Cinéphile m'était conté ...

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Carrousel de vieux films (Octobre/2)

Le rat d'Amérique, Jean-Gabriel Albicocco, 1962

Après la guerre, Charles part pour l'Amérique du Sud dans l'espoir d'y faire fortune mais il se heurte vite à la réalité. L'adaptation du livre de Lanzmann donna lieu à un tournage épique. On retrouve beaucoup de cette frénésie dans le film qui ne s'attache guère à la psychologie obligeant le spectateur à avaler ellipses et rebondissements peu crédibles. Le personnage principal est contrebandier au Paraguay, complice d'un meurtre en Bolivie et mineur au Chili. Tout en vivant une folle histoire d'amour également riche en péripéties. Le film affiche de gros problèmes de construction et présente des protagonistes assez peu sympathiques y compris Charles, un vrai teigneux et irascible joué parfaitement par Charles Aznavour. Le couple qu'il forme avec Marie Laforêt est nettement moins convaincant. Jean-Gabriel Albicocco a 26 ans quand il tourne Le rat d'Amérique après La fille aux yeux d'or. Incompris de la critique et du public, il abandonnera la réalisation après seulement 6 longs-métrages.

 

L'entraîneuse, Albert Valentin, 1939

Suzy est hôtesse dans un cabaret mais décide de laisser son passé derrière elle quelque temps en partant en vacances dans le sud. Elle y rencontre des jeunes gens bien élevés et sensibles à son charme. Deux belges, Charles Spaak (scénariste) et Albert Valentin (réalisateur) unissent leur talent dans cette co-production franco-allemande très mélancolique sur la difficulté de s'extraire de sa classe sociale et de son passé. La manière élégante de Valentin n'est pas sans évoquer la manière d'un Jacques Becker, quelques années plus tard. Le film n'égale cependant pas les réussites futures du cinéaste et notamment Marie-Martine et La vie de plaisir. Michèle Morgan, peu de temps après Le quai des brumes, y est délicieuse et entourée d'une pléïade de comédiens talentueux dont le moelleux Andrex en petite frappe et François Périer en jeune freluquet. Et dans un autre registre, Fréhel en impose bien que son rôle soit épisodique, juste le temps de chanter à deux reprises.

 

L'eau vive, François Villiers, 1958

Alors qu'un barrage sur la Durance se construit, une jeune fille mineure hérite d'une fortune après le décès de son père et aiguise la convoitise de sa famille. Compositeur de la musique du film, Guy Béart a en parallèle écrit des paroles et sorti un 45 tours qui appartient à la mémoire collective. Ce qui n'est pas le cas du film malgré la signature de Giono, au scénario et aux dialogues. Et en voix off également, ce qui alourdit considérablement ce conte provençal qui prend parfois des allures documentaires sur la construction du barrage. Le film est d'ailleurs une commande d'EDF et le tournage a duré 3 ans. Il faut bien avouer que hormis de beaux paysages L'eau vive manque singulièrement de liant et de rythme, avec des personnages archétypaux, soit d'un côté la jeune fille et son oncle berger, purs comme l'eau claire, et de l'autre une méchante parentèle d'une cupidité de la plus belle eau, si l'on ose dire. Quant à l'héroïne, la frêle Pascale Audret, soeur d'Hugues Aufray, elle est bien charmante mais comédienne limitée.

 

L'eau à la bouche, Jacques Doniol-Valcroze, 1959

Dans un château du Roussillon, à la suite de l'ouverture d'un testament, des couples se forment. Ambiancé par la suave musique de Serge Gainsbourg, le premier long-métrage du cofondateur des Cahiers du cinéma (Doniol-Valcroze ne tourna que 7 films) est un élégant badinage avec les sentiments, où il ne se passe pratiquement rien mais où s'amuse assez des chassés croisés amoureux et des mensonges qui pimentent la situation. Les personnages sont tous physiquement très agréables de Françoise Brion (l'épouse du réalisateur) à Jacques Riberolles en passant par Alexandra Stewart et Gérard Barray. Leur sophistication (on y lit à haute voix les lettres de Kafka, on cite Guillaume d'Orange) contraste avec la trivialité des amours ancillaires de Michel Galabru avec Bernadette Lafont. Le tout sous le regard d'une fillette qui ne dit rien mais qui devine tout. Le côté presque éthéré et fort sensuel du film (nonobstant des effets de zoom déplaisants) n'est pas sans évoquer, avec plus de légèreté, certains films d'Antonioni.

 

La tentation de Barbizon, Jean Stelli, 1946

Un suppôt du diable décide pour son plaisir de brouiller un couple de jeunes mariés. Mais leur ange-gardien veille. Jean Stelli est surtout connu pour son mélodrame larmoyant Le voile bleu. Le ton est tout autre dans ce film de l'immédiat après-guerre où la lutte entre ange et démon se fait de manière charmante avec la morale finale qu'en fin de compte les humains n'ont guère besoin de leurs services pour s'arranger avec le bien et le mal. Le film est plutôt bien écrit et son caractère très désuet participe au charme qui s'exhale de l'entreprise. Et on y retrouve d'excellents acteurs, masculins pour la plupart, et de générations diverses : Larquey, Périer et Gélin. Mais c'est bien la somptueuse Simon Renant qui se met le plus en évidence, ange sans doute mais qui avec ses pouvoirs magiques a quelque chose de Ma sorcière bien-aimée.

 



15/10/2018
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