Guirlande de vieux films (Juin/2)
Au royaume des cieux, Julien Duvivier, 1949
La nouvelle directrice d'une maison d'éducation surveillée emploie la manière répressive et les détenues se révoltent. Profitant de ce que le pays est inondé, l'une d'entre elles s'évade avec la complicité de son amant. Le cinéphile qui a apprécié à sa juste valeur la puissance de The Magdalene Sisters, il y a quelques années, trouvera peut-être que Au royaume des cieux n'est pas du même niveau mais il ne pourra que reconnaître ses grandes qualités, son intensité, notamment dans son final avec deux intrigues parallèles et son interprétation remarquable (Suzy Prim et la jeune Suzanne Cloutier, notamment, Juliette Greco n'ayant qu'un rôle secondaire, et Serge Reggiani, par intermittences). Cette fois, Henri Jeanson a remisé ses bons mots au vestiaire et ses dialogues sonnent fort et juste. Enfin, dans ce mélodrame, l'intelligence narrative et la mise en scène inspirée de Duvivier font le plus souvent merveille, en particulier dans les scènes de groupe (la grève de la faim) et celles du paysage dévasté par les inondations, dignes de Murnau.
Sous le signe du taureau, Gilles Grangier, 1969
Un industriel dans la recherche aéronautique est lâché par ses financiers alors qu'un prototype de missile vient d'exploser en vol lors de son premier essai. Ce Grangier tardif montre un cinéaste en petite forme qui ne donne aucune ampleur à son histoire d'homme intègre mais vieillissant, sur le point de renoncer. Gabin ne semble pas non plus très concerné et la direction d'acteurs est globalement très lâche. Seule Suzanne Flon fait montre d'un peu de vivacité, dans les dernières minutes. Le film se veut très critique à l'égard du petit monde des banquiers et affairistes de tous poils mais la conviction n'y est pas (où est passée la verve d'Audiard ?). Au final, c'est une morale assez plan plan qui prédomine. Et de taureau, on n'en voit pas la queue d'un.
Paris au mois d'août, Pierre Granier-Deferre, 1966
Un homme reste seul à Paris durant le mois d'août pendant que femme et enfants partent en vacances. Il fait la rencontre d'une jeune anglaise présente pour un shooting de mode. Un roman de Fallet, des dialogues de Jeanson et un Granier-Deferre inspiré par cette parenthèse amoureuse, romantique et estival et sans doute déjà épris de son actrice féminine principale qu'il épousera un an plus tard. Le couple formé par l'excellent Charles Aznavour et la délicieuse Susan Hampshire fonctionne admirablement bien au point qu'on ne remet jamais en question la crédibilité de cette romance soudaine. Le film ne néglige pas ses seconds rôles, avec les amis du héros qui forment comme une sorte de choeur antique indulgent et complice. Malgré une certaine minceur de son scénario, Paris au mois d'août possède le charme immédiat et irrésestible de ces courts moments d'euphorie sentimentale qui illuminent toute une existence, par ailleurs si décevante et si casanière. Qui a connu ces instants privilégiés comprendra ce qui meut et émeut les deux personnages principaux du film.
Le dos au mur, Edouard Molinaro, 1958
L'industriel Decrey découvre que sa femme a un amant et décide de la faire chanter sous un nom d'emprunt puis de faire passer ce dernier pour le maître-chanteur. Adapté d'un roman de Frédéric Dard, le premier film d'Edouard Molinaro débute longuement avec le camouflage d'un crime apparemment commis par le mari trompé. Suit un flashback qui va révéler une vérité assez surprenante. Le dos au mur, au-delà de ses qualités de suspense est au fond l'histoire d'un homme fou amoureux de sa femme et décidé à la faire revenir auprès de lui par tous les moyens. Molinaro, en fin connaisseur du cinéma américain, s'inspire des films noirs de l'époque signés Preminger ou Hitchcock. Il n'est pas à ce niveau et sa mise en scène est parfois un peu lourde mais elle est plutôt efficace. Plus que Jeanne Moreau, c'est Gérard Oury qui rafle la mise, mâchoires carrées et regard intense.
Cargaison blanche, Georges Lacombe, 1958
Après la disparition suspecte de l'un de ses confrères, une jeune journaliste reprend son enquête. Elle se fait engager comme bonne puis barmaid. Remake du Chemin de Rio (Siodmak, 1937), Cargaison blanche est l'avant-dernier long-métrage de Georges Lacombe (il poursuivra à la télévision). Cinéaste solide, il n'est jamais aussi bon que quand son sujet l'est également. Ce qui n'est pas vraiment le cas de Cargaison blanche, film au suspense limité qui s'attaque à la traite des blanches sans approfondir son thème. Françoise Arnoul, alors à l'apogée de sa carrière et de sa beauté (après French Cancan et La chatte) mène la danse avec aplomb et la conscience de son pouvoir érotique. Le reste de la distribution est un peu décevant, le pauvre Jean-Claude Brialy étant sacrifié dès le début du film.
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