takkin semble fidèle à une vision romantique avant de redéfinir ses enjeux à l'aune de l'époque actuelle et de ses valeurs. Situé dans l'Estonie des années 30, au creux de la Grande dépression, le film évoque les illusions perdues d'une jeune femme venue de la campagne, qui se hisse d'un coup à un niveau social inattendu, par son mariage avec un riche imprimeur, au caractère complexe et toxique. En contrepoint, avec un autre couple, une intrigue parallèle raconte les luttes ouvrières. La réalisatrice fait confiance à un excellent quatuor de comédiens et peaufine sa reconstitution historique. L'insistance sur la psychologie de ses personnages et leur incohérence, parfois, est le principal défaut à signaler mais l'ensemble possède un véritable cachet, dans une veine très classique.

 

 

Note : 6,5/10

 


13/05/2025
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Observation (Slovénie)

Observation (Opazovanje), Janez Burger, Slovénie, 2023

Encore un film qui ne progresse qu'au rythme des sonneries d'un portable, lesquelles ne font qu'augmenter le stress de l'héroïne de Opazovanje. Le film s'inspire de faits réels : un homme tabassé à Ljubljana et dont les souffrances avaient été vues en live par 20 000 personnes, sans que quiconque ne prévienne la police. A partir de là, le scénario plonge dans un drame entre horreur et fantastique, se positionnant comme un thriller mystérieux, qui interroge le voyeurisme et le sentiment de culpabilité des utilisateurs des réseaux sociaux. Facebook m'a tué, si l'on veut, mais comme le film préfère le suspense à tout autre aspect, c'est un peu court et guère passionnant à suivre, eu égard au potentiel de l'idée de départ.

 

 

Note : 4,5/10

 


13/05/2025
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Seulement quand je ris (Croatie)

Seulement quand je ris (Samo kad se smijem), Vanja Juranić, Croatie, 2023

Inspiré d'un fait divers survenu il y a 20 ans en Croatie, Only when i laugh s'empare du thème des violences domestiques de manière sèche et avec la volonté de montrer comment la société, elle-même, est en grande partie responsable. Le film est très court, très proche de son héroïne, mère de famille sans histoire, que la simple idée de reprendre des études va mettre en danger. Un sujet universel, traité le plus souvent façon documentaire mais aussi avec des fulgurances de thriller, tout en installant un climat étouffant où le pire est susceptible d'arriver. La belle interprétation de l'actrice principale contribue à la tension ressentie pendant toute la durée du long-métrage.

 

 

Note : 5,5/10

 

 

 


12/05/2025
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Champ de bataille (Italie)

 

Les derniers longs métrages de Gianni Amelio ne sont pas sortis dans les salles françaises et il est fort probable que Campo di Battaglia connaisse le même sort. Contrairement à ce que son titre laisse entendre, le film se déroule dans un hôpital militaire, dans les premiers mois de 1918, au nord de l'Italie. Un lieu où de nombreux soldats, qui se sont mutilés volontairement, atterrissent, sous la férule de deux médecins qui ont le pouvoir de décider s'ils vont regagner le front ou retourner chez eux. Deux visions de la guerre et du patriotisme se côtoient, atténuées par l'amitié qui lie les docteurs, dont le degré d'humanité qui les différencie ne les empêche pas de se respecter, alors que la grippe espagnole commence à frapper. Sous des dehors d'austérité poussée à l'extrême, le film interroge la morale, autour de l'utilité de la guerre mais aussi de la gestion d'une pandémie, autant de sujets qui ont une résonance très actuelle. Droit dans ses bottes, Gianni Amelio ne cherche aucun allégement à son propos, ce qui rend son récit sinon ennuyeux mais au moins d'une grande froideur dans sa constante gravité.

 

 

Note : 6/10

 


12/05/2025
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Arzé (Liban)

Arzé, Mira Shaib, Liban, 2024

Une histoire simple, un beau portrait de femme en résistance face aux aléas de la vie mais surtout une photographie d'une ville, Beyrouth, complexe, où la survie est un travail quotidien pour la plupart de ses habitants. Arzé, l'héroïne, mère célibataire hébergeant sa sœur agoraphobe, porte un prénom symbolique (Cèdre) d'un pays où les divisions confessionnelles persistent, la solidarité ne s'exerçant qu'à travers la communauté à laquelle on appartient. Arzé ne peut s'en sortir financièrement qu'avec le scooter que son fils utilise pour livrer la spécialité culinaire qu'elle cuisine chez elle. Le vol de ce moyen de transport va l'amener à voyager aux 4 coins de Beyrouth, dans une quête que la réalisatrice, Mira Shaib, inscrit dans différents registres : dramatique, comique, doux et amer. Une mise en scène délicate et une interprétation irréprochable contribuent à (re)découvrir les différents visages de Beyrouth et la pugnacité de ses habitants, malgré les désastres de ces dernières années.

 

 

Note : 6,5/10

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


12/05/2025
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Le Jockey (Argentine)

 

Le cinéaste argentin Luis Ortega avait séduit avec L'Ange, il nous enchante et nous déstabilise avec El Jockey, course épique d'un personnage insaisissable qui subit une transformation radicale de son identité. Réaliste mais burlesque et le plus souvent insolite dans une première partie, le film largue les amarres dans la seconde, dans une veine que l'on qualifiera avec peine, de surréaliste et certainement d'absurde. Toujours est-il que le métrage fait valdinguer les notions de genre, s'amuse avec les codes du film noir, introduit des scènes de danse et assume jusqu'au bout sa dimension onirique. Avec sa désuète, au romantisme fané, El Jockey brouille les cartes et convoque moult références de Kaurismäki à Almodóvar (pour la somptueuse palette de couleurs), en passant même par Buster Keaton ou les frères Coen (liste non limitative). Dans cet écrin fantasmagorique, Nahuel Pérez Biscayart semble évoluer comme un poisson dans l'eau, capable de se métamorphoser sans effort apparent. Beau casting de "gueules" par ailleurs, à signaler, et jolie prestation de l'actrice espagnole Úrsula Corberó. Un film qui ne peut que diviser de par sa sur-stylisation, entre adoration et détestation, se placer entre les deux extrêmes n'étant pas la plus confortable des deux positions.

 

 

Note : 6,5/10

 


30/04/2025
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