D'Arras ton univers impitoyable (8)
Devant une actualité aussi dramatique, l'on se sent presque coupable de parler de choses aussi futiles que le cinéma. Mais faire régner la peur et empêcher la vie, c'est précisément ce que certains fous croient être capables de faire.
Le coupable (Verfehlung) de Gerd Schneider
Gerd Schneider a étudié la théologie catholique et la philosophie avant de se tourner vers le cinéma. Son premier long-métrage, Le coupable, met en scène le cas de conscience d'un aumônier de prison dont le meilleur ami, prêtre, est soupçonné de pédophilie. Sujet hélas trop actuel que Schneider traite frontalement en étudiant tous les comportements, des victimes à la hiérarchie de l'Eglise. C'est d'ailleurs là où le bât blesse, le film s'efforçant de ne laisser personne de côté, trouvant des arguments pour chacune des parties concernées. Avec sa réalisation solide mais rigide, il en devient scolaire et oecuménique malgré toute la bonne volonté dont il fait montre. D'autant plus regrettable que le rôle principal est admirablement incarné par Sebastian Blomberg.
L'escrimeur (Miekkailija) de Klaus Härö
Le nom de Klaus Härö n'est pas encore très connu alors qu'il a représenté la Finlande trois fois (sur quatre films). L'escrimeur est inspiré de la vie d'un estonien qui comme nombre de ses compatriotes a été enrôlé dans l'armée allemande avant l'arrivée des russes. Et qui ont été pourchassés par les autorités soviétiques après la guerre. L'escrime devient un symbole, celui de l'éducation et de la résistance à la répression. Härö joue à fond la carte du romanesque et du mélodrame positif. Certains trouveront certainement à y redire mais l'émotion portée notamment par les enfants. C'est sensible, beau et d'une noblesse évidente. Touché !
Mémoires du vent (Rüzgârin hatilari) de Özcan Alper
C'est devenu un cliché que de prétendre que tous les films turcs (du cinéma d'auteur, s'entend) sont lents et contemplatifs. Mémoires du vent l'est aussi mais il a pour lui d'évoquer un contexte historique précis : la chasse aux sympathisants communistes pendant la seconde guerre mondiale. Qui plus est, le scénario revient aussi, à travers les cauchemars de son personnage principal, au génocide arménien (avec des flashbacks sans doute trop insistants). Les sujets traités risquent fort de lui interdire les écrans turcs. Ce drame, qui laisse une place envahissante à la nature (encore une constante du cinéma national) aurait mérité d'être resserré même si l'ennui y est rare.
Dough de John Goldschmidt (sortie le 20 janvier)
"Un conte de fées pour adultes", c'est ainsi que John Goldschmidt décrit Dough (Pâte), sûrement l'un des feel good movies les plus euphorisants qui soient et pas seulement parce qu'il y est question de drogues. La relation entre le vieux boulanger juif et son apprenti musulman est un régal dans l'affrontement puis la compréhension. Le rythme est effréné, les dialogues cinglants et l'interprétation géniale de Jonathan Pryce fait encore monter la pâte. Il n'existe pas à proprement parler d'humour juif britannique contrairement aux Etats-Unis. Dough comble le manque avec grande classe. Un succès populaire à la Full Monty serait mérité.
Je vous souhaite d'être follement aimée d'Ounie Lecomte (sortie le 13 janvier)
Son premier film, Une vie toute neuve, racontait en grande partie son histoire d'enfant coréenne adoptée par une famille française. Son deuxième, Je vous souhaite d'être follement aimée, même s'il n'est pas une suite est aussi un récit identitaire, vue à hauteur d'adulte cette fois où une fille cherche à retrouver la mère qui l'a abandonnée à la naissance.Ounie Lecomte est une cinéaste de l'intime et des sentiments qui ne transige pas sur une façon d'abord ces thèmes, tout en pudeur, retenue et délicatesse. C'est un film fort sur le rapport filial, et ce à plusieurs niveaux, qu'on aimerait davantage aimer. Il y a cependant des coïncidences et des hasards dans le scénario qui empêchent d'adhérer totalement. Malgré cela, le jeu tout en nuances de Céline Sallette (l'une des meilleures actrices françaises) et d'Anne Benoît trouvent nécessairement un écho chez le spectateur. Et sans doute encore davantage pour le public féminin.
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