Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Les tribulations d'un cinéphile à La Rochelle (3)


Scènes 6 à 9 :
Un rêve brésilien, un cauchemar finlandais


J'ai beau me coucher tard, je me lève tôt. Je ne lis pas les journaux, je les parcours. Les contours du monde extérieur s'estompent quelque peu quand on est plongé en plein festival. Ne pas oublier les petits à côtés du susdit. J'ai bien entendu remarqué les deux jolies serveuses du café/restaurant de La Coursive, le QG du festival. Une brune et une blonde. Avec la brune, nous avons parlé de son récent voyage en Amérique du sud, du Chili au Pérou, en passant par la Bolivie. Avec la blonde, je n'ai échangé qu'un sourire. J'en saurai plus demain, peut-être. C'est mon côté humaniste qui s'exprime, comme toujours.

Revenons à nos moutons cinématographiques, du meilleur au pire, un grand écart entre Brésil, Roumanie, Mexique et Finlande.

Historias de Julia Murat (sortie le 18 juillet) est sous-titré : Les histoires n'existent que si l'on s'en souvient. C'est le premier film de fiction, après un documentaire, de cette cinéaste, diplômée des Beaux-Arts et fille de réalisatrice, très connue dans son pays, au moins dans son immeuble. Une voie de chemin de fer désaffectée, un cimetière qui n'accueille plus les morts, une boutique que personne ne fréquente et dont les deux responsables se querellent tous les jours, la messe quotidienne, un repas partagé par toute la communauté de ce qui n'est plus qu'un village fantôme. Le temps semble figé, les habitants ne meurent plus. Une jeune fille, touriste/photographe va faire bouger ce monde endormi. Julia Murat filme la mémoire et les souvenirs à travers des gros plans sublimes et des images éclairées à la bougie et à la lampe à pétrole. Des photos en noir et blanc, extraordinaires, se mêlent avec une grâce infinie au lent mouvement des êtres, comme sclérosés dans leurs habitudes. Le rythme est doux, répétitif, mais peu à peu une magie poétique opère, d'une émotion qui transporte jusqu'aux larmes. On en saura pas beaucoup sur les personnages, quelques bribes, seulement, comme celui de cette vieille femme qui écrit tous les soirs une lettre d'amour à son mari défunt. Peut-être que le film n'est qu'un rêve, celui de la jeune photographe, dans ce récit qui évoque Borges et Garcia Marquez. Une splendeur qui sort le 18 juillet, sans doute dans un circuit restreint de salles. A ne pas rater, pour ceux qui aiment les climats incertains et les éclats surannés du passé. Pour moi, l'un des plus beaux films de l'année jusqu'à maintenant.


Après Picnic (pas mal), le cinéaste roumain Adrian Sitaru est de retour avec Best intentions, très autobiographique. L'histoire d'un type qui, en apprenant que sa mère est hospitalisée après un malaise, passe 3 jours à harceler ses proches et les médecins. Devenu paranoïaque, il pourrit la vie de tout le monde. Le film est aussi stressant que son personnage, bavard jusqu'à l'écoeurement, avec un humour sous-jacent qui ne parvient pas à le rendre supportable. Ce n'est pas qu'il soit mauvais, d'ailleurs, il est simplement épuisant.


Daniel & Ana, son premier long-métrage, est un bon souvenir. Después de Lucia, primé à Cannes, laissait présager une excellente surprise. Pourtant, ce film du mexicain Michel Franco (sortie le 3 octobre), laisse dubitatif. Tirée au cordeau, sa mise en scène a quelque chose de clinique dans l'évocation du couple père/fille qui a changé de vie après la mort accidentelle de la mère. Le scénario fait du sur place pendant 45 minutes avant d'aborder le thème du harcèlement au lycée que la jeune fille semble accepter comme une sorte d'expiation. Après la mise en ligne des images de son premier rapport sexuel, c'est l'hallali et Michel Franco a la main lourde pour évoquer tout ce qu'elle doit subir comme humiliations. Comme Haneke dans Amour, Franco en fait trop et dramatise ses dernières scènes au mépris d'une certaine crédibilité. Le film, comme témoignage de certaines dérives adolescentes, a tout de même une cohérence et une force non négligeables. Déception mesurée donc.


Final en beauté, c'est ironique, avec Le rêve de la hutte bergère (1940) de l'inénarrable Teuvo Tulio. Quand un mélodrame est trop, il en devient ridicule. Passons sur les images bucoliques (tous les animaux de la ferme sont présents, avec un goût certain pour filmer les vaches sous toutes les coutures). Le scénario est innommable, se partageant entre deux frères aux antipodes l'un de l'autre, le frivole et le sérieux, et deux femmes incarnant joliment les plus beaux clichés. La blonde est angélique, la brune est machiavélique. J'essaierai de vérifier cette théorie douteuse auprès des serveuses du bar de La Coursive. Et hop, je ne suis pas mécontent de retomber sur mes pieds. mdr2


Demain sera léger, avec seulement trois films : du neuf belge (Joachim Lafosse) et colombien, et de l'ancien (Luigi Zampa).

A suivre, au fil(m) de l'eau.



02/07/2012
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