Cinéphile m'était conté ...

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Alès dans ses baskets (9)

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Bien que le festival ne s'achève que demain, pour moi ce furent les dernières séances. Avec notamment Foxtrot (meilleur film de la programmation) et Une femme heureuse au programme. Je reviendrai l'an prochain à Alès, j'espère.

 

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Une femme heureuse (The Escape) de Dominic Savage. Sorti le 25 avril.

Dans le CV de Dominic Savage figure un seul rôle d'acteur, enfant, dans le Barry Lyndon de Kubrick. 12 ans après son premier film en tant que réalisateur (Love + Hate), il signe Une femme heureuse (The Escape), interprété et coproduit par Gemma Arterton. Autant dire d'emblée qu'on ne voit qu'elle à l'écran, ou presque, dans ce portrait de femme au foyer guettée par la dépression. La comédienne est formidable, le plus souvent sans maquillage, rendant palpable l'étouffement progressif de cette mère de famille qui n'en peut plus de sa vie routinière toute entière dévolue aux autres. Le film joue la carte du naturalisme, hormis dans sa deuxième partie, plus romanesque et pas très réussie, dans un Paris idéalisé. Cependant, en privilégiant un point de vue unique, celui de son héroïne, et en ne laissant guère au mari la chance d'exister, si ce n'est dans des scènes domestiques souvent suffocantes, le film se condamne à une vision étroite et monotone renforcée par une mise en scène qui privilégie les gros plans. On a beau adorer Gemma, la tristesse quasi constante d'Une femme heureuse et son atmosphère raréfiée ont pour conséquence d'assombrir fortement le moral du spectateur.

 

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Retour à Bollène de Saïd Hamich. Sortie le 30 mai.

Pour son premier film en tant que réalisateur, Saïd Hamich, principalement producteur jusqu'alors, a voulu montrer comment le social peut influer sur l'intime à travers un personnage qui a quitté sa ville dans laquelle il ne se voyait aucun avenir. Retour à Bollène est aussi le portrait d'une cité du sud-est de la France sinistrée au fort taux de chômage, gouvernée par l'extrême droite, et avec de nombreux maghrébins vivant dans de grands ensembles délabrés. On s'attend à un film politique mais ce n'est pas tout à fait le cas, du moins pas exclusivement et pas de façon purement documentaire, le film s'attachant plutôt aux pas de son héros qui a pratiquement coupé tout lien avec sa famille et avec son milieu d'origine. La scène de ses retrouvailles avec son père, avec lequel il n'a plus de contacts, devrait constituer le moment le plus intense de Retour à Bollène mais elle tombe hélas presque à plat, décevante. Avec sa durée de 68 minutes, le film n'a pas le temps de nous accrocher suffisamment à une histoire qui reste comme en suspens, plus intéressante dans ce qu'elle promet que dans ce qu'elle montre, laissant finalement sur une grande frustration.

 

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Foxtrot de Samuel Maoz. Sortie le 25 avril.

Dans cette vieille danse surannée qu'est le Foxtrot, les pas ramènent immanquablement au point de départ. Une métaphore qu'utilise avec sensibilité dans sa narration le film de Samuez Maoz, ce cinéaste israélien révélé par le claustrophobe Lebanon, un brin formaliste mais très doué. Foxtrot se divise en trois parties distinctes, mais reliées entre elles, chacune avec un style différent, sans oublier une petite séquence animée et une conclusion terrassante. Fondamentalement, le film joue sans cesse avec l'absurde des situations (un soldat dont on annonce la mort par erreur, un checkpoint surtout fréquenté par les dromadaires, etc) évidentes allusions au fonctionnement de la société israélienne. Les thèmes qui fâchent ne sont pas abordés de façon militante et frontale comme chez d'autres cinéastes du pays mais avec une ironie grinçante y compris un épisode terrible en lien avec les "colonisés" palestiniens qui a d'ailleurs créé la polémique en Israël. Lion d'argent à Venise, Foxtrot parle de sujets très forts comme le deuil ou le lien entre les différentes générations, d'Auschwitz à la guerre au Liban, avec une sorte de rage rentrée et caustique sublimée par une mise en scène imaginative, parfois étouffante ou à l'inverse aérienne, instillant de l'émotion, de l'humour, de la tendresse et de la colère. 8 ans se sont écoulés entre les dates de sortie de Lebanon et de Foxtrot. Espérons attendre moins longtemps pour le prochain film d'un des meilleurs cinéastes actuels.



01/04/2018
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