Aux Arcs, etc. (1)
C'est parti pour Les Arcs Film Festival, en ligne, avec une compétition et une belle sélection de films européens.
The Whaler Boy (Kitoboy), Philipp Yuryev, Russie
Pittoresque garanti même si l'intrigue de The Whaler Boy est universelle. Adolescent, chasseur de baleines, comme tous les habitants de son petit village, situé à un jet de pierres de l'Alaska, sur le détroit de Bering, entre deux continents, Leshka se situe à l'est du désir, lui qui fantasme sur une webcam girl américaine. Pittoresque, oui, et original, avec sa B.O à contre-courant et ses bouffées d'humour (le personnage du grand-père). Le film manque un peu de rythme dans sa première partie mais le scénario est malin, s'engageant dans une aventure plus ou moins imaginaire, puisqu'il faut bien aller au bout de ses rêves, comme le héros de The Whaler Boy, pour s'apercevoir que le bonheur n'est pas au-delà de la frontière mais à portée de main. Le premier long-métrage du russe Philipp Yuriev n'oublie pas de nous immerger dans l'immense toundra pour nous gratifier de splendides images désolées. Les scènes de chasse à la baleine sont impressionnantes et primitives et contrastent avec l'artificialité d'internet. La tendresse fruste du film, à l'image de cet adolescent en perte de repères, dit beaucoup de la mondialisation et de ses leurres mais sans qu'aucune morale facile ne vienne perturber le récit de The Whaler Boy, construit de manière fluide et pourtant singulière. Dans les grands espaces sibériens, personne ne vous entend ciller.
Note : 7/10
Slalom, Charlène Favier, France
Slalom aborde un sujet délicat, à une époque où les langues se délient enfin et révèlent des affaires de violences sexuelles à l'encontre de mineur(e)s dans le monde du sport (judo, patinage, tennis, etc). Charlène Favier, sa réalisatrice, a été elle-même une victime durant son adolescence et si elle n'a pas voulu raconter sa propre histoire, elle n'en reste pas moins bien placée pour évoquer les tourments d'une très jeune fille qui subit emprise psychologique et agressions. Slalom est-il pour autant un film "dossier" ? Oui, en grande partie, car le film a clairement un message à passer mais la cinéaste le fait avec toutes les nuances possibles montrant quelles formes revêtent la domination et la dépendance, avec en outre la pression liée à l'entraînement intensif pour le sport de compétition et la découverte de son corps, pour une adolescente. Très centré sur son héroïne, Charlène Favier réussit son portrait psychologique mais échoue en partie à donner vie à son environnement qui, hormis son entraîneur, se réduit à quelques traits de caractères peu approfondis (la mère, ses camarades d'entraînement). Les compétitions en tant que telles sont platement filmées et ne participent que très peu à la dynamique du scénario. C'est le hors piste qui intéresse le plus Charlène Favier et la toxicité des relations d'un entraîneur avec une skieuse en devenir., tourmentée par les mutations de son corps. La mise en scène tire certes avantage du cadre grandiose de la montagne mais elle privilégie les gros plans pour mieux resserrer l'étreinte. Il est vrai que les deux interprètes principaux sont exceptionnels : Noée Abita et Jérémie Renier forment un duo crédible sans aucune faute de carre.
Note : 6,5/10
Preparations to be together for an unknown period of time (Felkészülés meghatározatlan ideig tartó együttlétre), Lili Horvath, Hongrie.
Le deuxième long-métrage de la réalisatrice hongroise Lili Horvath porte un titre à rallonge qui correspond parfaitement à sa tonalité, entre fantaisie ludique et drame. On ne sait trop sur quel pied danser durant tout le film, quant à la santé mentale de son héroïne, littéralement obsédée par un coup de foudre à New York qui l'a fait quitter son travail en Amérique et rentrer à Budapest. Cet amour est-il imaginaire ou réel, seul le dénouement de Preparations ... le révèlera, ou pas. En attendant, cette vraie fausse comédie romantique est remarquablement écrite, avec un fond féministe et plusieurs scènes à la limite de l'absurde. C'est drôle, également, parfois émouvant et toujours nimbé de mystère. Actrice de théâtre, Natasa Stork, qui n'avait eu jusqu'alors que de petits rôles au cinéma, chez Mundruczo, notamment, est extraordinaire dans ce film élégant, charmeur mais aussi quelque peu inquiétant et fondamentalement original sur un sujet qui ne sera jamais éculé : l'amour.
Note : 7,5/10
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