Parfaitement Alès (3)
A mon seul désir de Lucie Borleteau
A mon seul désir raconte le parcours de femmes libres, et plutôt épanouies, dans le cadre d'un club de strip-tease ! Lucie Borleteau, la réalisatrice de Fidelio et de Chanson douce, a eu toutes les peines du monde à trouver des financements en France pour un film qui ne cherche ni à stigmatiser, ni à faire la morale, et ceci explique sans doute cela. Les scènes dites "trash" se trouvent dès le début du long-métrage, visiblement très documentées par la cinéaste et sa scénariste. C'est un film de femmes, derrière et devant la caméra, de celles qui mènent la bal et inversent le pouvoir, au contraire des préjugés de tout un chacun, qui n'y verrait qu'un spectacle pour voyeurs plus ou moins pervers. Et de fait, les a priori tombent assez vite devant des passages qui n'ont de choquant que le regard embarrassé que l'on pourrait leur porter (c'est un peu le cas dans les premières minutes). Les deux actrices principales, les très talentueuses et culottées Louise Chevillotte et Zita Hanrot ont apparemment eu les mêmes réticences devant les nombreuses scènes dénudées mais ont compris la bienveillance du projet et son absence de caractère glauque. A mon seul désir se transforme peu à peu en comédie romantique et perd une partie de son originalité mais tient parfaitement le cap des deux heures de projection, dans cette mise à nu troublante mais finalement joyeuse et qui changera vraisemblablement le regard de beaucoup sur cette drôle de profession (d'appoint pour la plupart de celles qui l'embrassent, pour un temps) d'effeuilleuse, comme on ne le dit heureusement plus, surtout avec cet air très masculin, teinté de mépris et de lubricité.
Alam de Firas Khoury
Alam se traduit en Français par le mot Drapeau, symbole omniprésent dans le premier long-métrage de Firas Khoury. Le cinéaste y dresse le portrait d'une poignée de jeunes palestiniens, qui vivent en Israël, et sont confrontés à la propagande officielle, notamment à travers les cours d'histoire de leur lycée. Alam mêle récit d'apprentissage de la fin de l'adolescence, plutôt traditionnel, et éveil politique à l'aube de la célébration du Jour de l’Indépendance israélienne qui coïncide avec celui de la commémoration de l'exode palestinien. Le rythme du film est plutôt nonchalant et le ton souvent léger, ce qui n'en fait pas une œuvre militante pure et dure, mais le message est suffisamment clair pour ne pas avoir à être asséné. Certes, la mise en scène manque parfois de mordant et le scénario semble souvent lambiner en chemin, mais la qualité de l'interprétation générale de ces jeunes héros et quelques scènes plus incisives contribuent à maintenir l'intérêt. La transmission des événements du passé et le traumatisme qui perdure dans chaque génération sont autant d'éléments-clés qui expliquent que l'insouciance de l'adolescence n'est pas forcément décorrélée d'une sensibilité, plus ou moins accentuée selon les tempéraments, à une situation intenable et insupportable pour l'existence des Palestiniens, au sein de l’État d'Israël.
La Roya de Juan Sebastián Mesa
La majorité des films colombiens qui parviennent dans nos salles placent leur action en ville, le plus souvent en lien avec une violence endémique.Avec La Roya, le curseur se déplace dans un milieu rural isolé, proche des Andes, en décrivant la vie d'un jeune responsable d'une plantation de café. Grâce à la splendeur de ses paysages naturels, l'aspect contemplatif du film est assez réussi, sans que l'absence de dialogues pose un quelconque problème. En revanche, le scénario donne moins de satisfaction, dans une continuité dramatique plutôt énigmatique, en dépit de l'intérêt de certaines scènes (la fête au village). Il manque un véritable lien, tout du moins des éléments explicatifs ou même suggérés, qui permettraient de mieux comprendre les enjeux, qu'ils soient économiques ou sentimentaux. C'est que, à ce héros qui travaille dur et gagne à peine de quoi vivre, on s'attache d'emblée, d'autant qu'il semble porter sur les épaules un secret du passé, mais là encore, il faut essayer d'en deviner le caractère, à travers une poignée de scènes en flashbacks. Celles-ci, donnent un accent différent au film, de l'ordre de l'onirisme, une veine qui aurait d'ailleurs pu être davantage approfondie. La Colombie n'est-elle pas le pays où le réalisme magique s'est le mieux incarné avec un géant de la littérature ?
A découvrir aussi
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 51 autres membres