Carrousel de vieux films (Février/1)
Minne l'ingénue libertine, Jacqueline Audry, 1950
Minne, jeune fille de 1900, après avoir épousé son cousin et s'en être lassée, se lance dans des aventures sans lendemains. Jacqueline Audry, la meilleure (et pratiquement la seule) réalisatrice française avant Agnès Varda était la cinéaste idéale pour porter à l'écran la cruauté et la légèreté mêlées de Colette. C'est après tout un film sur la jouissance féminine, ou plutôt son absence. Beaucoup d'audace pour l'époque dans les sous-entendus ou même parfois plus abruptement dans une conversation "libérée" entre femmes. Et avec cela d'excellents dialogues avec ce qu'on n'appelait encore des punchlines. Mieux vaut un mauvais mariage qu'une bonne typhoïde, comme le dit l'un des personnages et, bien entendu, la morale triomphera au final. Danièle Delorme minaude un peu, mais elle a du charme. Quant à Jean Tissier, éternel second rôle du cinéma français, il est comme toujours savoureux.
Police judiciaire, Maurice de Canonge, 1958
La police judiciaire de Paris est chargée d'enquêter sur quatre affaires criminelles dont une double scène de meurtre qui a eu lieu dans un hôtel. Excellent film du méconnu Maurice de Canonge, qui s'est sans doute inspiré d'Histoire de détective de William Wyler pour son aspect documentaire du quotidien du Quai des orfèvres. On y voit le différents services au travail et notamment les experts scientifiques y compris l'informatique encore balbutiant. Pas de violences policières mais une multitudes de détails destinés à donner une image positive de la police. Une affaire domine les autres, celle du double meurtre, et si l'assassin est connu très vite, il s'agit de chercher les preuves pour l'accabler. Les limiers du Quai sont montrés comme des hommes comme les autres, avec leurs failles, à l'instar de cet inspecteur qui drague sa secrétaire. Ce qui nous vaut cette réplique qui résonne bizarrement aujourd'hui : "Quand une femme dit peut-être, cela signifie oui." Bonne interprétation d'ensemble avec une Anne Vernon, qui se la joue Arletty, Robert Manuel et Hervé Vilbert. Sans oublier une apparition notable de l'onctueux Jean Tissier. Du très solide que ce film là, sans beaucoup d'action ni de twist racoleur et ce n'est pas plus mal.
Maxime, Henri Verneuil, 1958
Maxime sert d'entremetteur à un ami pour séduire la belle Jacqueline. Mais il tombe amoureux d'elle et réciproquement. Le film fait partie des oeuvres oubliées et méconnues d'Henri Verneuil, tournée avant Le grand chef et La vache et le prisonnier. Un long-métrage amer sur les derniers feux de la Belle époque et l'automne d'un homme désargenté qui croit vivre un dernier amour. Plus dure sera la chute. Alors que le "Gai Paris" fait la fête chez Maxim's ou s'offre des robes de Chez Poiret, un mode de vie court vers sa fin, puisque 1914 est déjà bien avancé. Commencé sur le ton de marivaudage, le film se déplace progressivement sur les chemins de la mélancolie et de la nostalgie d'une jeunesse insouciante. La reconstitution de cette période est élégante, jamais pesante, et si la mise en scène de Verneuil est simplement correct, elle est rehaussée par les dialogues scintillants de Jeanson. Par exemple, ceci : "Je n'ai eu qu'un homme dans ma vie et encore, je compte large." L'interprétation de Michèle Morgan, subtile, et surtout de Charles Boyer, émouvante, sont au mettre au crédit du film. Moins les seconds rôles, avec une Arletty qui n'est pas loin de se caricaturer et Félix Marten, au jeu anachronique dont la gouaille et le vocabulaire tendent à le rapprocher de Belmondo. Nonobstant, Maxime est une très belle surprise.
Le voyageur de la Toussaint, Louis Daquin, 1942
Par un triste soir de novembre, Gilles Mauvoisin, qui vient de perdre ses parents, débarque à La Rochelle. Il flaire rapidement l'atmosphère étrange de cette ville dont les notables forment ce que l'on appelle le Syndicat, qui étend son ombre et sa puissance sur la ville. Une adaptation très réussie de Simenon, sans Maigret mais avec une ambiance très noire, chabrolienne avant la lettre avec sa description d'un vrai panier de crabes constitué par les bourgeois rochelais. Sans se presser, l'intrigue avance à pas feutrés aux basques de l'ingénu Jean Desailly et de la diaphane Assia Noris, sorte de Danielle Darrieux italienne, d'origine russe et qui n'a joué que dans un autre film français, Le capitaine Fracasse. Mais ce sont des crapules magnifiques qui ont la vedette incarnés par de grands noms du cinéma de l'époque : Jules Berry et Gabrielle Dorziat en tête. L'un des grands films de l'Occupation seulement dépassé en noirceur par Le corbeau de Clouzot.
Un soir au music-hall, Henri Decoin, 1956
Un GI en permission à Paris tombe amoureux d'une danseuse aux Folies-Bergère et l'épouse.Le scénario du film est famélique mais c'est le cas d'une grande majorité de comédies musicales. L'ennui, ici, c'est que Eddie Cosntantine est un chanteur médiocre, qui a heureusement quelques bagarres à assurer, ce qui est davantage de son domaine. Zizi, Jeanmaire, de son côté, est une actrice limitée, son talent de danseuse restant indéniables. Mais les ballets, justement, malgré une débauche de costumes manquent de fantaisie avec un côté mécanique prononcé. Le film est aussi connu sous le titre de Folies Bergère et l'on droit de se demander si la seule ambition de Un soir au music-hall n'est pas de promouvoir ce haut-lieu du divertissement parisien. Toujours est-il que Henri Decoin ne semble pas du tout fait pour diriger ce genre cinématographique.
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