Cinéphile m'était conté ...

Boefje, Douglas Sirk, 1939
Rotterdam. Jan, un garçon de 12 ans traîne dans les rues avec un copain et vole à l'occasion. Un pasteur le prend sous son aile et tente de corriger son caractère. En 1939, Detlef Sierck (futur Dougla Sirk), en fuite de l'Allemagne nazie réalise aux Pays-Bas un film qu'il quitte le dernier jour de tournage par crainte d'une invasion allemande. Il ne verra pas son montage ni le produit fini. Le film fait partie de la sélection pour le premier Festival de Cannes qui n'aura pas lieu pour cause de déclaration de guerre. C'est un film assez classique sur les mauvais penchants d'un gosse livré à lui-même mais qui a un bon fond. Il est attachant pour sa liberté de ton et l'interprétation du gamin, joué par une actrice de 45 ans (sic). On est loin du Sirk roi du mélodrame hollywoodien mais c'est une curiosité très agréable à découvrir.

Coeur de lilas, Anatole Litvak, 1939
Un directeur d'usine est retrouvé mort dans un terrain vague. L'un de ses employés est vite accusé du crime mais un inspecteur ne croit pas à sa culpabilité. Il s'infiltre dans le milieu. Premier film français d'Anatole Litvak, Coeur de lilas a de nombreux centres d'intérêt, outre son excellente réalisation et son réalisme dans la description du Paris populaire de l'époque. Il permet de voir Gabin dans un second rôle et Fernandel (pour une minute et pour une chanson où il est d'ailleurs doublé). Autre rengaine très connue, celle de La môme caoutchouc, entonnée successivement par Gabin et par Fréhel. Enfin, Marcelle Romée, au jeu très moderne, tourne là son quatrième et dernier film. Sujette à la dépression elle se suicidera quelques mois après le tournage.

Hold-up à la milanaise (Audace colpo dei soliti ignoti), Nanni Loy, 1959
Un milanais vient recruter des malfrats romains pour attaquer un fourgon chargé des recettes des paris de sport. Suite du célébrissime film de Mario Monicelli, Les pigeons, Hold-up à la milanaise ne jouit pas, à raison, de la même réputation. Le casting est pourtant pratiquement similaire, Vittorio Gassman en tête, avec également Renato Salvatori et Nino Manfredi et une Claudia Cardinale sous-utilisée. Les mésaventures de ces pieds nickelés ne manquent pas de piquant ni de rebondissements mais le film sent un peu réchauffé. Et le quasi débutant Nanni Loy à la mise en scène n'a pas le talent de Monicelli.

Soyez les bienvenus (Dobro pozhalovat), Elem Klimov, 1964
Kostia se fait renvoyer du camp d'été des pionniers pour indiscipline. Pas décidé à partir, il vit dans la colonie en clandestin, avec l'aide de ses camarades. Le premier long-métrage du réalisateur de Requiem pour un massacre ressemble à première vue à une version soviétique de Zéro de conduite de Vigo. Mais c'est bien entendu la satire qui court sous son innocente intrigue, une sorte d'hymne à la désobéissance et un défi à l'autorité communiste, ici ridiculisée. Le film put sortir quand Khroutchev était au pouvoir mais fut ensuite relégué dans les archives et rarement montré. Sans être une merveille, il témoigne aussi de la facilité technique de Klimov dont la maigre cinématographie a pâti de la censure.

Un colt pour une corde (Billy two Hats), Ted Kotcheff, 1974
Un sheriff poursuit deux fugitifs qui ont dévalisé une banque et tué un employé. Lent et minimaliste, ce western de Ted Kotcheff est une vraie curiosité pour un genre alors à l'agonie. Les protagonistes sont d'ailleurs à cette image des indiens dégénérés au shériff raciste et vindicatif (Jack Warden, savoureux). Beaucoup d'humour et de nostalgie dans ce film très peu spectaculaire mais attachant qui fut tourné dans le désert israélien du Neguev. Gregory Peck, vieillissant, affublé d'un invraisemblable accent écossais joue ici dans son dernier western. Et comme toujours, il est impeckable.