Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Sorties 2024


Une main secourable (L'Échappée)

 

Drift (L'Échappée) précède Un hiver à Yanji dans la filmographie de Anthony Chen, même si sa sortie dans les salles françaises est postérieure, et constitue donc son troisième long-métrage, le premier tourné hors de Singapour. pour quelle raison Jacqueline, son héroïne, originaire du Liberia, traîne t-elle sur la plage et dans les rues d'une île grecque infestée de touristes ? Elle n'est pas là pour des vacances, visiblement, mais le scénario maintient un temps le mystère, au gré de retours en arrière distillés avec parcimonie. Le film n'est pas un manifeste politique autour des migrants mais une "aventure" humaine, dont on pressent très vite qu'elle puise ses racines dans une tragédie. Nonobstant quelques trous dans son récit, qui au fond n'importent pas tant que cela, Drift suit un chemin relativement simple pour montrer que la lumière peut parfois surgir à l'un de ses détours, sous forme de main secourable, même si un traumatisme ne guérit jamais tout à fait. Le côté minimaliste du film possède un certain charme, même si moins évident que dans Un hiver à Yanji, et il y a surtout l'opportunité d'applaudir le jeu tout en nuances et en douceur douloureuse de l'actrice britannique Cynthia Erivo, qui ne quitte jamais l'écran durant 90 minutes.

 

 

Le réalisateur :

 

Anthony Chen est né le 18 avril 1984 à Singapour. Il a réalisé Ilo Ilo, Wet Season et Un hiver à Yanji.

 


28/04/2024
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Cruels débuts (Première affaire)

 

Première affaire est un ... premier film, de Victoria Musiedlak, assez singulier et pas particulièrement aimable, au sens où il est loin de tout faire pour plaire au plus grand nombre. Son héroïne, jeune avocate qui n'a aucune expérience des gardes à vue, est lancée dans le grand bain sans précaution et son apprentissage passe aussi par une éducation sentimentale tardive et douloureuse. Le film ne tient qu'en partie son ambition de montrer une "débutante" aux prises avec la cruauté du monde, sans doute par manque d'assurance dans la mise en scène, qui use et abuse des gros plans, voire de ralentis totalement inutiles. Il y a tout de même une ambiance qui se crée, plutôt glauque d'ailleurs, eu égard à la teneur de cette première affaire, qui contraste avec le physique poids léger de son interprète principale, la talentueuse Noée Abita, qui a plus de coffre qu'il y parait a priori et dont l'affrontement avec le formidable comédien norvégien Anders Danielsen Lie suscite une électricité vraiment inattendue. Pour ce qui est de la localisation de l'intrigue, eu égard à l'atmosphère qui se dégage de Première affaire, qui ne dégage guère de joie de vivre, il n'est pas certain que les habitants de la bonne ville d'Arras soient particulièrement heureux de l'image qui en est donnée, même indirectement.

 

La réalisatrice :

 

Victoria Musiedlak a réalisé 2 courts-métrages.

 


27/04/2024
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Génération oubliée (Notre monde)

 

Après La colline où rugissent les lionnes, voici déjà le deuxième long-métrage de Luàna Bajrami, dont il n'est pas inutile de rappeler l'année de naissance : 2001. Notre monde est à fois différent de son premier essai, sa situation dans le temps, notamment, et une écriture plus sage, et proche de par l'envie de la jeune cinéaste de parler de sororité à travers une amitié entre jeunes femmes lancées dans le grand bain de la vie. Encore une histoire d'émancipation féminine, dans laquelle le contexte social et économique du Kosovo prend cette fois toute son importance, puisque l'action est située en 2007, soit plusieurs années après la guerre mais dans l'attente d'une indépendance qui tarde à venir. Après la génération sacrifiée qui a combattu, il est question dans Notre monde d'une génération oubliée, une jeunesse livrée à elle-même qui doit se résoudre à laisser de côté ses rêves. Les deux héroïnes du film sont lumineuses, particulièrement bien servies par une mise en scène très maîtrisée et esthétique. Notre monde n'est pas parfait, avec un scénario parfois hésitant dans ses enjeux mais le film montre une réalisatrice en nets progrès depuis son premier film. Luàna Bajrami est très précoce mais on serait assez tenté de parier sur sa longévité et ses futures réussites artistiques.

