Glanage de vieux films (Janvier/2)
Professeur Hannibal (Hannibal tanar ur, Zoltan Fabri, 1956)
Dans la Hongrie fasciste du début des années 30, un petit professeur de latin écrit une thèse sur la mort de Hannibal, qui n'a pas l'heur de plaire au régime en place et le condamne à la vindicte populaire. Le film, pas toujours clair dans ses implications politiques (sauf sans doute pour les fins connaisseurs de l'histoire hongroise), a une résonance particulière si l'on considère son année de tournage, 1956. Cette satire du fascisme est évidemment valable pour le pouvoir alors en place. Après son chef d'oeuvre, Un petit carrousel de fête, tourné l'année précédente, Zoltan Fabri s'affirme comme le grand cinéaste magyar des années 50, régulièrement présent dans les festivals de Cannes et Venise. Une grande partie de son oeuvre reste à découvrir pour les cinéphiles.
Les héros du dimanche (Gli eroi della domenica, Mario Camerini, 1953)
Jour de match entre une petite équipe de province, qui joue sa survie en première division, et le grand Milan. Ce n'est pas tant la partie qui intéresse Camerini (le football est toujours mal filmé au cinéma) que son environnement, la ferveur des supporters, la vie intime des joueurs, etc. Le film ratisse large, comédie, suspense (il y est question de corruption, aussi), drame, feuilleton sentimental. Il y a côté eau de rose qui lui donne une naïveté angélique. La meilleure scène est celle de la fin quand deux supporters arrivent trop tard au stade et se font raconter le match où leur équipe s'est imposée.
- C'est le plus beau jour de notre vie !
- Et nous n'étions même pas là !
PS : Vallone, avant-centre ; Mastroianni, ailier ; Interlenghi, gardien : belle équipe.
Bungalow pour femmes (The Revolt of Mamie Stover, Raoul Walsh, 1956)
Après 50 ans de bons et loyaux services, le grand Walsh signe un film amer et pessimiste qui décrit l'arrivisme d'une femme qui a une revanche à prendre sur la vie et perdra tout, sauf la dignité. Problème majeur : Walsh ne peut s'aventurer trop loin dans le portrait de cette femme et de son métier, hôtesse de bar, dont on ne fait que deviner qu'elle arrondit son pécule avec quelques extras. La censure veillait. Autre point faible : le jeu de Richard Egan, acteur médiocre, dans un rôle qui serait allé comme un gant à Gable ou Grant. Le ton désenchanté du film lui donne cependant une certaine valeur, d'autant que le technicolor est éclatant (Hawaii n'a jamais été aussi paradisiaque) et que Jane Rusell prouve qu'elle est une excellente actrice, n'en déplaise à ceux qui pensent que ses courbes affolantes étaient sa seule façon de s'exprimer. Une oeuvre mi-figue, mi-raisin, d'un Walsh en forme moyenne.
Peppermint frappé (Carlos Saura, 1967)
Premier film de Saura avec son égérie Geraldine Chaplin. Celle-ci est d'ailleurs remarquable, et très belle, dans un double rôle à la manière de Sueurs froides. Le film est dédié à Bunuel, hommage pertinent puisqu'il y est question de bourgeoisie perverse sous des dehors anodins, en pleine dictature franquiste que le cinéaste prend bien soin de ne pas alerter, nonobstant le caractère parfaitement amoral du scénario. Un peu trop statique, Peppermint frappé est absolument représentatif du Carlos Saura des années 60/70.
Le Mont Fuji et la lance ensanglantée (Chiyari Fuji, Tomu Uchida, 1955)
Un faux film de samouraïs et une vraie satire sociale. Ce road-movie, avec les pieds comme mode de transport, est l'occasion de nombreuses saynètes burlesques, mais aussi de moments de réalisme (la vente de jeunes filles pauvres aux lupanars), le tout dans un noir et blanc éblouissant. Un samouraï déchu traîne son désenchantement le long des routes. Même sa lance, relique ancestrale, est une contrefaçon. L'un de ses serviteurs est très porté sur le saké et l'autre, ombre de son maître, devient un héros devient un héros en défiant et tuant cinq samouraïs querelleurs. Le monde à l'envers ! Uchida fait se croiser toute une galerie de personnages pittoresques et pétris d'humanité. Une oeuvre fort attachante et subtilement ironique.
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