Intermède au Cinemed (4)
Encore une journée à 3 films pour moi, au Cinemed. Mon coup de coeur du jour : l'italien L'agnello. Je suis moins enthousiaste pour Zanka Contact et Rouge malgré d'évidentes qualités.
Zanka Contact, Ismaël El Iraki
Casablanca est un personnage à part entière dans Zanka Contact. Très Rock'n'roll, irrévérencieuse et provocatrice. C'est cas de rebelles. Comme les deux personnages principaux du premier film d'Ismaël El Iraki, une prostituée et un musicien has been. Leur rencontre va provoquer des étincelles et électriser tout un tas d'autres protagonistes qui ne leur veulent pas nécessairement du bien. Il y a un côté western (tajine ?) dans les dernières minutes de Zanka Contact, ne serait-ce que pour ses paysages désertiques, mais il s'agit aussi d'un thriller urbain, d'un drame, d'une comédie et peut-être encore davantage d'un film musical où l'on entend aussi bien du Heavy Metal que des chansons orientales. Il serait tentant de parler d'OVNI, dans la meilleure acception du terme, vu la multitude de genres abordés, les ruptures fréquentes de ton et la mise en scène explosive mais l'ensemble est quand même singulièrement foutraque et sa durée est excessive, plus de 2 heures au cours desquelles quelques coupes auraient donné encore plus de rythme à un film dont on peut louer sans conteste la folle énergie. Impossible par ailleurs de passer sous silence la prestation majuscule de Khansa Batma, rockeuse de son état et dont les premiers pas à l'écran sont tonitruants. La blague très peu politiquement correcte qu'elle raconte au début du film dans un taxi, avec la conviction qu'elle y met, devrait plaire à tous les amateurs du cinéma de Tarantino.
L'agnello, Mario Piredda
Sacré meilleur film au festival du film italien d'Annecy, L'agnello est une œuvre puissante et touchante qui se déroule sur les rudes terres de Sardaigne. Sur un territoire où se trouvent certaines des plus importantes bases militaires de l’OTAN en Méditerranée, où sont testées de nouvelles armes lesquelles ne semblent pas étrangères à la recrudescence de cancers dans la région. Cette situation constitue la toile de fond du long-métrage de Mario Piredda mais son sujet principal est autre avec l'incroyable relation entre un père veuf et malade et sa fille adolescente, aux cheveux roux et aux tatouages de rebelle. Un amour puissant entre ces deux personnages qui passe par la dérision et l'humour dans des paysages qui leur sont chers mais désormais souillés. Le film s'attache aussi à donner de l'espace à d'autres protagonistes à fort caractère comme le grand-père berger et l'oncle magouilleur, sans oublier l'agneau du titre qui nait au tout début du film. L'agnello est une merveille d'équilibre qui ne cède jamais à la tentation du mélodrame, parsemé de scènes puissantes dont l'émotion n'est jamais absente. Plutôt que de réaliser un drame social comme on en voit tant ou de livrer un film politique, Mario Piredda a préféré, dans ce premier long-métrage, parler de la famille et de l'amour de ses racines. Et avec un talent très sûr de mise en scène, que l'interprétation flamboyante de Nora Stassi (première apparition à l'écran), met encore davantage en valeur.
Rouge, Farid Bentoumi, sortie le 25 novembre
D'Erin Brockovich à Dark Waters, les films-dossiers font partie d'une tradition américaine bien ancrée à l'écran dès lors qu'il s'agit de dénoncer les manquements des entreprises en matière environnementale et/ou sanitaire. La chose est bien moins habituelle dans le cinéma français et il faut louer Rouge de Farid Bentoumi qui s'attaque à un sujet inspiré de plusieurs affaires. Le film n'a donc rien d'irréaliste et pose clairement la question cruciale : pourquoi continue-t-on de privilégier l'aspect économique, avec notamment le maintien d'emplois, en passant sous silence certains scandales en matière d'environnement et de santé de la population ? Rouge pose le problème avec pertinence, en pointant du doigt la complicité des politiques, entre autres. Dans le cas de cette usine de chimie lourde qui est évoquée dans le film, le scénario ajoute un versant familial avec un dilemme posé à l'héroïne, qui va aller à l'encontre de ses proches et les "trahir." Cet aspect, qui prend de plus en plus d'importance au fil des minutes, est évidemment là pour humaniser le débat et forcément impliquer les spectateurs. Malgré tout le talent de Zita Hanrot et de Sami Bouajila, les ficelles sont un peu grosses pour souligner ce que l'on avait bien compris sans qu'il soit besoin d'insister ou d'ajouter des détails superflus, avec en sus un personnage très convenu comme celui de la journaliste. Difficile de dire que Rouge soit d'utilité publique : il met le doigt sur des pratiques qu'il convient de dénoncer mais sa mise en scène guère inspirée et une certaine lourdeur dans sa démonstration le pénalisent quelque peu.
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