Cinéphile m'était conté ...

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Une étoile filante dans le ciel soviétique

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Larisa Shepitko est née le 6 janvier 1938 à Artiomovsk, en Ukraine. Actrice puis élève de Dovjenko, elle profite de l'ère Khrouchtchev pour débuter comme réalisatrice avec Chaleur torride suivi de Les ailes. Mais à l'instar d'un Tarkovski, son cinéma, bien loin de l'orthodoxie communiste, est mal vu des autorités. Elle tournera encore Toi et moi et enfin L'ascension considéré comme sa pièce maîtresse, couronné au Festival de Berlin. Mariée au réalisateur Elem Klimov, obsédée par la mort, elle décède brutalement dans un accident de voiture à 41 ans. Longtemps ignorée, son oeuvre est aujourd'hui reconnue, notamment grâce aux DVD édités par Criterion. Certains considèrent cette étoile filante comme la plus grande réalisatrice de l'histoire du cinéma.

 

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Chaleur torride (Znoy), 1963
Kemal a terminé ses études secondaire et s'en va travailler dans une petite ferme de la la steppe. Il se heurte à un tractoriste, homme violent, qui le prend en grippe. Le film de fin d'études de Larissa Shepitko, diffusé en salles, est  adapté du célèbre romancier kirghize Tchinguiz Aïtmatov. L'esthétisme des paysages en noir et blanc et surtout sa mise en scène expressionniste en font une oeuvre d'une poésie extrême dans le conflit le vieux stakhanoviste désabusé et le jeune apprenti. Un somptueux début pour la cinéaste, déjà bien loin des films de propagande et dont le style encore redevable à la grande tradition russe, semble pourtant s'en éloigner quelque peu.

 

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Les ailes (Krylya), 1966
Ancienne pilote de chasse pendant la deuxième guerre mondiale, Nadezhda est 20 ans plus tard simple professeur. Sa fille adoptive la néglige, ses élèves la méprisent. Les ailes est le portrait douloureux d'une femme qui ne comprend plus rien à son époque et qui ressemble à l'Albatros de Baudelaire. Mélancolique et nostalgique, elle traîne son spleen et son insondable tristesse tout au long d'un film à la lente splendeur, aux dialogues rares qui en disent moins long que le regard dans le vague (à l'âme) de son héroïne qui n'a plus que le passé pour l'aider à vivre. Une oeuvre fascinante et touchante avec des dernières scènes sublimes.

 

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Toi et moi (Ti y ya), 1971
De retour de Suède, un chirurgien de renom sombre dans la dépression. Son ex-femme et son meilleur ami n'y peuvent rien. Il part exercer en Sibérie. A l'inverse de la plupart des productions soviétiques de l'époque, à l'optimisme forcé, les personnages de Larisa Shepitko sont tristes et en pleine crise identitaire. Tout en ruptures narratives, cet unique film en couleurs de la cinéaste est déconcertant mais sa poésie intrinsèque et son art digressif portent sa marque dans un ensemble qui finit par être cohérent et émouvant malgré son apparence cahoteuse.

 

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L'ascension (Voskhozhdenie), 1977
Deux partisans russes, à la recherche de vivres pour leur petite troupe, sont capturés par les allemands et entraînent dans leur détention trois villageois. Retour au noir et blanc pour le film considéré comme le chef d'oeuvre de Larisa Shepitko. La mise en scène est cette fois bien plus sobre et classique mais l'intensité psychologique de L'ascension et notamment sa dernière partie à la symbolique christique évidente est d'une puissance remarquable. Au-delà de son scénario, loin d'être original, Larisa Shepitko montre ce qu'être un(e) grand(e) cinéaste signifie. Elle a sa place, malgré sa courte carrière, dans le panthéon des réalisateurs et pas seulement soviétiques.

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20/12/2015
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