Cinéphile m'était conté ...

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Carrousel de vieux films (Mai/1)

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Par un beau matin d'été, Jacques Deray, 1965

Par un beau matin d'été marque la première collaboration entre Belmondo et Deray et Geraldine Chaplin y trouve son premier véritable rôle. Un scénario assez banal de rapt sous le soleil d'Andalousie (le film est une coproduction italo-franco-espagnole, d'où le casting international), qui se termine en tragédie. Quelques ingrédients intéressants cependant dans ce thriller assez paresseux : la relation quasi incestueuse entre le frère et la soeur campés par Daumier et Belmondo, notamment. Bonne interprétation de ces deux-là et des seconds rôles assez solides : Gabriele Ferzetti, Georges Géret, Akim Tamiroff, Analia Gadé, Adolfo Celi. Et en prime, une apparition fugitive de Jacques Higelin. En revanche, les dialogues de Michel Audiard n'ont rien de mémorable.

 

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La ferme des sept péchés, Jean Devaivre, 1949

Qui a tué le pamphlétaire Pierre-Louis Courier dans une forêt de la région tourangelle ? Ce n'est pas tellement le nom du coupable qui importe et d'ailleurs le film prend quelques libertés avec la vérité dans sa révélation finale. Ce qui intéresse Devaivre est davantage la chronique rurale du temps du roi Charles X dans un pays divisé entre bonapartistes, royalistes et républicains. La ferme des sept péchés est un film singulier, haché par sa multitude de flashbacks et dominé par la figure de Courier haï par les légalistes mais aussi par ses domestiques, traités comme des moins que rien. Un véritable odieux du village. Avec sa musique tout sauf discrète et ses embardées pastorales, le film témoigne du talent très singulier de Jean Devaivre malgré un excès de naïveté dans sa grammaire cinématographique. Jacques Dufilho, en idiot, agace par ses grimaces mais Jacques Dumesnil ne démérite pas dans le rôle de Courier. Et pour l'anecdote, on aperçoit quelques secondes Jean Vilar.

 

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Boulevard, Julien Duvivier, 1960

Les films de la décennie 60 de Julien Duvivier ne sont évidemment pas les meilleurs du réalisateur de Panique. Boulevard sent un peu trop l'opportunisme : la jeunesse est à la mode et la Nouvelle vague a fait prendre un sacré coup de vieux au cinéma de papa. Mais ce n'est pas en engageant Jean-Pierre Léaud et en adaptant un roman de Sabatier avec des dialogues de Barjavel et en faisant la part belle au parler de titi parisien que le film sonne vrai. Il a un côté artificiel malgré le décor de Pigalle et les scènes attendrissantes sur les toits de Paris. Ceci dit, il n'y a pas de déplaisir majeur à suivre les aventures de cet adolescent en roue libre et à ses tocades sentimentales. Léaud se défend bien de même que Duby, Mondy, Magali Noël et l'inconnue Monique Brienne (qui poursuivit un temps dans la chanson).

 

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Picpus, Richard Pottier, 1943

Tout le monde s'accorde à dire que le pire Maigret à l'écran fut Albert Préjean qui l'incarna pour la première fois dans Picpus. Richard Pottier, son réalisateur, n'est pas un cinéaste majeur mais il a signé quelques films honnêtes comme Si j'étais le patron ou Un oiseau rare. Pour ce qui est de Picpus, on retient surtout une atmosphère bien qu'assez éloignée des romans de Simenon. L'intrigue est longtemps incompréhensible, hormis pour l'intuition du commissaire. Quelques traits d'humour (lourd), des personnages inquiétants (Tissier, Roquevert, Delmont) et une bagarre finale, où Maigret fait le coup de poing, franchement ridicule : le bilan est plus que moyen. Ce film de la Continental était chargé de distraire les spectateurs français de 1943. Sans doute remplit-il son office. Aujourd'hui, on ne peut que le comparer aux autres adaptations de Simenon et ce n'est pas à son avantage.

 

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La chinoise, Jean-Luc Godard, 1967

La chinoise est un film-clé dans l'oeuvre de Godard et les circonstances en sont bien connues aujourd'hui grâce au livre d'Anne Wiazemsky, sa compagne de l'époque, Une année studieuse. Le film se cantonne pratiquement à des discussions entre 5 jeunes gens dans un appartement bourgeois. Critique de l'impérialisme américain (avec nombreuses évocations du Vietnam), de l'immobilisme français (haro sur le pouvoir gaulliste mais aussi sur les partis de gauche, PCF compris), de la trahison soviétique au regard des valeurs marxo-léninistes. Reste la Chine de Mao, celle de la Révolution culturelle, dont on ne savait pas encore ou ne voulait pas reconnaître les exactions. Mais le film fait aussi sa propre auto-critique dans une conversation entre Anne Wiazemsky et un ancien activiste durant la guerre d'Algérie qui la place devant ses propres contradictions et ses dangereuses dérives vers la violence. La chinoise manque hélas d'humour et Godard s'amuse un peu trop avec ses collages devenus sa marque de fabrique. Le film reste cependant très puissant et prémonitoire des événements de 68. Et témoin de l'évolution d'un cinéaste-philosophe-sociologue aussi souvent horripilant que parfois touché par une certaine grâce romantique et poétique. Et pratiquant la dialectique comme un sport de combat.



09/05/2018
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