Conte cruel sans paroles (Blancanieves)
Un film en noir et blanc et dépourvu de dialogues ? Non, il serait vain de comparer The Artist et Blancanieves. Le premier est un hommage appuyé au cinéma muet américain, le second se nourrit d'expressionnisme allemand avec le Freaks de Tod Browning en clin d'oeil malicieux. Mais cette relecture étonnante de Blanche Neige, en terre andalouse, dans les années 20, sur fond de tauromachie et de flamenco, est un film moderne qui n'utilise que certains codes du cinéma d'avant le parlant et quelques éléments du conte des Grimm pour mieux imposer une patte originale et personnelle dans le registre du drame. La photo est somptueuse, les trouvailles visuelles abondent et l'interprétation médiane entre les outrances de jeu d'antan et une sobriété de bon aloi. Et quelle élégance et fluidité dans une mise en scène sans cesse inventive ! Le tempo est donné par les arpèges d'une musique symphonique quand une complainte plus ibérique ne vient pas dynamiser le film. Des séquence en accéléré se dégustent à un moment clé sur fond de castagnettes endiablées. Inouï ! Blancanieves, malgré une première partie parfois laborieuse, prend de l'ampleur dès que son héroïne recouvre sa liberté et retrouve sa joie de vivre au sein d'une troupe de 6 nains (oui, 6 !) tauromachiques (sic). Poétiques, lyriques, euphoriques, les scènes s'enchaînent avec grâce jusqu'au dénouement d'une sublime tristesse. On en oublie les références au cinéma du passé pour célébrer un oeuvre à nulle autre pareille, incroyablement cruelle comme tout conte qui se respecte.
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