Plein la vue du côté d'Arras (5)
Trois films seulement aujourd'hui. Un voyage de l'Estonie à la Slovénie, en passant par la Tunisie. Toujours avec passion.
L'espion et le poète (Luuraja ja luuletaja), Toomas Hussar, Estonie,
A quoi ressemble un film estonien d'espionnage ? D'aujourd'hui, s'entend. Eh bien, pour prendre L'espion et le poète comme exemple, il est nocturne, lent, énigmatique et parfois drôle. Pas si loin de ceux que l'on tournait durant la guerre froide, finalement. D'ailleurs, il semble bien que pour les estoniens, il y a toujours un conflit en cours et l'ennemi est identifié : il est russe. Le film de Toomas Hussar n'est pas dépourvu de style, c'est même sa qualité première et les scènes d'action, rares il est vrai, sont efficaces. Bon, l'ensemble est assez opaque mais est-ce que cela a vraiment de l'importance dans ce type de film bien noir ?
Hedi (Inhebbek Hedi), Mohamed Ben Attia, Tunisie, sortie le 28 décembre,
Hedi est un garçon de 25 ans qui finit par en avoir assez de faire ce qu'on lui dit de faire et dont l'avenir est tout tracé : mariage et travail. Le film de Mohamed Ben Attia est une colère qui monte et qui culmine dans une scène magnifique. Le personnage de Hedi est le cœur du film, autant dire que le jeu de Majd Mastoura est important, à l'opposé d'ailleurs du tempérament naturel de l'acteur (c'est lui qui le précise dans ses interviews). Une prestation de haute tenue concrétisée par un prix de meilleur acteur à la Berlinale. Au-delà de cette interprétation, Hedi est un film qui raconte la jeunesse de Tunisie, en pleine crise économique et trace trois portraits de femmes subtils. La Révolution a changé le pays mais pas autant en profondeur que l'on pense. La Tunisie reste un laboratoire ou encore un chantier vers le monde des possibles.
Vie nocturne (Nocno zivjenje), Damjan Kozole, Slovénie,
Damjan Kozole fait partie des tous meilleurs cinéastes slovènes, de ceux qui n'hésitent pas à questionner la jeune démocratie du pays. Dans Vie nocturne, il s'inspire d'un fait divers particulièrement sordide, exploité à satiété par les médias et les réseaux sociaux. Mais pas pour l'exploiter de façon policière puisque l'on est au tout début du drame et que la majeure partie de son action se déroule dans un hôpital, une nuit. Ce que Kozole a souhaité, c'est avant tout de filmer un cauchemar sans fin mais aussi une métaphore de la société slovène avec ses compromissions et sa corruption. Malgré sa brièveté, le film est riche de thématiques et d'interrogations telle que celle-ci : connaît-on vraiment ceux qui nous sont proches ? Et dans l'exploration des zones d'ombre qui nous entourent, comme dans son précédent film, Slovenian Girl, Kozole démontre un savoir-faire impressionnant.
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