Cinéphile m'était conté ...

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Carrousel de vieux films (Avril/2)

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La nuit est mon royaume, Georges Lacombe, 1951

Un beau film d'un cinéaste, Georges Lacombe, qui mérite mieux que l'oubli dans lequel il est tombé. Il est surtout bien écrit avec un équilibre assez idéal pour ne tomber dans le pathos. S'il est vrai que les personnages sont assez unidimensionnels et que Charles Spaak a fait parfois mieux dans ses dialogues, La nuit est mon royaume vaut par ses silences et par les belles séquences d'atelier où les aveugles travaillent dans une atmosphère sereine. Ce n'est pas un mélodrame à proprement parler avec un dénouement au contraire plein d'espoir où l'expression : l'amour est aveugle prend un tout autre sens. Il faut saluer la performance de Gabin qu'on ne voit pas aussi souvent vulnérable et qui livre une vraie composition à côté de Simone Valère incroyablement touchante. On peut aisément railler ce film avec ses bons sentiments mais il a en lui une vraie lumière intérieure.

 

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Les eaux troubles, Henri Calef, 1949

Un an après la mort inexpliquée de son frère, Roberta est de retour au pays. Elle veut connaître la vérité. Henri Calef, bien oublié aujourd'hui était un cinéaste qui ne lésinait pas sur l'atmosphère. Celle de Les eaux troubles est totalement noire, à l'image de son long prologue, sans aucune parole prononcée alors que Ginette Leclerc revient chez elle. La vraie vedette du film c'est le paysage, proche du Mont Saint-Michel, inquiétant avec sa brume et la marée qui assassine ceux qui veulent la défier. L'interprétation, en revanche, laisse à désirer. Massive et outrée, même Mouloudji, en manchot, en rajoute. Ce n'est pas si simple de réaliser une tragédie, la lourdeur menace et le film n'en est pas exempt, loin de là, avec également des maladresses de construction comme ce flashback final véritablement asséné pour faire place à une sorte de happy end malencontreux et pas crédible.

 

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Poisson d'avril, Gilles Grangier, 1954

Sur une trame très boulevardière et immorale juste ce qu'il faut, Poisson d'avril déroule son fil avec application dans un enchaînement de situations qui suit une logique aussi amusante que destinée à ravir le public du samedi soir des années 50. Aujourd'hui, le spectateur regarde le film avec une certaine nostalgie d'une époque somme toute heureuse, celle de l'après-guerre. Rien de mémorable bien sûr dans le scénario, ni dans la mise en scène sage de Grangier, ni même dans les dialogues d'Audiard. Mais il y a l'immense talent de Bourvil, on ne peut plus crédible dans le rôle d'un garagiste un peu porté sur la boisson et pêcheur par accident, ce qui va entraîner une sarabande de mensonges et de rebondissements. Mention spéciale à Anny Cordy, étonnante en épouse dévouée rêvant d'une machine à laver, et belle apparition de Louis de Funès pour sa première confrontation avec Bourvil. Prendre du plaisir à Poisson d'avril est un péché véniel tant cette chronique de moeurs désuète célèbre une France aujourd'hui bien disparue.

 

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Le mouton à cinq pattes, Henri Verneuil, 1954

La recherche de quintuplés, nés à Trezignan, afin de les réunir avec leur vieux père acariâtre est le prétexte de ce film à épisodes qui ne pâtit pas trop de son manque d'unité. Les 6 rôles sont joués par le même Fernandel, un véritable one man show qui faut mesurer le talent du susdit avec parfois l'interprétation de personnages inattendus, l'un deux permettant de se gausser de Don Camillo. L'on retient principale deux parties très réussies, celle dite de "la mouche" et celle avec un croquemort joué avec sobriété par un de Funès pas encore grimaçant à l'envie. Françoise Arnoul et Noël Roquevert font également des apparitions dans des scènes moins percutantes. Malgré son sujet, le film n'a pas spécialement vieilli contrairement à certains films de la même époque, certains pourtant jugés largement supérieurs à ce film qui appartient à la veine méridionale de Verneuil.

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Je t'attendrai, Léonide Moguy, 1939

D'origine russe, Léonide Moguy a tourné en France, aux Etats-Unis et en Italie. Méconnu avant sa restauration, Je t'attendrai, qui s'intitulait Le déserteur avant l'avis de la censure, est sans nul doute son principal fait d'armes. Un film quasi en temps réel, un peu plus d'une heure dans la vie d'un soldat de la guerre de 14 qui quitte provisoirement son unité pour rejoindre sa fiancée et ses parents. Une histoire simple qui devient mélodramatique, d'un grand romantisme cruel et qui devient un suspense terrible dans ses dernières minutes. La mise en scène est discrète mais efficace avec quelques prises de vue superbes. Les dialogues sont excellents mis dans la bouche d'interprètes au jeu très moderne, en particulier Jean-Pierre Aumont et surtout Corinne Luchaire, au destin terrible puisque décédée à l'âge de 28 ans de tuberculose après avoir eu un enfant d'un occupant allemand et vu son père fusillé à la Libération.

 



16/04/2018
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