Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Intermède au Cinemed (5)

Mon menu du jour au Cinemed : espagnol (La hija de un ladron), palestinien (Entre le paradis et la terre) et italien (Sème le vent). C'est ce dernier que j'ai préféré.

 

 

La hija de un ladron, Belén Funes

Sara a 22 ans, un bébé sur les bras et vit d'emplois précaires, ne pouvant compter sur un compagnon avec lequel elle ne vit plus. Elle est, dans un style naturaliste que l'on connait par cœur, la sœur des héroïnes des frères Dardenne ou de Ken Loach. La hija de un ladron (La fille d'un voleur) est un film au titre trompeur puisque ce père, assez mystérieux, n'intervient qu'en de rares moments, alors qu'il aurait mérité de plus amples développements tellement son caractère et sa façon d'agir ont quelque chose de fascinant. Mais non, le film de Belén Lunes préfère s'attacher à cette mère courage aux traits encore juvéniles qui se bat pour assurer le quotidien. On a déjà vu cela, hélas, et avec davantage de panache. Dans ce genre d'exercice, on attend un peu l'étincelle, qui peut venir de la mise en scène ou de l'interprétation. Il faut reconnaître que Greta Fernandez est vraiment formidable dans le rôle principal et assure à elle seule une vraie dynamique dans un long-métrage qui n'arrive jamais à se détacher de son ton monocorde. Son vrai père dans la vie, Eduard Fernandez est aussi excellent en homme perdu, incapable de montrer son sens des responsabilités. C'est vrai que les scènes avec sa fille dégagent quelque chose mais elles sont trop rares pour que l'on ait matière à s'enthousiasmer. La justesse sociale est indéniable dans La hija de un ladron mais cela ne suffit pas à sortir le film d'une certaine banalité.

 

Entre le paradis et la terre, Najwa Najjar

Le dernier film d'Elia Suleiman s'appelait It must be Heaven. Le troisième long-métrage de Najwa Najjar s'intitule Entre le Paradis et la Terre. Coïncidence ou pas, l'ironie est manifestement très présente dès lors que les cinéastes d'origine palestinienne se penchent sur la situation actuelle dans cette région du Moyen-Orient. Pour ce qui est de Najwa Najjar, cette toile de fond est importante mais elle n'apparait que derrière une intrigue qui concerne un couple en instance de séparation. Un divorce à la palestinienne, complexe à conclure dès lors que l'administration, israélienne, devient tatillonne. Cela pourrait être une comédie, et c'est le cas pour certaines scènes, mais Entre le Paradis et la Terre s'avance comme un road-movie à différentes facettes où les différentes rencontres ne font que souligner la complexité des relations entre les deux communautés et aussi celles d'un couple dont les chamailleries sont continuelles. Il y a comme une frustration vis-à-vis du déroulement du film dont on pressent qu'il aurait pu être bien plus profond et émouvant. Il est évident que la réalisatrice a souhaité privilégier les non-dits au gré de moments qui s'enchaînent sans que presque aucun d'entre eux ne soit mémorable. Le film est agréable à regarder, la plastique des deux comédiens principaux et leur qualité de jeu y sont pour beaucoup, mais leur statut même de privilégiés, du point de vue social, désamorce quelque peu son efficacité et sa volonté de témoigner de l'état des lieux en Palestine et en Israël.

 

Sème le vent (Semina il vento), Danilo Caputo, sortie le 21 février 2021

Danilo Caputo a grandi dans les Pouilles, une région restée chère à son cœur. Pas étonnant qu'il y ait situé son premier long-métrage, Sème le vent, qui évoque notamment la présence d'une énorme usine sidérurgique, le désastre écologique concomitant et le virus qui attaque et fait mourir les oliviers. Le film est un plaidoyer pour le respect de la nature, bien qu'il soit déjà trop tard, traité de manière poétique aussi bien que réaliste et romanesque. Si le film manque un peu de rythme, il révèle un véritable auteur qui n'a pas peur d'instaurer de lents moments de contemplation et qui a su créer un personnage très attachant de jeune femme qui, de retour au pays, s'oppose à son père pragmatique face à l'évolution des terres qu'il possède. On retrouve dans Sème le vent une thématique familière qui est celle de l'économie et de l'emploi qui prennent le pas sur l'environnement. "Mieux vaut mourir d'un cancer à 50 ans que de faim à 90" énonce ainsi l'un des personnages du film qui représente une population "polluée mentalement" dixit le réalisateur. Danilo Caputo ne va pas se faire que des amis avec un tel constat mais la démonstration cinématographique est convaincante malgré une léthargie occasionnelle dans le récit. C'est le genre de film où l'on trouve parfois le temps long mais qui, en définitive, laisse une véritable trace dans la mémoire. Sa belle facture, avec de jolies idées au passage (le "personnage" de la pie) n'est pas pour rien dans l'impression positive que laisse le film.

 



20/10/2020
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 50 autres membres