Cinéphile m'était conté ...

Imagine est le film le plus singulier actuellement sur les écrans. Une véritable expérience sensorielle et poétique dans le monde des non-voyants où l'anormalité semble résider chez ceux qui ... voient. D'emblée, le film d'Andrzej Jakimowski nous met réellement dans la peau d'un aveugle. Place aux sensations et aux sons qui délimitent l'environnement et au spectateur d'imaginer lui aussi le monde sans l'aide de ses yeux. Passé un moment nécessaire pour s'accoutumer à cette nouvelle façon de "voir", et malgré quelques entorses obligatoires à l'exercice, l'adhésion est rapide et vivifiante. Une belle leçon qui aurait pu faire un film documentaire extrêmement réussi mais il s'agit aussi d'une fiction et force est de constater que le scénario est en l'occurrence bien moins convaincant. Qui est donc ce professeur aux méthodes originales, atteint de cécité lui-même, qui tente de faire comprendre à ses élèves qu'un aveugle peut se passer de canne s'il sait "regarder" autour de lui et sentir chaque obstacle ? Cet homme est-il un pédagogue génial ou un simple charlatan ? Le film ne répond pas à la question et laisse sur sa faim d'autant que la maigre histoire d'amour qu'il raconte est plutôt maladroite. A souligner cependant une composition de choix d'Edward Hogg et, à un degré moindre, d'Alexandra Maria Lara. Sans oublier la photogénie toujours sidérante de Lisbonne. En dépit de réserves sur son cheminement narratif, Imagine est à voir. Les yeux et les oreilles grands ouverts.