Cinéphile m'était conté ...

La folle parade (Alexander's ragtime band, Henry King, 1938)
Un jeune musicien délaisse le classique pour monter son orchestre de ragtime. Avec une chanteuse avec laquelle il s'oppose violemment. Une comédie musicale avec Tyrone Power incapable de jouer une seule note ou même de chanter ? Oui, c'est possible et le talent de l'acteur, à la beauté fracassante, fait le reste. Surtout accompagnée d'une Alice Faye qui, elle, sait chanter, et comment ! La musique d'Irving Berlin est superbe et fait oublier la minceur d'un scénario qui tergiverse sur le thème des amours contrariées. Qu'importe, Alexander's est un magnifique Feel good Movie, au rythme trépidant. Immanquable, pour les amateurs.

Echec au Roy (Jean-Paul Paulin, 1943)
En 1712, Madame de Maintenon souhaite marier sa fille adoptive à un fringant vicomte. Le roi est contre et les jeunes gens ne sont point amoureux. Mais la guerre va changer la donne. Cette chronique de la fin de règne de Louis XIV est bien frivole et historiquement aléatoire. Ne serait-ce que parce que l'acteur jouant le roi semble avoir une quarantaine d'années alors que Louis, vieillard septuagénaire, n'avait plus que trois ans à vivre. Gabrielle Dorziat, qui interprète avec aplomb la Maintenon est davantage vraisemblable. Entre emphase et désinvolture, le film de Paulin montre que le cinéaste était bien meilleur dans la veine fantastique (L'homme qui vendit son âme). Echec au Roy se termine par la victoire de Denain qui sauva la France. Un geste patriotique qui explique peut-être que le film, tourné en 1943, ne sortit sur les écrans qu'en mai 1945.

Le bigame (Il bigamo, Luciano Emmer, 1956)
Un représentant de commerce, marié et père d'un enfant, se voit accusé d'avoir contracté un premier mariage quelques années plus tôt. Scandale ! Luciano Emmer avait commencé une formation en droit avant de bifurquer vers le cinéma. Cela explique t-il la virulence avec laquelle il s'attaque à la profession d'avocat dans cette comédie al dente ou davantage que Marcello Mastroianni c'est Vittorio de Sica qui a la vedette en avocat pompeux, suffisant et délirant. Le film écrit par pas moins de 5 scénaristes dont Francesco Rosi (étonnant) est plus rythmé qu'un polar avec des scènes de burlesque pur et un suspense terrible (l'homme est-il coupable ou non ?). Tous les personnages sont admirablement campés y compris un nostalgique de Mussolini. Quant au héros, il se nomme de Santis (Private Joke ?).

Mon deuxième frère (Nianchan, Shohei Imamura, 1959)
A la mort de leur père, quatre frères et soeurs se retrouvent orphelins. Ils vont devoir se séparer pour survivre. A l'instar d'un Nagisa Oshima, Imamura témoigne de la crise économique des années 50, ici dans une ville minière où vit une communauté coréenne. Les temps sont durs entre les épidémies, le manque de travail et la faim. Le film est parfois difficile à suivre à cause d'une ligne narrative confuse mais il en ressort une énergie constante et l'espoir que l'avenir sera meilleur. Une oeuvre mineure du futur double palmé de Cannes mais symbolique de son travail centré sur l'humain et le social.

La ville captive (The captive City, Robert Wise, 1952)
Dans une petite ville américaine, un journaliste découvre que les jeux clandestins se sont multipliés et que la mafia est désormais à sa tête avec la complicité passive des pouvoirs locaux. The Captive City se base sur le rapport du sénateur Estes Kefauver, lequel vient conclure le film en personne. Comme  dans un certain nombre de films noirs de cette époque, l'aspect pédagogique est ici en arrière plan ce qui n'enlève rien à l'évident savoir faire de Wise dans une histoire relativement simple et modeste mais aux ressorts efficaces, impression rehaussée par la qualité de l'interprétation, en l'absence de stars qui auraient attiré la lumière. C'est bien le thème du film qui tient le haut de l'affiche.