Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Cinemed m'était conté (4)

 

Le voyage se poursuit en Serbie, en Italie et en Espagne.

 

As far as i can walk (Strahinja Banovic) de Stefan Arsenijevic

Parsemé d'extraits d'un poème médiéval épique serbe, As far as i can walk se veut un conte moderne décrivant le chemin des migrants à travers l'Europe. En l'occurrence, il s'agit d'un couple ghanéen, dont l'intégration en Serbie se fait plutôt bien pour l'homme, peu conscient que sa compagne puisse rêver d'ailleurs et d'autre chose. Le film est aussi une histoire d'amour, contrariée par les difficultés d'une vie nouvelle qui divise plutôt qu'elle ne resserre les liens entre ses deux personnages principaux. L'on ne saurait reprocher au réalisateur Stefan Arsenijevic de livrer une vision plutôt européenne d'un sujet aussi mondialisé mais il y a malgré tout une certaine candeur dans la manière dont le film enchaîne les péripéties, certaines semblant assez difficiles à juger réalistes. D'où cette volonté d'en faire un conte mais le cinéaste déçoit malgré tout dans sa mise en scène, d'un trop grand classicisme. Malgré ces réserves, As far as i can walk reste un film digne et humaniste, pourquoi pas éveilleur de consciences, qui a le mérite de donner un rôle de choix à l'acteur français Ibrahim Koma, intense de bout en bout. Le film, lui, a séduit le jury du prestigieux festival de cinéma de Karlovy Vary en 2021 où il a été récompensé par un Globe de cristal, la distinction suprême.

 

Piccolo corpo de Laura Samani, sortie en février ou mars

Piccolo corpo, le premier long-métrage de Laura Samani, impressionne par sa grande maîtrise dans une progression stylistique qui va du drame réaliste à une expression mystique qui n'a jamais l'air fabriquée. Situé au début du XXe siècle, au nord-est de l'Italie, d'une île à des contreforts montagneux, il s'agit également d'un film d'aventures original dont la qualité initiale d'écriture, évidente, est transcendée par une mise en scène rigoureuse, mais jamais austère. Son héroïne, la foi chevillée au corps mais décidée à transgresser les "lois" de la religion, fait son propre chemin de croix pour sauver l’âme de son enfant mort-né, en compagnie d'un personnage mystérieux dont on devine que le chemin de vie n'a pas été linéaire. S'appuyant sur des paysages somptueux, sur la diversité des dialectes de régions proches de l'actuelle Slovénie et sur de splendides musiques populaires, Piccolo corpo transforme une expérience tragique et personnelle en une symphonie quasi miraculeuse et universelle où la question de la féminité et de sa place dans la société se pose, quelle que soit l'époque. Cette belle œuvre marque aussi les débuts à l'écran de Celeste Cescutti, au prénom prédestiné, formidable d'intensité et de volonté. Piccolo corpo est un petit film par ses moyens mais plutôt grand par les talents qui s'y expriment.

 

Sis dies corrents de Neus Ballus

Quoi de mieux que des plombiers, qui s'introduisent dans toutes sortes d'appartements, pour mener une divertissante enquête sociologique. Très futé, Sis dies corrents, le troisième film de la catalane Neus Ballús Neus, s'ingénie à dépeindre par petites touches la complexité de la vie et des relations sociales, sans oublier les préjugés qui nourrissent les situations, avec le regard, forcément curieux, d'un ouvrier d'origine marocaine qui débarque à Barcelone et dans un atelier de plomberie. Le film réussit assez bien comme comédie de mœurs avec un humour léger, à peine perceptible parfois, qui passe davantage par l'image que par les dialogues, mais moins en tant qu'étude sociologique; qui n'est pas un objectif atteignable avec une mise en scène aussi plate. Divisé, comme son titre l'indique, en six chapitres comme autant de jours de la semaine, Seis dies corrents ressemble finalement à un film à sketches qu'une voix off superfétatoire et quelques éléments inodores de vie privée tentent maladroitement de relever. Il serait faux de prétendre ne pas prendre un plaisir de l'instant lors de plusieurs scènes pittoresques mais qu'en reste t-il après la projection ? C'est un peu injuste mais c'est ainsi, au cinéma, rares sont les comédies qui parviennent à s'élever à la hauteur émotionnelle des drames

 



20/10/2021
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 51 autres membres