Cinéphile m'était conté ...

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Vu à Alès (1)

Le tableau volé de Pascal Bonitzer

Un tableau d'Egon Schiele, volé par les nazis et disparu depuis soixante ans, refait son apparition dans un appartement modeste à Mulhouse. A partir de cette incroyable histoire, Pascal Bonitzer a construit une fiction où l'on subodore autant l'odeur des salles des ventes, un univers très particulier, formellement opposé à la France profonde, celle où le célèbre tableau a fini par atterrir. L'intrigue centrale, autour de l’œuvre peinte, est plutôt excitante mais les différentes ramifications, disparates, déplacent l'intérêt plus souvent qu'à leur tour. A retenir toutefois, le mordant des dialogues, souvent cruels, notamment autour des marchés de l'art où tellement d'argent est brassé que tous les coups y sont permis. L'interprétation est également largement à la hauteur, sans qu'un comédien ne cherche à dépasser ses petits camarades : d'Alex Lutz à Léa Drucker, impeccables dans la sophistication, de Louise Chevillotte à Nora Harnzawi, épatants de naturel, en passant par un excellent Alain Chamfort et les jeunes Arcadi Radeff et Matthieu Lucci. Malgré quelques temps morts et une action parfois volatile, le scénario retombe tout de même sur ses pattes, en ayant offert passage quelques jolis passages de comédie. Dans les règles de l'art mais toutefois assez loin du chef d’œuvre.

 

L'esprit Coubertin de Jérôme Sein

D'où vient l'idée de l'esprit Coubertin, voulu comme une comédie autour des Jeux Olympiques de 2024 ? Sûrement de cerveaux astucieux surfant à contre-courant de la vague cocardière menaçant d'envahir la France, au cœur de l'été. Le film prend le contre-pied du patriotisme obligatoire de la future quinzaine olympique, une posture intéressante mais un peu risquée, susceptible cependant de plaire à une frange du public déjà agacée par l'assourdissante caisse de résonance annoncée. Pour tenir son objectif de satire, le film devait être crédible dans ses décors, soit principalement le village olympique et quelques sites de compétition. Faute d'un budget suffisant, on ne s'y "croit" jamais, lmais alors pas du tout, a piscine, par exemple, ressemblant davantage à l'équipement modeste d'une petite commune, n'importe où en France. Déjà, le bât blesse, mais l'excès dans la caricature, concernant les athlètes, les journalistes ou de la ministre, provoque plutôt le malaise que l'exaltation. Les rires, et il y en a peu, sont plus mécaniques qu'autre chose, tellement les effets apparaissent grossiers. Avec une telle méforme olympique, il n'y a plus qu'à essayer de se raccrocher au jeu d'un Benjamin Voisin méconnaissable et d'une Emmanuelle Bercot à laquelle on ne reprochera rien. On est très loin du podium.

 

Paternel de Roman Tronchot

Sincère et honnête, tels sont les qualificatifs que l'on accolera logiquement à Paternel, le premier long-métrage de Ronan Tronchot. S'il ressemble le plus souvent à un téléfilm, de par son esthétique sobre et sa mise en scène sans audace, le récit n'en est pas moins bien construit, un peu convenu, peut-être, et distillant une certaine pudeur dans sa traversée des sentiments d'un prêtre qui découvre tardivement sa paternité. Au nom du fils, la situation ainsi établie remet en question non sa foi ni sa fidélité dans son sacerdoce mais bien sa position dans l’Église et la rigidité proverbiale de cette dernière. S'inscrit donc en filigrane le thème du célibat des prêtres et de l'ordination des hommes mariés, un sujet que le film rend moins prégnant que les états d'âme de son personnage central mais qui, néanmoins, pose une nouvelle fois le débat, sans volonté pour autant d'imposer un jugement définitif sur la question. Grégory Gadebois apporte sa rondeur, son humanité et sa force tranquille, quoique ébranlée, à un homme qui ne sait, pour un temps, à quel saint se vouer. La bonne tenue de Paternel se mesure aussi à l'excellence de l'interprétation des rôles secondaires, notamment celles de Géraldine Nakache ou de Françoise Lebrun, mais surtout de Lyes Salem qui incarne à lui seul une histoire dans l'histoire, qui aurait pu être développée sans nuire à l'intrigue principale.

 



23/03/2024
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