Provision de vieux films (Février/1)
Le voyageur sans bagage, Jean Anouilh, 1944
Un homme, amnésique et pensionnaire d'un asile depuis 15 ans, visite une famille qui a pu être la sienne. Adapté de sa pièce de théâtre et coscénarisé par Jean Aurenche, Le voyageur sans bagage est le premier des deux films réalisés par Jean Anouilh. Si l'oeuvre manque de rythme et peut être taxée de théâtrale, elle n'est pas moins bien agencée, décrivant parfaitement les us et coutumes d'une petite ville, avec ses petitesses et ses inimitiés, un peu comme Le corbeau de Clouzot, mais avec moins de verve, évidemment, et davantage de mélancolie, dès lors que les souvenirs de cet amnésique refont surface. Pierre Fresnay est épatant de sobriété et bien accompagné par quelques pointures de l'époque : Blanchette Brunoy, Pierre Renoir, Louis Salou, Jean Brochard, Sylvie, Marguerite Deval ...
Week-end à Zuydcoote, Henri Verneuil, 1964
Redécouvrir Week-end à Zuydcoote et être étonné pas la qualité du film, même et surtout après avoir vu le Dunkerque de Nolan, il y a quelques mois. L'un des meilleurs de Verneuil, adaptation intense du livre de Merle. Certains n'y voient pas d'intrigue alors qu'elle est très forte, au contraire, autour d'un soldat en déshérence, à l'image d'un pays qui sombrait corps et bien et se dirigeait, la mine battue et l'esprit abattu vers les années parmi les plus sombres de son Histoire. Pas d'héroïsme dans Week-end à Zuydcoote, juste quelques grammes de camaraderie dans l'enfer des dunes, sous le feu allemand. Rien de picaresque non plus, rien que des soldats de plomb qui tournent en rond et qui plaisantent pour oublier qu'ils sont mortels. Réalisme et épaisseur humaine dans un récit de destruction et de désespoir. On n'a pas assez dit que Belmondo est prodigieux de naturel dans un rôle où beaucoup de grands acteurs se seraient cassé les dents.
Un flic, Maurice de Canonge, 1947
Comme souvent chez de Canonge, cinéaste hélas oublié, l'aspect documentaire est ce qu'il y a de mieux dans Un flic (à ne pas confondre avec le film de Melville). On y voit la fin de l'Occupation et l'immédiat après-guerre traités avec réalisme, marché noir, restrictions et "reconversion" des collabos, compris. Même remarque pour le travail de la police, même si le film est clairement à sa gloire. La scène finale avec assaut contre les gangsters est formidable. Pour le reste, c'est un film noir de bonne facture, qui aurait été sans doute plus intense, s'il avait été signé par un Jules Dassin, par exemple. Noël Couëdel (mort l'année de la sortie du film dans des circonstances extravagantes) est sobre dans le rôle principal et, comme souvent, c'est un "méchant" qui se détache, en l'occurrence Raymond Pellegrin, remarquable.
Fausse alerte, Jacques de Baroncelli, 1945
Deux propriétaires d'immeubles voisins se détestent. Mais le fils de l'un et la fille de l'autre filent le parfait amour. L'intrigue de Fausse alerte est cousue de fil blanc, soit, mais c'est sa période de tournage, en 1940, et son contexte qui en font une sorte de témoignage sur la "drôle de guerre" avec un ton résolument optimiste qui lui donne un air de propagande léger et pittoresque (il ne sortit finalement qu'en juin 45). Une belle brochette de comédiens est à l'affiche : Jean Tissier, Gabrielle Dorziat, Saturnnin Fabre, Micheline Presle, Georges Marchal, Raymond Aimos, Lucien Baroux, Yves Deniaud et, cerise sur le gâteau, Josephine Baker qui pousse la chansonnette et distille sa bonne humeur contagieuse. Et tout ce petit monde croit, ou feint de croire, que la guerre ne sera qu'une formalité.
L'invité de la onzième heure, Maurice Cloche, 1945
Alors qu'il vient de révéler une invention révolutionnaire, un savant est assassiné par l'un de ses proches. Comédie puis film de SF et surtout whodunit, L'invité de onze heures ne lésine pas sur les rebondissements ni, hélas non plus, sur l'hystérie, dans ce huis-clos qui ne met pas longtemps à être ridicule. Mise en scène absente (cher monsieur Cloche !), interprétation outrée, péripéties saugrenues, dialogues sans esprit : la chose aurait pu être un navet intersidéral et par la même délectable mais non, même pas, rien n'accroche ni ne résonne (monsieur Cloche !). Jean Tissier ne fait aucun effort pour y croire ne serait-ce qu'une minute et la délicieuse Blanchette Brunoy semble comme étrangère au film. Désolation !
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