 

 

La réalisatrice :

 

Luàna Bajrami est née le 14 mars 2001 au Kosovo. Elle a réalisé Là où rugissent lrs lionnes.

 


26/04/2024
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Grand-père esprit (Un jeune chaman)

 

Sur le thème de : comment vivre son adolescence et envisager l'avenir à Oulan-Bator, Un jeune chaman complète et se différencie du récent Si seulement je pouvais hiberner. Le premier film de Lkhagvadulam Purev-Ochir trace le portrait de Zé, lycéen de 17 ans, dans son activité très particulière de chamane, pour lequel il endosse la personnalité de "grand-père esprit" aux yeux des autres. Une double vie, symbole d'une Mongolie en pleine révolution, entre tradition et modernité, comme le veut le cliché, dans un pays où le nomadisme pastoral disparaît peu à peu au profit d'une sédentarisation périurbaine synonyme de précarité. Le long-métrage évoque l'éducation (rigoriste, voir une scène de classe saisissante), l'ostracisme, l'alcoolisme et l'exil, entre autres thèmes marquants. Le film laisse souvent le champ libre au spectateur, privilégiant les ellipses et les interprétations possibles, sans pour autant paraître nébuleux ou opaque, au gré d'un rythme lancinant qui fascine et emporte entre réalisme et onirisme. Ce ne sont pas les grands espaces qui sont montrés, avec une grande sensibilité, dans Un jeune chaman, mais bien les frontières des possibles pour une génération entière aux prises avec les injonctions d'une société et les incertitudes du futur.

 

 

La réalisatrice :

 

Lkhagvadulam Purev-Ochir est née en 1989 en Mongolie. Elle a réalisé 2 courts-métrages.

 


25/04/2024
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L'amour, pas la guerre (Le Déserteur)

 

Présenté en première française au festival Cinemed de Montpellier, Le Déserteur de Dani Rosenberg résonne fortement avec l'actualité tragique israélo-palestinienne. Comme souvent dans le cinéma israélien, le film joue la carte de l'absurde pour prendre le pouls d'une société paranoïaque. Il pourrait s'agir d'une version juive du After Hours de Martin Scorsese, tellement les situations s'y enchaînent de manière inéluctable et cependant irrationnelle. On y voit un soldat en fuite, traumatisé, qui choisit l'amour plutôt que la guerre, dans une épopée de Gaza à Tel-Aviv, en autobus, à vélo et à pied, avec de brèves escales auprès des membres de sa famille. Cette tragi-comédie, sous forme de course haletante, montre aussi le traitement de l'information dans les médias et comment le mécanisme de la peur se transmet. Au centre du récit, l'acteur Ido Tako oppose aux circonstances un faciès qui montre volontairement peu d'émotions et qui semble comme hagard devant sa propre désertion. On rit souvent mais un peu nerveusement devant ce film très représentatif du cinéma de la région, qui traite avec un fort sens de la dérision de situations inextricables qui devraient plutôt amener à pleurer de désespoir.

 

 

Le réalisateur :

 

Dani Rosenberg est né le 23 août 1979 à Tel Aviv. Il a réalisé La mort du cinéma et de mon père aussi.

