Sous les étoiles de Gindou (2)
Alternance de films en plein air et en salle, Gindou se déguste à la carte. Pour moi, il y eut des avant-premières et un film de l'ère soviétique (merci à la cinémathèque de Toulouse). Saveurs diverses et satisfaction assurée.
Le miracle du saint inconnu de Alaa Eddine Aljem, sortie en 2020
Le petit village qui s'est construit autour du mausolée d'un saint inconnu semble symboliser, en son état de microcosme, le Maroc tout entier. Tout du moins est-ce ainsi que le spectateur du premier long-métrage d'Alaa Eddine Aljem l'interprétera. Les personnages du film sont des sortes d'archétypes déterminés par leur profession et le réalisateur prend le temps de les présenter en détail : le voleur, le garde, le paysan, le dentiste/barbier, le médecin et ... toutes les femmes du village qui vont voir ce dernier pour combattre leur ennui (en cas de santé défaillante, elles préfèrent s'en remettre au saint) dans ce trou perdu au fin fond du désert. Le film ironise sur les croyances et les superstitions du peuple sans pour autant attaquer frontalement la religion. Comme un lointain cousin d'Elia Suleiman, Aljem préfère suggérer que démontrer et il a lui aussi choisi la voie du burlesque. Même si tout ne fonctionne pas parfaitement, faute de rythme peut-être, l'assemblage de saynètes qui composent le film sont assez délectables, fort drôles à l'occasion. Nous sommes dans un conte moral où spiritualité et cupidité se relaient dans un cocktail qui se révèle in fine plutôt réussi et prometteur quant à l'avenir du cinéaste marocain.
Une mère incroyable de Franco Lolli, sortie en 2010
Silvia est "Une mère incroyable" (c'est ainsi qu'elle est qualifiée par son nouvel amoureux) mais elle est aussi une femme qui travaille et s'assume et une fille qui vit mal la maladie de celle qui lui a donné le jour. Après Gente de bien, le nouveau film du colombien Franco Lolli dresse un portrait de femme dont le réalisme est frappant, son inspiration est autobiographique, mais nourri au carburant de la fiction mêlant l'intime et le social. S'il est vrai qu'Une mère incroyable s'approche dangereusement du mélodrame pesant, il s'en échappe cependant par la qualité de son écriture, la fluidité de sa mise en scène et la souplesse de son montage. Sans oublier une pointe d'humour et des dialogues hauts en couleur où l'héroïne et sa propre mère s'assènent quelques vérités teintées de fiel. Pour autant, Lolli manifeste une grande tendresse pour les femmes de son film même s'il évite soigneusement d'en faire des saintes. Silvia fait ce qu'elle peut, mère célibataire qui traverse les moments difficiles de sa vie avec une certaine dignité, et l'interprétation de Carolina Sanin est en tous points parfaite, d'une sobriété exemplaire.
Don Quichotte, Grigori Koznitsev, 1957
Il semble qu'il existe 2 versions du Don Quichotte tourné par Grigori Koznitsev. L'une dans le format écran large soviétique (peu gratifiante avec ses flous) et l'autre sous une forme classique. Le film est une curiosité, tourné en Crimée et avec quelques décors de carton pâte, et s'avère fidèle à l'esprit du livre. Peut-être est-il un peu trop chargé en dialogues (pas tous traduits) et ne fait-il pas suffisamment de place à l'image mais il respecte le côté grotesque de la folie du chevalier à la triste figure et suscite l'empathie devant la cruauté du monde qui l'entoure. L'acteur qui interprète Don Quichotte ne réalise pas une performance inoubliable mais il est largement suppléé par un Sancho Pança de gala incarné par un comédien dont le faciès rappelle étrangement Sergi Lopez.
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