Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Ici, c'est Arras (1)

 

Me voici de retour dans mon festival préféré (mais oui !). Un début en douceur. Les "gros" films ne devraient pas tarder à arriver.

 

Choeur de rockers, Ida Techer et Luc Bricault, sortie le 28 décembre

Pas difficile de voir où Chœur de rockers veut nous entraîner : sur un terrain que le cinéma britannique, par exemple, a déjà bien déchiffré, avec des marins pêcheurs ou des femmes de soldat, pour ceux qui reconnaîtront deux feel good movies récents. L'odyssée dunkerquoise de ces séniors chanteurs vient d'une histoire vraie, sans doute un peu romancée, mais pas tant que cela, et visiblement toujours dans l'esprit de cette joyeuse troupe plus attirée par le rock que par les chansons traditionnelles de notre terroir. C'est un film dont on a peur de connaître tout à l'avance, y compris cette antienne du "vivre ensemble", mais le film évite fort heureusement de verser dans la pure candeur, s'efforçant de ne donner aucune leçon de morale et réussissant à trouver l'équilibre entre le collectif et l'individuel, permettant ainsi à quelques figures particulières d'émerger, incarnées notamment par une ébouriffante Andréa Ferréol et une Mathilde Seigner en forme olympique. Il y a bien ici ou là quelques blagues faciles mais Chœur de rockers montre une belle tenue et une vitalité indéniable, dans son ensemble, avec un sens du rythme qui ne s'applique pas seulement aux morceaux qui incitent à taper du pied (Clash) ou à s'émouvoir (Bowie). Un film sans prétention aucune sur le plan du style mais dont la part d'humanité, joliment distillée, suffit sur l'instant au bonheur simple du spectateur.

 

Ailleurs si j'y suis, François Pirot, sortie le 22 mars

Y a t-il cinéma plus existentialiste que celui d'outre-Quiévrain, qui n'hésite pas à y inclure un puissant sens de l'absurde, sans oublier une pincée de surréalisme ? Ainsi se présente Ailleurs si j'y suis, le deuxième long-métrage de François Pirot, dix ans après Mobil Home et une activité de coscénariste auprès de Jochim Lafosse (Elève libre, Nue propriété). Mais où est donc ailleurs, pour le personnage principal du film, si ce n'est au cœur d'une forêt aux vertus magiques et apaisantes, qui l'éloignent de son stress. Mais ce héros fatigué n'est pas le seul à se remettre en question, c'est même l'intégralité de son entourage qui est soumis à d'improbables turbulences : épouse, voisin, père, patron ... L'humour belge est impayable et élégant quand il se joue de nos angoisses et de nos privilèges et Ailleurs si j'y suis réussit avec brio à nous conter plusieurs vies parallèles, sans perdre son ton ironique et néanmoins poétique. Des existences entremêlées marquées par la confusion du temps présent et de la définition d'une émancipation impossible, hors des normes imposées par la société. Le casting du film est royal, une internationale francophone de grands acteurs : Jérémie Renier (impeccable), Suzanne Clément (irrésistible), Samir Guesmi (hilarant), Jean-Luc Bideau (incroyable) et Jackie Berroyer (remarquable). Un quintet de comédiens que l'on suit les yeux fermés dans des aventures qui les sortent d'eux-mêmes et de leur quotidien, et nous soulèvent de la même façon.

 

Blanquita, Fernando Guazzoni

Blanquita, 18 ans, est devenue le témoin clé d’un scandale impliquant des hommes fortunés et influents, dont les "soirées" ont détruit de nombreuses vies. Inspiré par un scandale chilien réel, autour d'un réseau pédophile, le film de Fernando Guazzoni est construit autour de l'idée qu'un "bon mensonge fonctionne avec un certain nombre de vérités." Autant dire que Blanquita se nourrit d'un monceau d'ambigüités et qu'il est difficile de faire son choix entre les diverses versions proposées, si ce n'est que le sordide des affaires évoquées est évident. Le film semble presque trop court pour pouvoir explorer les différentes pistes et se forger une opinion plus profonde et son montage, malgré une efficacité indéniable, renforce cette idée qu'il nous manque des éléments pour pouvoir s'approcher, ne serait-ce qu'un peu, de l'authenticité des faits. Il est vrai que le personnage de Blanquita est fascinant, manipulé ou manipulateur, enfant-martyre et accusatrice, parfois confuse, on se perd en conjectures sur sa personnalité réelle et sur sa volonté de prendre sa revanche sur une société qui l'a avilie depuis l'enfance, sans lui laisser l'ombre d'une chance. Sombre et désespéré, le long-métrage ne montre aucun acte dégradant mais la violence des mots suffit pour qualifier des pratiques perverses et passées sous silence d'une élite protégée de tout. Avant que Blanquita ne vienne donner un grand coup de pied dans la fourmilière, quel que soit son degré de crédibilité.

 



05/11/2022
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