Cinéphile m'était conté ...

Petit bouquet italien.

Les deux rivales (Gli indifferenti), Francesco Maselli, 1964
Ruinée et sur le point de perdre sa maison, une comtesse fait confiance à son amant qui ne pense qu'à profiter de la situation. Des différentes adaptations de ses livres, Moravia préférait celle de Gli indifferenti (le titre français est mauvais) à celles du Conformiste de Bertolucci et du Mépris de Godard. Il est vrai que l'on retrouve pleinement l'atmosphère délétère et résignée du romancier dans le film de Maselli qui a quelque chose de Viscontien dans la forme. Les personnages perdent toute dignité pour l'argent qui leur manque dans un une sorte de requiem de leurs illusions perdues. La mise en scène est d'une grande élégance, l'interprétation de première ordre, en particulier pour les trois actrices représentant les différents âges de la femme : Claudia Cardinale, Shelley Winters et Paulette Goddard.

Les coupables (Processo a la citta), Luigi Zampa, 1952
A Naples au début du 20ème siècle, deux meurtres obligent le juge Spicacci à arrêter des personnages influents de la ville. Les coupables est l'un des premiers films à dénoncer les exactions de la camorra napolitaine, avant que Francesco Rosi n'entre en scène et en fasse un genre en soi. Il est d'ailleurs l'un des coscénaristes du film dont le titre original est Procès à la ville et traduit l'ampleur de la corruption. La figure du juge incorruptible, seul contre tous, est aussi un personnage que l'on retrouvera fréquemment par la suite. Zampa réalise un thriller de très bonne tenue qui profite au mieux des ressources offertes par l'architecture des vieux quartiers de Naples.

Le célibataire (Lo scapolo), Antonio Pietrangeli, 1955
Grossiste en électro-ménager, Paolo a juré de ne jamais se marier. Et se conduit comme un mufle avec les femmes. Deuxième film d'Antonio Pietrangeli et assurément pas son meilleur malgré la signature d'Ettore Scola parmi les coscénaristes. La comédie de moeurs n'est ni drôle ni touchante avec un Alberto Sordi relativement sobre dans des situations où il passe irrémédiablement pour la goujaterie faite homme. L'histoire est plutôt faible et répétitive avec pour seul intérêt, outre Sordi, tout de même, de voir Nino Manfredi dans un petit rôle et une Sandra Milo émouvante en hôtesse de l'air solitaire.

La vie aigre (La vita agra), Carlo Lizzani, 1964
Un intellectuel provincial s'installe à Milan avec un but : faire sauter le bâtiment d'une grande entreprise pour venger la mort de 43 mineurs. Adapté d'un livre célèbre en Italie, le film est une satire féroce de la société de consommation qui reste toujours actuel. Mais il y manque un ingrédient essentiel : l'humour. La vita agra a tout du pensum didactique qui théorise sans transformer ses idées en véritable oeuvre cinématographique. Ugo Tognazzi est pourtant un très bon choix pour interpréter l'homme qui au lieu de combattre le système va finalement y céder. Sympathisant communiste, Carlo Lizzani a cette fois oublié de donner un peu de fantaisie et de légèreté à son discours.

Guendalina, Alberto Lattuada, 1957
La saison se termine dans la station de Viareggio mais Guendalina va devoir rester plus longtemps car ses parents se séparent. Souvent cinéaste des premiers émois amoureux, Lattuada n'a pas toujours eu la main légère. Guendalina est une exception, le devant sans aucun doute à l'écriture de Valerio Zurlini. Tout en délicatesse et mélancolie, le film convainc dans son portrait d'adolescente insupportable et égocentrique qui se métamorphose au fil des sentiments qu'elle éprouve pour un garçon simple et d'une classe sociale plus basse que la sienne. Raf Vallone et Sylva Koscina, stars à l'époque, se contentent de rôles d'appoint laissant la vedette aux jeunes Jacqueline Sassard et Raf Mattioli. La première, niçoise, fit une petite carrière dans les années 60 et retrouva son compagnon de jeu dans le sublime Eté violent de Zurlini. Le destin de Mattioli fut tragique puisqu'il mourut après un accident cardiaque avant ses 24 ans.