Cavalcade de vieux films (Décembre/2)
Malpertuis (Harry Kümel, 1972)
Le scénario de Malpertuis, tiré de l'oeuvre culte de Jean Ray, est impossible à résumer. Le film se déroule dans une grande demeure hantée, où vivent des dieux de l'Olympe réincarnés en mortels (hum) mais aussi dans les rues d'une ville flamande indéterminée (images de Gand, Bruges et Ostende). Cette co-production internationale valut bien des déboires à Kümel, à commencer par sa présentation à Cannes dans un montage qui n'était pas le sien. Une version plus conforme est sortie ensuite redonnant au film sa véritable identité, plus surréaliste que fantastique, certaines scènes évoquant la peinture symboliste et très directement James Ensor. Moins réussi que Les lèvres rouges, Malpertuis surprend par son aspect kitsch et parfois grotesque. Il n'en reste pas moins une véritable curiosité avec une interprétation inégale : Matthieu Carrière, Michel Bouquet, Susan Hampshire (un triple rôle), Orson Welles et même Sylvie Vartan.
Misère et noblesse (Miseria e nobiltà, Mario Mattoli, 1954)
A Naples, au milieu du XIXe siècle, deux familles partagent le même toit et une vie de pauvreté. Une imposture va leur permettre pour un temps de manger à leur faim. Pendant deux décennies, Toto a été le roi de la comédie italienne, chacun de ses films connaissant un triomphe. Adapté d'une pièce écrite par un napolitain, Misère et noblesse joue totalement la carte du théâtre filmé, par le prolifique Mario Mattoli entièrement au service de sa star. La chose est amusante, satire gentille de la noblesse et des parvenus de la bourgeoisie. Avec un petit rôle pour Sophia Loren qui n'a pas grand chose à faire et le fait bien.
Tire-au-flanc (Jean Renoir, 1928)
Force est d'accepter que les plus grands maîtres du cinéma ont pu connaître quelques moments de faiblesse et tourner des films largement en dessous de leur réputation. Dans sa période du muet, plutôt brillante, Renoir a ainsi signé ce Tire-au-flanc, chronique potache du service militaire. Tiré d'une pièce de théâtre, que l'on devine médiocre, cette oeuvrette serait sans intérêt si la mise en scène de Renoir n'avait pas quelques rares fulgurances et le début de la thématique sociale qui irrigue toute sa filmographie et culmine dans La règle du jeu. Accessoirement, c'est l'occasion de voir Michel Simon au début de sa carrière (il a 33 ans), qui perce déjà l'écran.
La fleur du vent (Kazabana, Keisuke Kinoshita, 1959)
Deux amants tentent de suicider mais la jeune femme, enceinte, survit. 18 ans plus tard, son fils assiste au mariage de la cousine dont il est amoureux. Les deux premières scènes du film sont énigmatiques. Elles réapparaitront à l'identique dans le dénouement rendues compréhensibles cette fois par le scénario. On retrouve le sens plastique du cinéaste japonais dans des paysages en scope qui semblent rendre la condition humaine dérisoire. Construit selon une progression temporelle brutale, le film nécessite un moment d'adaptation. Ce n'est pas l'oeuvre la plus marquante de Kinoshita mais sans aucun doute l'une de ses plus singulières.
L'embuscade (Zaseda, Zivojin Pavlovic, 1969)
La guerre est terminée en Yougoslavie et l'édification du socialisme est en marche. Cette époque trouble est vue à travers les yeux d'un garçon naïf, vite embrigadé car croyant aux vertus de la révolution. Il ira de désillusions en désillusions dans un climat de haine, de réquisitions arbitraires, d'exécutions sommaires et d'actes d'héroïsme falsifiés pour la cause. Un film très noir et violent, chaotique comme l'époque qu'il dépeint, où la figure à révérer était davantage Staline que Tito. L'embuscade, vision peu orthodoxe de l'accession des communistes au pouvoir, fut interdit de diffusion sur les écrans yougoslaves. Pavlovic est aujourd'hui considéré comme le principal réalisateur de ce que l'on appelle désormais la "Black Wave".
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