Cueillette de vieux films (Février/1)
Anouchka (Anuschka, Helmut Käutner, 1942)
Dans la Vienne des années folles, on batifole et on flirte dans les bals. Anuschka, qui a perdu son père et sa ferme doit gagner sa vie comme servante. Fidèle et honnête, elle est cependant accusée de vol. Elle ne va pas se laisser faire. Un divertissement léger, presque digne d'un Lubitsch qui épingle la bonne société et reconnait la valeur des plus humbles. Ciblé pour un public allemand afin qu'il oublie le quotidien de la guerre, le film concentre suffisamment de qualités pour ne pas être tenu pour un simple objet de délassement, voire de propagande. Käutner montrera plus tard sa vraie nature et son talent. En attendant, il fait son travail et ne perd pas son âme dans une oeuvre de commande pleine de vivacité et honnête malgré son cahier des charges. Et c'est aussi agréable à regarder qu'une pièce de Marivaux.
Les grands magasins (I grandi magazzini, Mario Camerini, 1939)
Deux employés d'un grand magasin s'aiment d'amour tendre. Elle a quelques ennuis avec son patron mais ça devrait pouvoir s'arranger. Une comédie romantique à l'italienne signée d'un représentant multicartes du cinéma transalpin. On essaie de copier le modèle américain mais c'est assurément plus mièvre et assez pauvre sur le plan scénaristique. Vittorio de Sica est encore un peu timide et se laisse balloter dans cette inoffensive bluette qui se voit sans beaucoup d'émotion.
Le soldat Yakuza (Heitai yakuza, Yasuzo Masumura, 1965)
Un camp d'entrainement japonais en Mandchourie, en 1943. Discipline de fer et querelles incessantes entre les différents corps d'armée. Connaissant Masumura, on se doute bien qu'il ne s'agit pas d'une oeuvre à la gloire de l'armée, tout au contraire. Le cinéaste s'attache à deux soldats, l'un pacifiste, l'autre insubordonné notoire qui vont développer une drôle d'amitié. Pas une relation homosexuelle mais pas si loin. Masumura en rajoute un peu dans la violence, on s'y bat énormément entre soldats pour des peccadilles, et ne se prive pas de dénigrer toute forme d'autorité. Cruauté mêlée d'ironie cinglante, on retrouve sans peine l'esprit du réalisateur même si ce film reste mineur dans sa carrière.
Juliana do amor perdido (Sergio Ricardo, 1970)
Sur une île de pêcheurs, Juliana étouffe dans une communauté où elle est considérée comme une sainte, sous la férule de son père. Sera t-elle sauvée par son amour pour un conducteur de locomotive ? Auteur, musicien, acteur, Sergio Ricardo ne s'est essayé qu'une poignée de fois à la réalisation. Dans la continuité du cinéma novo, sa Juliana raconte une histoire d'amour impossible sans souci de linéarité, dans un style à la fois éthéré, picaresque et symbolique. La mise en scène est agaçante par sa préciosité et le scénario prévisible dans son caractère tragique. Surnagent quelques jolies scènes naturalistes.
Aelita (Yakov Protazanov, 1924)
Aelita est souvent décrit comme le premier film de SF soviétique. Pas faux, puisqu'une partie de l'intrigue se passe sur la planète Mars ; pas exact car la plupart de l'action se déroule à Moscou et son contexte, celui de la période quasi libérale qui a suivi la fin de la guerre civile, donne au film un ton très particulier même si, in fine, il joue la carte de la propagande. Le film de Protazanov est protéiforme : policier, comique, satirique, réaliste, social, romantique, mélodramatique et donc ... fantastique. On est loin de la mise en scène d'un Eisenstein mais Protazanov a du métier et du talent pour faire ce blockbuster qui connut un grand succès public, mais pas critique, y compris à l'étranger où il reste culte ne serait-ce que pour ses scènes martiennes, naïves certes, mais bien faites.
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