Un stradivarius pour le maestro (Blue Jasmine)
Les cartes postales européennes étaient bien sympathiques mais il était temps que Woody Allen revienne aux affaires sérieuses et prouve aux mauvaises langues qu'il n'avait pas égaré son talent entre Barcelone, Paris et Rome. Blue Jasmine est son meilleur film depuis Match Point avec lequel il partage des qualités essentielles : le sens du timing, l'absence de scènes inutiles et des dialogues ciselés. Les comédies les plus efficaces fonctionnent avec ces vertus (Voir Certains l'aiment chaud, tous les Lubitsch ou certains Blake Edwards) et Woody, lui-même, quand il est en forme, est un expert en la matière. Sauf que Blue Jasmine n'est pas une comédie, ou alors de moeurs, mais c'est surtout un film de crise (économique et morale), un drame en suspens, symbolisé par son héroïne, qui a vécu des années d'opulence en apnée, incapable de distinguer les faux-semblants et les mensonges qui gouvernaient sa vie. Le film raconte la chute libre d'une femme vers un état qui se rapproche de la folie. C'est de plus en plus noir et cinglant au fur et à mesure du récit. Le scénario est diabolique de précision, la mise en scène lui colle comme un justaucorps, implacable. Cette mécanique fonctionne par une incrustation fluide de flashbacks et des seconds rôles qui mettent à nu la fragilité et la perte de repères de la pauvre Jasmine. Prétendre qu'il s'agit du rôle d'une vie pour Cate Blanchett n'est pas excessif. Qu'elle soit radieuse et mondaine ou défaite et désaxée, elle est proprement époustouflante. Un stradivarius pour le maestro Allen. Chapeau bas !
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