Ici, c'est Arras (10)
Déjà la fin. Je termine avec 2 films français, après un Ukrainien.
Luxembourg, Luxembourg, Antonio Lukich
Tourné avant la guerre mais monté alors que la Russie avait envahi l'Ukraine, Luxembourg Luxembourg, selon les dires de son réalisateur, Antonio Lukich, entend montrer que "tous les films ukrainiens ne sont pas nécessairement sinistres." Et effectivement, son deuxième long-métrage joue assez souvent sur le registre du burlesque, avec un certain nombre de blagues locales qui ne seront pas obligatoirement comprises par le public international. Plus globalement,,Luxembourg, Luxembourg peut être considéré comme une dramédie avec deux frères jumeaux au premier plan, l'un engagé dans la police, l'autre conducteur de bus et parfois dealer. L'un comme l'autre, en tous cas, n'ont plus revu leur père depuis des années et le moins qu'ils puissent faire est de se rendre à son chevet, au Luxembourg. Le film est agréable à regarder, bien réalisé, mais son scénario, sans être confus, se disperse un peu trop et ses ruptures de ton sont parfois surprenantes. Inégal mais attachant, le deuxième long-métrage de Lukich a cependant suffisamment d'énergie, alliée à une certaine mélancolie, pour séduire. D'autant que les frères jumeaux qui jouent les rôles principaux, Ramil et Amil Nasirov, par ailleurs membres du groupe de rap Kurgan and Aggregate, sont impeccables, et drôles, de bout en bout.
Toi non plus tu n'as rien vu, Béatrice Pollet. Sortie le 8 mars
Toi non plus tu n'as rien vu (l'affirmation s'adresse aussi au spectateur) est l'histoire d’une femme atteinte d’un déni de grossesse total, issue d’un milieu aisé, éduquée, et surtout déjà mère, ce qui rend la situation encore plus incompréhensible. Le film cherche donc d'abord à nous rapprocher de cette femme, à travers sa sidération, puis dans sa situation de prétendue coupable et principalement victime (de son propre corps) et non de potentielle infanticide, comme la justice a le plus souvent tendance à la qualifier. D'une dignité parfaite, pédagogue comme il sied dans un cas pareil, le long-métrage est une fiction basée sur des faits réels, qui s'appuie sur un scénario très solide où les proches interagissent avec l'accusée et où l'aspect de thriller existe bel et bien, même si le temps consacré au procès ne constitue pas son axe premier. L'émotion, loin d'être forcée, est d'autant plus forte que la personnalité du personnage principal, au plus profond de son intimité, se dévoile, tout en gardant le mystère de tout être humain. Après Saint-Omer et Annie Colère, entre autres, Toi non plus tu n'as rien vu parle du corps des femmes et de la maternité avec franchise et sans tabous, presque une nouveauté, salutaire, dans le cinéma français. Dans le film de Béatrice Pollet, l'interprétation exceptionnelle de Maud Wyler, aux côtés des très bons Grégoire Colin et Géraldine Nakache, n'est pas pour rien dans la réussite d'un récit d'une vérité poignante.
Mon héroïne, Noémie Lefort
On ne va pas se mentir : Mon héroïne, ce n'est pas Les contes de la lune vague après la pluie ni Barry Lyndon.. Non, c'est un premier film pour se divertir, rire et chanter sur un vieux titre de Kiss. Accessoirement, c'est aussi l'histoire personnelle, très retravaillée, de la cinéaste, Noémie Lefort, qui s'était mise en tête, dès son enfance rouennaise, de devenir cinéaste et de diriger un jour Julia Roberts. Conçu comme un film populaire, Mon héroïne a le goût des rêves de jeunesse, totalement dingues, mais qui, avec de l'audace et de l'enthousiasme peut devenir, pourquoi pas, la réalité. Le film n'évite pas le côté carte postale new-yorkaise, mais cela fait partie intégrante de l'entreprise et au fond, ce qui compte, ce sont les rapports humains, et surtout, pour une jeune fille, celui qu'on entretient avec sa propre mère, alors que le papa est depuis longtemps aux abonnés absents. Nourri par une énergie et une vitalité indestructibles, Mon héroïne cavale à un rythme élevé et professe une bienveillance sans limite pour ses personnages principaux, des femmes de tête mais avant tout d'impulsions. Quant à l'héroïne du titre, pas sûr en définitive que ce soit bien Julia Roberts, mais cela, le film nous le fait comprendre sans ambigüité. Aux côtés de Chloé Jouannet et de Pascale Arbillot, excellentes, Louise Coldefy amène un peu plus de folie au scénario. Elle est épatante de drôlerie et de fantaisie.
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