Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Ici, c'est Auch (1)

 

Les Damnés de Roberto Minervini. Sortie le 12 février 2025

En quoi sont-ils damnés, les patrouilleurs de l'armée Nordiste, explorant des terres vers l'Ouest, en 1862, durant la guerre de Sécession ? La réponse ne figure pas dans le film de Roberto Minervini , lequel reste fidèle à son expérience de documentariste dans cette fiction où l'on cherchera en vain quelque chose de vraiment palpitant à se mettre sous la dent. C'est le quotidien de ces soldats, qui semblent abandonnés, qui nous est montré dans un geste contemplatif où rien n'arrive, à l'exception d'une scène dont on ignorera tout des tenants et des aboutissants. Aucun personnage n'est suffisamment saillant pour exciter un peu notre curiosité même si l'on apprend, au fil de courtes conversations, la raison de l'engagement de ces hommes dans la guerre, la place de Dieu dans leurs motivations ou encore le sentiment d'absurdité qui, parfois, les étreint. Mais la neutralité des échanges entre soldats court-circuite tout espoir de partager une quelconque émotion et c'est sans doute le but du réalisateur que de nous plonger à l'intérieur de cette escouade mais sans chercher à nous rendre ses membres vraiment proches. Ces volontaires sont-ils damnés parce qu'ils courent à leur perte ou parce qu'ils ont cessé de croire en quoi que ce soit et surtout à l'utilité de la guerre ? Franchement, à la fin de la projection, la question reste en suspens mais le pire est que le film ne nous a donné aucune envie d'y répondre.

 

Noël à Miller's Point de Tyler Taormina. Sortie le 11 décembre.

D'intrigue, dans Noël à Miller's Point, il n'y en a point. Il faut se contenter d'une collection de saynètes qui doivent signifier quelque chose pour le réalisateur, Tyler Taormina, mais dont il ne nous rend jamais complices, comme si l'on assistait à une fête (plutôt une défaite) de Noël où tout nous est étranger, à commencer par les bribes de conversations qui ne sont pas loin d'être lunaires, à moins qu'elles ne soient inconsistantes. La forme chorale n'arrange rien, bien au contraire, avec le sentiment d'être convié à une célébration qui ne nous concerne pas. Aucun personnage n'est clairement identifié et il vaut mieux renoncer à essayer de comprendre qui est l'oncle machin ou la cousine trucmuche. Par ailleurs, la B.O, de par sa volontaire mièvrerie, contribue à l'ennui persistant qui se fait jour très vite. La dernière partie du film nous sort un peu du marasme mais rien d'exceptionnel non plus. Pourtant, Tyler Taormina essaie de varier les tonalités : de la cruauté, de la tendresse, du romantisme, de l'absurde et des tentatives d'humour presque pathétiques. La mise en scène essaie de surprendre par quelques cadrages biscornus mais l'ensemble ressemble à un soufflé vite retombé. Surtout si vous n'aimez pas plus que ça le soufflé, surtout cuisiné à la mode du cinéma indépendant américain si souvent insipide (oui, c'est un avis personnel).

 

The Village next to Paradise de Mo Harawe. Sortie le 9 avril 2025

Il y a au moins trois bonnes raisons d'aller voir le long métrage du réalisateur austro-somalien, Mo Harawe. Tout d'abord, la splendeur des images dues à un chef opérateur égyptien ; ensuite, la qualité d'un scénario qui avance doucement, avec au détour d'un plan anodin, une révélation stupéfiante qui ne changera pourtant en rien la modestie et surtout la dignité du propos ; enfin, un voyage dans un pays, la Somalie, au cinéma quasi inexistant, et qui vit une guerre presque perpétuelle. Le récit suit une famille pauvre, du sud du pays, non loin de la côte, dans un village ironiquement nommé Paradis. Il y a là, le père, qui vit de petits boulots, fossoyeur assez souvent, son jeune fils dont l'école ferme et la sœur du premier, indépendante et décidée à ouvrir son propre commerce. Trois personnages attachants, qui ne s'en laissent pas conter et qui évoluent sous nos yeux en parallèle ou simultanément. Les mots sont rares dans le film mais ils disent l'essentiel et les visages expriment ce qu'il y a à comprendre d'autre. Sans véritable temps mort, malgré un caractère que l'on qualifiera trop aisément de contemplatif, The Village next to Paradise est une merveille tranquille, gorgée d'humanité, de pudeur et d'humilité

 



04/10/2024
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 51 autres membres