Carrousel de vieux films (Août/4)
Le meurtrier, Claude Autant-Lara, 1963
Deux meurtres de femme sont commis à peu de temps de distance et dans les mêmes circonstances. Leurs maris respectifs sont soupçonnés par la Police. En 1963, Autant-Lara est au creux de la (nouvelle) vague et après la sortie différée de Tu ne tueras point, il tourne de façon rapprochée Le meurtrier et Le magot de Josefa, deux échecs commerciaux. Seule incursion du cinéaste dans le polar, Le meurtrier est adapté de Patricia Highsmith avec certaines réminiscences de L'inconnu du Nord-Express. Mais Autant-Lara n'est visiblement pas très à l'aise avec le genre et maltraite les aspects psychologiques de son intrigue, pourtant essentiels, hormis dans une dernière partie, plus nerveuse, où les deux suspects se jettent leurs présumés crimes à la figure alors que le policier chargé des affaires fait montre d'une grande perversité pour les faire avouer. Au-delà du fait qu'aucun des protagonistes n'est sympathique, l'interprétation n'est pas vraiment de haute tenue, de Ronet à Fröbe en passant par Hossein, tandis que Marina Vlady ne fait que passer. Toutefois, pour ses défauts mêmes, et pour sa rareté, Le meurtrier reste un film intéressant car atypique dans la carrière du réalisateur.
La main du diable, Maurice Tourneur, 1942
Un homme arrive dans une auberge en pleine montagne avec une main en moins et un coffret sous le bras. Il raconte son histoire à un auditoire médusé. Cette version du mythe de Faust, tirée d'une nouvelle de Nerval, est l'un des meilleurs films fantastiques français de l'histoire mais il est vrai qu'il y a eu peu de tentatives. Il est encore meilleur en le revoyant et en appréciant le jeu d'un excellent Pierre Fresnay et l'apport des seconds rôles de Josseline Gaël à Roquevert, en passant par Larquey et l'admirable Gabrielle Fontan (voir Le val d'enfer, toujours de Maurice Tourneur) pour une courte scène mémorable. Climat expressionniste de rigueur et rythme endiablé (c'est le cas de le dire) avec pour point culminant une scène de masques qui fera peut-être sourire les amateurs des effets spéciaux modernes mais qui dut dans les salles de fort impressionner dans les salles de cinéma durant l'Occupation. Ce film est à coup sûr l'un des meilleurs de la firme Continental, juste derrière Le corbeau, La vie de plaisir et Pierre et Jean.
Constance aux enfers, François Villiers, 1964
De son balcon, Constance assiste au meurtre de sa voisine. Le meurtrier se réfugie chez elle. Le scénario, tiré d'un roman de série noire, n'est pas d'une extrême originalité, surtout après un twist à mi-parcours et a du mal à ne faire croire à la psychologie du personnage principal, une veuve qui se révèle cougar capable de sortir ses griffes si jamais si on se joue d'elle. Quelques pincées de Fenêtre sur cour et des Diaboliques ne suffisent pas à rendre l'affaire intéressante. Si l'on met de côté la grande Michèle Morgan qui tient son rang, malgré un rôle qui frise le ridicule, le reste de l'interprétation ne vaut pas tripette du fade : Simon Andreu (un acteur espagnol qui a fait une longue carrière ensuite), à l'insupportable : Maria Pacôme et Dany Saval. Le carton final du film indique : "Pour le plaisir de vos amis, ne révélez pas la fin du film." Dont acte, mais il n'y a pas de quoi fouetter un chat !
Patrie, Louis Daquin, 1946
Au XVIe siècle, le peuple flamand lutte contre les occupants espagnols et prépare l'insurrection avec l'aide de Guillaume d'Orange. Dix ans plus tôt, Jacques Feyder a tourné La kermesse héroïque, magnifique comédie, se situant à la même époque. A la sortie de la guerre, l'heure n'est plus à la fantaisie et le film de Daquin est clairement une allégorie dédiée à la Résistance lors de l'Occupation allemande. Précisons au passage que le même réalisateur avait dirigé Premier de cordée, aux valeurs vichystes, en 1943. Autre temps, autres moeurs. Patrie est tiré d'une pièce de Victorien Sardou, adapté par Charles Spaak et dialogué par Pierre Bost, c'est dire si c'est du solide. L'intrigue politique est parallèle à une histoire d'amour qui débouchera d'ailleurs sur une trahison. Tout s'imbrique parfaitement, avec grand sérieux et dignité dans cet excellent film qui bénéficie du jeu compact de Pierre Blanchar, Jean Desailly, Louis Seigner et Pierre Dux, entre autres. Un mot sur Maria Mauban (la traîtresse qui sacrifie la liberté pour l'amour) dont c'est la première apparition au cinéma (impressionnante) et qui eut une riche carrière, notamment au théâtre et à la télévision, et un peu moins sur les écrans avec un dernier film en 1978 : Le gendarme et les Extra-Terrestres (sic).
L'inconnue n°13, Jean-Paul Paulin, 1949
Un journaliste recueille un jeune enfant qui s'est échappé de l'assistance publique. Il va l'aider à chercher sa mère. Un petit film très désuet mais plein de qualités qui oscille entre le policier et le mélodrame. On y rit aussi gentiment avec son trio de grandes personnes, le journaliste, un photographe et une doctoresse, auxquels s'ajoute une cuisinière qui bougonne mais qui a un coeur d'or. Tous se sont ligués pour mener l'enquête afin de retrouver celle qui a abandonné son garçon bien malgré elle. C'est assez rocambolesque et devient de moins en moins réaliste au fil de la pellicule mais on apprécie le bon esprit et surtout la vision du Paris de l'immédiat après-guerre. C'est l'antépénultième film de Jean-Paul Paulin (L'homme qui vendit son âme, Le château de la dernière chance), cinéaste méconnu. Et l'avant-dernier de la talentueuse Marcelle Derrien, qui se retira après 7 films seulement, dont le plus célèbre est Le silence est d'or de René Clair.
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