 


24/04/2024
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Presque Bonnie et Clyde (Le jour où j'a rencontré ma mère)

 

Aux Pays-Bas, le pays de la réalisatrice, Zara Dwinger, Le jour où j'ai rencontré ma mère s'appelle Kiddo, le surnom que la mère en question préfère au véritable prénom de sa fille qui vit depuis longtemps loin d'elle, dans un foyer. Le film est un road-movie, de la Hollande à la Pologne, prétexte aux retrouvailles entre ses deux personnages principaux. Elles se prennent pour Bonnie et Clyde, les meurtres en moins, pour une aventure aux allures de fugue que la réalisatrice développe avec beaucoup de fantaisie et énormément de références au cinéma hollywoodien. Visiblement, Zara Dwinger se méfie de l'émotion facile et la tient à distance, ce qui n'est pas forcément une bonne d'idée car, en définitive, on assiste plutôt à un exercice de style qui peine à susciter le plein d'empathie, en dépit du talent des comédiennes, dont l'alchimie n'est pas contestable, sans que aucune des deux ne livre de composition inoubliable. Moyennant quoi, Le jour où j'ai rencontré ma mère, placé exclusivement à hauteur de la plus jeune des deux, ce qui est une posture acceptable, poursuit son bonhomme de chemin sans qu'il y ait véritablement de surprises ni d'événements marquants et dramatiques à souligner. Autant dire que l'on reste un peu sur sa faim.

 

 

La réalisatrice :

 

Zara Dwinger est née en 1990 à Amsterdam. Elle a réalisé 4 courts-métrages.

 


23/04/2024
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Le feu aux poudres (Amal- Un esprit libre)

 

Aux dires de son réalisateur, Jawal Rhalib, Amal-Un esprit libre n'a pas suscité de polémique majeure, lors

de sa sortie en février, en Belgique, en dépit de son caractère hautement inflammable. Mais il a été l'objet

de débats animés, sur les réseaux sociaux et ailleurs, c'était bien le moins, et va permettre de faire évoluer

les cours de religion à l'école qui ne devraient bientôt être qu'optionnels, à partir de septembre 2024. Amal,

l'héroïne du film, est une enseignante qui ne s'en laisse pas conter et se bat contre l'intolérance becs et

ongles. Un véritable petit soldat qui est la porte-parole d'un cinéaste qui a voulu s'adresser à la "majorité

silencieuse musulmane." Le film est radical et n'est pas loin de se heurter à certains stéréotypes, dans sa

volonté farouche de démontrer que l'école, en Belgique, est peu ou prou infiltrée par les Islamistes. Le sujet

reste évidemment sensible et Jawal Rhalib ne prend pas de gants pour dénoncer, quitte à parfois oublier

certaines nuances dans son réquisitoire car peu lui chaut de mettre le feu aux poudres, semble t-il. Lubna

Azabal est assez hallucinante dans le rôle d'Amal, totalement investie et visiblement sans concessions

dans son combat pour le respect de la liberté de chacun et de chacune, y compris dans le domaine de la

sexualité.

 

 

Le réalisateur :

 

Jawal Rhalib est né le 8 novembre 1965 au Maroc. Il a réalisé 7 films.

 


22/04/2024
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Les États désunis d'Amérique (Civil War)

 

Film d'auteur dopé aux ingrédients du blockbuster ou fruit d'une intention inverse, qu'importe puisque le résultat est forcément hybride dans le Civil War de Alex Garland, qui surfe sur l'idée que les États désunis d'Amérique sont devenus une réalité et qu'une nouvelle guerre de Sécession peut se produire dans un proche avenir. Le film, qui procède par épisodes dans un profil de Road Movie tumultueux n'a guère de profondeurs sociale ou politique et certaines scènes ont tendance à faire penser à ce qui eu lieu, il n'y a pas si longtemps, en ex-Yougoslavie avec cette haine de l'autre qui alimente les conflits, fussent-ils fratricides, plus sûrement que toute autre considération. Dans un contexte aussi chaotique que celui de Civil War, le scénario s'en remet à des schémas narratifs ultra classiques, pour suivre une équipe de journalistes en maraude, source d'une bonne brassée de stéréotypes (le vieux à qui on ne l'a fait pas, l'expérimentée un peu blasée, la novice qui deviendra bien asse tôt cynique). Les moments intimes où l'on ne s'interroge pas trop sur le sens de la guerre et un peu plus sur les motivations des reporters, charognards ou témoins essentiels, alternent avec des scènes d'action efficaces, souvent proches de la guérilla urbaine. Au fond, si le film se déroule entre New York et Washington, il aurait pu se passer aussi bien en République démocratique du Congo ou au Yémen. C'est dire son côté universel, quoique pas révolutionnaire puisque la guerre est une horreur, quels qu'en soient l'époque et le lieu, et un peu roublard, également, puisque ceux qui s'intéressent aux divisions de l'Amérique, à la veille des élections présidentielles n'y trouveront nul élément censé nourrir leur réflexion. Mais ce n'était pas le but de Civil War, apparemment. Quel était-il, d'ailleurs ? Vous avez 3 heures !

