Cueillette de vieux films (Mai/2)
Un grand patron, Yves Ciampi, 1951
Le grand patron opère à l'hôpital Bichat. Orgueilleux, sûr de lui, égoïste. Ce chirurgien ne travaille pas pour l'argent mais pour la reconnaissance de ses pairs. Le film de Ciampi, cinéaste relativement médiocre, accumule un certain nombre de poncifs sur le monde de l'hôpital. Il peut éventuellement être pris pour un documentaire, très daté, cependant. Pierre Fresnay, plus ou moins mis à l'index après la guerre, retrouve un rôle où il brille naturellement. Son jeu froid et distant convient parfaitement au grand patron qu'il incarne. Une performance de choix dans un film à la mécanique aussi bien huilée que vaine.
La prise du pouvoir par Louis XIV, Roberto Rossellini, 1966
A la mort de Mazarin, le jeune roi s'octroie les pleins pouvoirs, fait emprisonner Fouquet et commence l'embellissement du château de Versailles. Désormais éloigné du cinéma, Rossellini tourne pour la télévision française. S'appuyant sur le scénario de l'éminent historien Philippe Erlanger, cette chronique se veut la plus réaliste et la moins spectaculaire possible. Austère, le film s'attache à la vérité historique avec un Louis XIV dont les actes ont une arrière-pensée politique, notamment pour attirer la noblesse à Versailles, loin du Parlement. La Fronde, qu'il a connue enfant, est restée comme un traumatisme. Une remarquable leçon d'Histoire.
La fille sans dot (Bespridanaitsa), Yakov Protazanov, 1937
Alors qu'elle est censée épouser un homme riche, à l'instar de ses soeurs, Nina tombe amoureuse d'un aigrefin beau parleur. Adapté d'une pièce de théâtre d'Alexandre Ostrvovsky, le film se veut une satire des coutumes du régime tsariste et des mariages arrangés. Son ton burlesque se marie avec la musique de Tchaïkovsky et un certain nombre de chansons folkloriques. Le contraste n'en est que plus grand avec le dénouement mélodramatique. Excellent représentant de l'école soviétique du muet, notamment dans ses comédies, Protazanov s'est révélé moins prolifique et surtout souvent pataud dans le cinéma parlant. Le fille sans dot, notamment à cause de son interprétation, est outrancier et passablement soporifique.
Le mystère de la section 8 (Dark Journey), Victor Saville, 1937
Pendant la première guerre mondiale, Madeleine, sous couvert d'une maison de couture, donne des renseignements à l'armée française. Elle est amoureuse d'un allemand, soi-disant traître à sa patrie. Victor Saville, petit joueur dans la cour des grands (Hitchcock), tente de donner un sens à ce film d'espionnage au scénario filandreux. L'intérêt principal vient du couple assez incongru formé par le rigide Conrad Veidt et la sensitive Vivien Leigh (bien plus belle que dans Autant en emporte le vent, tourné deux ans plus tard). La glace et le feu dans un récit confus et pas très bien dirigé.
L'opéra de quat'sous ( Die 3-Groschen-Oper), Georg Wilhelm Pabst, 1931
A Londres en 1900, pendant les fêtes du couronnement. Mackie, le roi des bandits, enlève et épouse Polly, la fille du roi des mendiants, Peachum. Celui-ci furieux, dénonce Mackie à la police. Si Pabst a simplifié l'intrigue de Brecht et réduit le nombre de chansons de Weill, le film (il existe aussi une version française avec Albert Préjean) n'en a pas moins conservé sa verve anarchisante dans une forme parfois volontairement grotesque et comique (une comparaison avec Le million de René Clair s'impose). Il reste quelques vestiges expressionnistes dans cette oeuvre qui épingle le pouvoir et la finance, proches du banditisme. Partiellement censuré en France, le film fut évidemment interdit en Allemagne par les nazis.
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