Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Ici, c'est Arras (6)

 

The Gardener's Year de Jiri Havelka

De tout temps et de toute contrée, la lutte du petit pour ne pas être dévoré par le gros a alimenté les créateurs de fiction, en puisant dans les multiples exemples de la vie réelle, si besoin est, qui en est prodigue. Ainsi, L'année du jardinier, qui est aussi le titre d'un livre célèbre de Karel Čapek, prend-il le cas d'un vieux jardinier tchèque, qui ne vit avec son épouse que dans le rythme des saisons, des semailles et des récoltes, opposé à un nouveau et richissime voisin qui n'a de cesse de racheter toute la terre environnante, pour son seul bon plaisir. A chaque mois suffit sa peine et notre bon et tranquille jardinier, homme de peu de mots [spoiler](d'aucun, d'ailleurs, un choix surprenant du scénario qui ne rend pas vraiment service ni au personnage, ni au film)[/spoiler] se voit harcelé pour qu'il vende, dans une sorte de crescendo, qui ne peut cependant éviter une répétition finalement lassante. Le film se veut une satire mais elle n'est guère drôle et parler de Kafka n'a pas plus de sens, dans un récit qui obéit à une certaine logique de chaîne alimentaire, bien conforme à la doctrine d'un capitalisme qui broie sans états d'âme ceux qui croisent sa route. Le plus sympathique dans The Gardener's Year n'est pas la sempiternelle lutte du pot de terre contre le pot de fer mais bien l'hymne à la nature et à ceux qui consacrent leur vie à en extraire les savoureux fruits.

 

The Trap de Nadejda Koseva

Il est libre, Yovo. Veuf, avec une fille au loin, mais heureux de vivre au contact de la nature. Quitte à passer pour un original, il se balade souvent avec un duo de corbeaux sur l'épaule, nourrit un loup, et vient déposer devant la mairie les emballages abandonnés par des touristes d'un jour, sur une île toute proche, au beau milieu du Danube. Bien entendu, il doit faire face à un environnement sans scrupules, dominé par l'argent, que cela soit pour accueillir des déchets nucléaires ou organiser une battue au sanglier pour un riche Français (eh oui !). Bref, c'est l'éternel lutte du pot de terre contre le pot de fer dont l'issue semble facile à deviner. Dans Klopka, la cinéaste bulgare Nadejda Koseva laisse du temps au temps et à la contemplation, peut-être un peu trop. Mais son film n'est pas exempt de poésie, joliment réalisé et superbement interprété., y compris par les animaux. Un hymne écologique où les profiteurs et leurs alliés ne gagneront pas nécessairement pas à la fin, qui sait ?

 

Andrea gets a Divorce de Josef Hader

Comparé à ses compatriotes cinéastes autrichiens, Michael Haneke et Ulrich Seidl, Josef Hader s'avère moins féroce, ce qui ne l'empêche pas de s'exprimer rudement sur son pays et sa mentalité (La tête à l'envers). Une fois encore, dans Andrea gets a Divorce, il s'est réservé un rôle bien chargé mais ce n'est pas lui le "héros" d'une histoire qui en dit assez long sur l'exode rural et la vie, quelque peu pathétique, de ceux qui sont restés vivre à la campagne, faute d'espérer mieux, sans doute et par habitude. Andrea est une policière désireuse de divorcer et de rejoindre une ville plus importante que la modeste bourgade où elle habite et où il ne se passe presque jamais rien. Le presque vient bien entendu égayer un scénario suffisamment malin pour créer des situations incongrues qui donnent quelques soucis à Andrea et à plusieurs habitants de son village, lesquels se connaissent tous. Dans un univers où boire ou ne pas boire semble être la question essentielle, le réalisateur fait montre à la fois de cruauté et de tendresse pour ses personnages, un peu perdus, un peu résignés, un peu fatalistes. La mise en scène, simple mais efficace, et l'interprétation, impeccable, contribuent à nous rendre proches ces femmes et hommes rustiques dans leur autrichienne de vie.

 



13/11/2024
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