Butin de vieux films (Août/2)
Les oies sauvages (Gan), Shirô Toyada, 1953
Otama est la maîtresse d'un usurier qui l'entretient ainsi que son père. Mais elle tombe amoureuse d'un étudiant. Combien de merveilles le cinéma japonais des années 50 recèle t-il ? Shirô Toyada est méconnu alors qu'il a signé un nombre impressionnant de films jouissant d'une excellente réputation. Les thèmes qu'il développe dans Les oies sauvages sont familiers, autour des clivages sociaux et de la condition féminine. Les pistes narratives sont simples et le trait élégant dans une mise en scène à la fois pudique et sensuelle au service d'un mélodrame stylé. Avec une Hideko Takamine magnifique, comme d'habitude.
Le chat de Shozo et ses deux maîtresses (Neko to Shozo to futari no onna), Shirô Toyada, 1956
Dominé par sa mère, Shozo n'apprécie pas ses deux épouses successives. Lui, celle qu'il préfère sa chatte Lily. Mais oui, les cinéastes japonais de la grande époque savaient aussi concevoir des comédies burlesques de bonne facture. Ici, c'est un chat qui tient la vedette au milieu d'aventures d'humains qui n'arrêtent pas de faire n'importe quoi, uniquement mus par la cupidité, l'instinct de possession et la jalousie. Le faux triangle amoureux qui se crée, encadré par une mère manipulatrice, débouche sur tout un tas de péripéties bien écrites, où l'interprétation est parfois en surrégime. Mais il reste Lily, dont le tempérament caressant rend encore plus saugrenus les comportements de cet homme et de ces femmes.
Zero Focus (Zero no shôten), Yoshitaro Nomura, 1961
Peu de temps après son mariage, un homme disparait. Son épouse enquête et découvre qu'il avait déjà une femme. Pendant une heure, ce thriller Hitchcockien est époustouflant avec un montage chirurgical et une action qui bouge sans arrêt. Sans compter les paysages du nord du Japon, avec ses falaises, qui rendent le climat anxiogène. La dernière partie du film, qui relance l'affaire et la complexifie, avec plusieurs versions successives de la vérité, est moins réussie car trop bavarde et dénuée de toute vraisemblance après un tel afflux d'informations contradictoires. Mais question mise en scène, rien à redire, c'est du très haut de gamme. Et l'interprétation est également d'un niveau excellent. En somme, les crimes étaient presque parfaits et le film aussi, si l'on excepte son excès de zèle final.
Akuto, Kaneto Shindô, 1965
Au XIVe siècle, Moronao, gouverneur fielleux, a jeté son dévolu sur une femme mariée qui refuse ses avances. Dans le contexte du Japon médiéval, Kaneto Shindô adapte un récit de Tanizaki, dans une manière à la fois cruelle et humoristique. Loin d'être un film de samouraïs, Akuto (traduction approximative : le scélérat) multiplie les dialogues alors que son singulier héros, ridicule au demeurant, mais puissant, complote pour assouvir son désir. Rien à voir avec L'île nue, Onibaba ou Le chat noir, les films les plus débridés de Shindô ; ici, la forme est plutôt sobre et le scénario a du mal à ne pas être répétitif. Formidable interprétation par ailleurs, notamment de l'épouse de Shindô, Nobuko Otowa.
L'ombre intérieure (Kage no kuruma), Yoshitaro Nomura, 1970
Un homme marié rencontre une ancienne amie d'enfance qui vit seule avec son enfant. Coup de foudre. Kage no kuruma n'est pas que l'histoire d'un amour adultérin. Peu à peu, le climat devient angoissant à mesure que la paranoïa s'installe sans qu'il soit possible de savoir si celle-ci est uniquement celle de l'époux infidèle qui croit que le fils de sa maîtresse, 6 ans, veut le tuer. Cet aspect du film est un peu lourd, d'autant qu'il est relié à un traumatisme d'enfance du principal protagoniste. Une veine polanskienne ou digne d'Oshima qui n'est guère convaincante alors que le reste du film, le quotidien tokyoïte en particulier et la vie de bureau et domestique sont plutôt bien vus.
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