Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Ici, c'est Arras (5)

 

Au pays de nos frères de Raha Amirfazli et Alireza Ghasemi.

Il y aurait actuellement autour de 5 millions de réfugiés afghans en Iran. Même s'ils parlent la même langue que les habitants de leur pays d'adoption, ils n'en sont pas moins, la plupart du temps, que des citoyens de seconde zone, susceptibles d'être expulsés, pour des raisons plus ou moins sérieuses. Ce sont eux qui sont au premier plan dans Au pays de nos frères, premier long métrage de Raha Amirfazli et Alireza Ghasemi. Les réalisateurs ont habilement choisi de raconter trois histoires situées chacune au début d'une des décennies de ce siècle. Si les films à "sketches" se caractérisent assez souvent par leur intérêt inégal, ce n'est pas le cas ici, dans un triptyque qui varie les situations et les personnages pour, au final, dégager une impression homogène de mépris, voire de racisme, de la part de la population née en Iran vis-à-vis de ces "frères" néanmoins étrangers. Aucun excès, pas plus mélodramatique que outrancier, n'est à déplorer dans un film qui montre une grande tendresse pour ses personnages aux abois, soumis à un certain arbitraire, et obligés de composer en fonction, y compris par le mensonge, quand cela est vital. Le cinéma de Amirfazli et de Ghasemi n'a certes pas la puissance de celui d'un Mohammad Rasoulof, par exemple, mais leur maîtrise narrative et la douceur trompeuse de leur mise en scène se révèlent parfaitement adaptées au type d'histoires, édifiantes, pour lesquelles ils ont opté.

 

Berlin, été 42 de Andreas Dresen

Au vu de son titre, Berlin, été 42 (d'ailleurs différent en allemand), l'on se doute bien que le film d'Andreas Dresen ne va pas être une comédie légère ni une partie de plaisir. Basé sur l'histoire réelle d'une jeune femme qui appartenait, avec son mari, à une organisation plus tard appelée "l'orchestre rouge", une grande partie du long métrage est rude, en effet, le réalisateur ayant délibérément choisi la voie du réalisme pour nous conter une histoire dont on ne peut ignorer qu'elle sera désespérée. Cependant, le récit se situe sur deux temporalités séparées de quelques mois seulement : au présent de 1943, avec son héroïne, Hilde, emprisonnée, et dans un passé récent, lumineux, où la lutte contre les forces obscures qui sévissent en Allemagne n'empêche pas les sentiments. Hilde est une jeune femme qui suit le chemin risqué de son époux, beaucoup par conviction idéologique mais surtout par amour. Les flashbacks se succèdent mais construits dans un rebours temporel, contrastant fortement avec le sort réservé à Hilde et à ses amis. A noter que les "petites mains" de l'administration allemande de cette funeste époque ne sont pas décrites comme des monstres mais comme des fonctionnaires zélés qui ne discutent pas les ordres, ce qui est sans soute plus effrayant, encore pour montrer les rouages de cette machine à broyer les opposants. Quand à Liv Lisa Fries, dans le rôle de Hilde, elle est absolument exceptionnelle.

 

After Party de Vojtěch Strakatý 

Avec After Party de Vojtěch Strakatý, nous avons la promesse d'un récit d'apprentissage, genre ô combien encombré sur la route du cinéma, doublé d'une course contre le montre de 24 heures. Notons d'emblée que l'héroïne de l'histoire a 23 ans et que parler d'apprentissage, dans son cas, est un peu excessif, même si elle est confrontée, durant cette journée d'enfer, à pas mal de tourments et surtout à une vision nouvelle et peu agréable de son propre père. Quant au suspense annoncé, il fait rapidement long feu et le film a du mal à s'étirer sur près de 90 minutes pour ne pas se répéter. Que retenir alors de After Party ? Une histoire fraîche d'amitié et de sororité, incarnée par deux actrices tout à fait charmantes et une critique assez conventionnelle des dégâts du capitalisme en République Tchèque, à travers une famille très bourgeoise qui vit manifestement bien au-dessus de ses véritables moyens. Le film, agréablement réalisé, manque de profondeur et on aurait aimé y trouver davantage sur des relations familiales qui ne nous sont montrées qu'à travers les moments d'une crise majeure. Même chose pour sa protagoniste principale dont on ne sait strictement rien au début du film et pas beaucoup plus à la fin. Difficile, dans ces conditions, de sentir concerné par son dilemme.

 



13/11/2024
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