Cinéphile m'était conté ...

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Auch à moelle (6)

 

La Bête de Bertrand Bonello. Sortie le 28 février 2024

Il est curieux de voir, à seulement quelques mois d'intervalle, deux adaptations de La bête dans la jungle, la nouvelle de Henry James. Celle de Patric Chiha était déjà très libre, et conceptuelle, mais que dire de celle de Bertrand Bonello, conjuguée au futur antérieur, qui nous trimballe entre trois époques différentes. A noter quand même une paire d'étranges similitudes entre les deux versions : les scènes en boîtes de nuit et le minois de Léa Seydoux (globalement peu convaincante), à plusieurs reprises, qui ressemble d'assez près à celui d'Anaïs Demoustier. La question que l'on se pose devant La Bête est évidente : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Pour déconcerter le spectateur ou plutôt aiguiser sa perspicacité ? Si l'on veut, oui, mais le fond n'est franchement pas suffisant pour retenir l'attention, le thème de l'intelligence artificielle servant avant tout de prétexte pour une narration qui semble largement manquer d'enjeux. En enlevant l'épisode concernant 2014, le film aurait sans doute acquis un peu plus de tonicité, eu égard à une longueur excessive de près de 150 minutes. Il faut bien en convenir, sans la prestation impressionnante de George McKay, qui a remplacé le regretté Gaspard Ulliel, La Bête serait bien difficile à regarder. Bertrand Bonello est un cinéaste atypique qui a le mérite de tenter continuellement des paris formels mais il ne peut pas réussir à tous les coups.

 

Et la fête continue de Robert Guédiguian. Sortie le 6 décembre

Plurielle la vie ! Et Robert Guédiguian, plus que jamais chantre de Marseille, poursuit dans sa veine humaniste et chorale dans Et la fête continue. Bien des choses ne vont pas dans la cité phocéenne et au-delà : deux immeubles s'effondrent rue d'Aubagne, les militants s'écharpent avant les élections municipales, écoles et hôpitaux souffrent, tandis que l'Arménie est agressée. Mais en même temps, chez Guédiguian, il y a le sens de la famille, la solidarité, l'air de la mer et des rougets au menu des restaurants. Placé sous le signe de la tendresse et de la bienveillance, face à une société de plus en plus marquée par la régression et l'égoïsme, le cinéaste pourrait sembler excessivement empathique envers ses personnages mais c'est cette chaleur qui en fait le prix, dans un récit qui surfe adroitement entre eux, tout en réservant la meilleure place à un magnifique portrait de femme, engagée, parfois fatiguée, et toute surprise de succomber à une nouvelle (dernière ?) histoire d'amour. C'est évidemment l'incomparable Ariane Ascaride qui interprète le rôle, avec tout le talent et la subtilité dont elle est coutumière. Nettement moins sombre que son Gloria Mundi, par exemple, Et la fête continue renoue avec une veine plus optimiste, et même idéaliste, du cinéma de Guédiguian. On ne va pas s'en plaindre, de ces petits bonheurs.

 



09/10/2023
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