Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Ici, c'est Auch (6)

 

Fin des réjouissances avec L'envol, Le parfum vert et Nostalgia. Je reviendrai à Auch.

 

L'envol, Pietro Marcello, sortie le 11 janvier 2023

Après un remarquable Martin Eden, L'envol, inspiré d'un roman russe publié en 1923, confirme le goût de Pietro Marcello pour les adaptations littéraires et son excellence en la matière. Dureté et féérie cohabitent dans ce film situé dans l'après guerre de 14-18, jusqu'aux années 30, qui a des allures de conte avec ses sortilèges et ses malédictions, où le réalisme se fait parfois musical ou magique. Contrairement à ce que son titre suggère, le long-métrage ne s'envole pas vraiment mais reste à une belle altitude pendant toute sa durée, proposant une très tendre relation père/fille, seuls ou presque face à l'hostilité d'un village. Avec une maîtrise parfaite des ellipses temporelles et un sens du cadre affirmé, Pietro Marcello parvient à rester cohérent dans sa narration et à nous attacher à ses personnages principaux, tout en recréant avec talent la rudesse d'une époque dans la région picarde. Il n'y a rien à redire à l'interprétation des comédiens les plus connus, soit Noémie Lvovsky et Louis Garrel, mais ce sont bien Raphaël Thiéry et Juliette Jouan qui donnent le plus dans L'envol, la dernière, en particulier, qui démontre, dès son premier rôle d'importance dans un long-métrage, un naturel et un charme confondants. Issue d'une famille d'artistes, professionnels ou amateurs, cette jeune caennaise est plu qu'une promesse pour le cinéma français.

 

Le parfum vert, Nicolas Pariser, sortie le 21 décembre

Après Le grand jeu et Alice et le maire, on ne saurait blâmer Nicolas Pariser d'avoir opté pour un divertissement pur, sous forme de comédie d'espionnage, et ce tout en évoquant l'industrie prospère des Fake News et l'antisémitisme ambiant en Europe, sujets on ne peut plus sérieux, a priori. Mais cette contradiction n'est pas la principale raison du quasi échec de ce film où les références écrasantes à Alfred Hitchcock commencent dès la première scène, sans oublier les clins d’œil répétés à l'univers de Hergé. Pourquoi pas, après tout, même si le cinéaste nous a habitués à plus de personnalité dans ses scénarios. Mais beaucoup de choses ne fonctionnent pas dans Le parfum vert, mais peut-être est-on trop exigeant avec Pariser, à commencer par un humour loin d'être irrésistible et un scénario qui a des allures de pastiche, sans l'assumer totalement, avec un sens du rythme inégal. De leur côté, et sans que leur talent ne soit remis en cause, l'on ne peut pas dire que Sandrine Kiberlain ni Vincent Lacoste soient impressionnants, pas plus que leur alchimie saute aux yeux. Soyons honnête, il est quasiment impossible de trouver le temps long dans Le parfum vert mais la mise en scène, très fade, n'est pas vraiment de celles censées apporter de l'eau au moulin d'une intrigue à rebondissements qui a tendance à confondre vitesse et précipitation.

 

Nostalgia, Mario Martone, sortie le 23 novembre

Revoir Naples et sourire, ou bien mourir, la réponse figure à la fin de Nostalgia, un nouveau film que Mario Martone consacre à sa ville natale, après notamment Qui rido io, l'une des nombreuses œuvres du réalisateur italien inédites dans les salles françaises. Nostalgia est empreint d'une grande mélancolie intime, celle d'un homme qui a réussi sa vie au loin et qui revient sur les traces de son enfance et adolescence, précisément dans le quartier de la Sanità, dont les ruelles labyrinthiques sont à l'image de son esprit d'homme mûr qui n'a rien oublié. Ce n'est pas un film de plus sur la Camorra ni sur la religion, même si les deux aspects sont très présents, de manière sobre et anti-spectaculaire, au milieu de la splendeur et de la misère napolitaines. Certains ne goûteront peut-être pas un certain classicisme dans la mise en scène de Martone, ni un dénouement très certainement prévisible, et c'est dommage, car cette tragédie moderne, cette version nouvelle de Caïn et Abel possède une sorte de douceur dans sa noirceur, une manière épurée de parler d'une ville gangrenée par la violence et du déterminisme social avec l'amertume qui en découle. Le film n'a pas été trop bien accueilli à Cannes mais ce n'est pas un critère à prendre compte dans l'orgie d'images qui y est déversée. Nostalgia est à voir hors de tout esprit de compétition, pour en savourer pleinement la belle austérité et pour admirer, une fois de plus, la finesse de jeu du grand Pierfrancesco Favino.

 



10/10/2022
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 51 autres membres