 

 

Le réalisateur :

 

Alex Garland est né le 26 mai 1970 à Londres. Il a réalisé Ex machina, Anniihlation et Men.

 


21/04/2024
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Jusqu'au bout des ongles (Hopeless)

 

 

Fut un temps, pas si lointain, où chaque thriller coréen semblait pratiquer une surenchère de violence par rapport à ceux qui l'avait précédé. On a ainsi atteint un certain niveau au-delà duquel il n'était plus possible d'aller. Hopeless, dans ses moments les plus extrêmes, montre quelques velléités d'épater la galerie en ce sens, une manière de montrer sa radicalité jusqu'au bout des ongles, c'est le cas de le dire. Mais le film, outre son récit d'un apprentissage mafieux assez classique pour un novice, a d'autres atouts, humains, dans la manche. Ainsi, cette relation entre demis frère et sœur, qui ne manque pas de sel, ou entre le voyou débutant et son chef, qui ne manque pas de piment, ni surtout d’ambiguïté. Et puis, globalement, les rapports fils-père dysfonctionnent sérieusement et alimentent le destin erratique des premiers. C'est cet aspect "social" que l'on retiendra en priorité du premier long-métrage de Kim Chang-hoon, qui n'est jamais meilleur que quand il cesse de rivaliser dans l'agressivité avec des compatriotes réalisateurs qui eux n'ont plus à faire leurs preuves. Il y a certainement du potentiel chez ce nouveau cinéaste mais il convient d'attendre la suite pour juger s'il peut imposer une véritable personnalité ou s'il n'est qu'un faiseur raisonnablement doué.

 

 

Le réalisateur :

 

Kim Chang-hoon est né en Corée du Sud.

 

 

 

 


20/04/2024
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Myrtilles et compagnie (Riddle of fire)

 

Ne désespérons pas tout à fait du cinéma américain, il lui arrive encore de nous offrir des films qui s'évadent des schémas ressassés, apportant une vivifiante brise de fraîcheur. Conte de feu, le premier long-métrage de Weston Razooli, appartient à cette catégorie, avec son scénario en liberté, aux basques d'une joyeuse bande de trois gosses embarquée dans une aventure, entre Spielberg et Demy, où la recette de la tarte aux myrtilles tient une place prépondérante. Cette fable de l'innocence de l'enfance (jusqu'à un certain point, quand même), opposée aux bizarreries du monde adulte ne peut que séduire les explorateurs que nous avons tous été dans nos jeunes années, quel que soit notre âge, aujourd'hui. Derrière un côté marabout de ficelle, le film séduit d'abord par son écriture qui laisse toute sa place à l'imaginaire, tout en suivant une logique de narration, singulière mais implacable. Situé dans les paysages naturels du Wyoming, et tourné avec une pellicule Kodak, Conte de feu mélange très habilement un certain réalisme à une fantaisie a priori débridée mais souvent pertinente. Il n'est pas interdit d'y voir une certaine morale aussi, par exemple sur le fait que la vie réelle réserve bien plus d'émotions et de palpitations que n'importe quel jeu vidéo, mais la leçon n'est pas du tout assénée. Dernière chose : si notre trio est fort sympathique, il se fait tout de même voler la vedette par plus petite qu'eux, la dénommée Petal, malicieuse et irrésistible.

 

 

Le réalisateur :

 

Weston Razooli est né dans l'Utah. Il a réalisé 6 courts-métrages.

 


19/04/2024
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