Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Concerto en Arras majeur (3)

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Encore une journée de festival riche en voyages. Du Brésil à l'Azerbaïdjan, en passant par New York, et sur les traces de Romain Gary et de son invraisemblable mère.

 

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Comme nos parents (Como nossos pais), Lais Bodanzky

Un nouveau portrait de femme venu de Brésil, après le splendide Aquarius. L'héroïne de Comme nos parents approche de la quarantaine et sa vie prend un tour nouveau quand sa mère lui annonce deux nouvelles coup sur coup. De quoi en effet remettre ses multiples conditions en jeu : fille, mère, épouse, soeur, elle est tout cela dans une société brésilienne plus que jamais patriarcale, avec ce que la réalisatrice Lais Bodanzky appelle "l'oppression invisible", dont ne personne ne parle mais prégnante. Le féminisme du film est nuancé et s'exprime à travers de nombreuses scènes de dialogues, les meilleurs étant ceux entre mère et fille. C'est cependant le talon d'Achille de Comme nos parents : un tantinet trop écrit et un peu raide dans sa mise en scène alors que l'on sent la réalisatrice très à l'aise aussi quand le silence se fait et qu'elle laisse parler les images. Un peu en deçà des derniers films brésiliens que l'on a pu voir sur nos écrans ces deux dernières années, Comme nos parents témoigne cependant de la vitalité d'un cinéma où les femmes ont encore des combats à mener, tant dans la société que pour accéder à la mise en scène.

 

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Le verger des grenades (Nar bagi), Ilgar Najaf

Un film qui vient d'Azerbaïdjan, ce n'est pas tous les jours que l'occasion se présente. Le film ressemble en grande partie à l'idée que l'on s'en fait à partir de ce titre : Le verger des grenades. Il est effectivement lent, austère, esthétique, avec des travellings soyeux, et plutôt taiseux. Plus proche du cinéma iranien que de son voisin géorgien, si l'on veut. L'histoire est assez simple mais prenante : un vieil homme, qui vit avec sa bru et son petit-fils, a toujours refusé les offres d'achat pour son verger. Jusqu'au jour où revient son fils, parti depuis déjà 12 ans, comme un voleur. On aimerait en savoir plus sur la psychologie des différents personnages et notamment cette femme qui a élevé son enfant sans mari. Mais le film ne livre que peu d'indices et l'on s'attend à un dénouement assez classique sauf que, et l'on n'avait rien venu venir, le film surprend au final par un élément scénaristique inattendu, qu'on appellerait twist si Le verger des grenades était américain. Un dénouement de filou qui a pour conséquence de faire reconsidérer tout le déroulement du film. Bien joué.

 

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La promesse de l'aube, Eric Barbier

Romain Gary est revenu en force, cette année. Avec le roman de François-Henri Désérable, Un certain M. Piekielny, et maintenant avec la nouvelle adaptation de La promesse de l'aube par Eric Barbier, cinéaste plutôt ambitieux qui a malheureusement le plus souvent côtoyé l'échec. La vie de Gary a été très romanesque, on le sait, plus ou moins réinventée par l'écrivain lui-même, menteur génial. Mais qu'importe si ce qu'il raconte de sa relation fusionnelle avec sa mère dans La promesse de l'aube est enjolivée ou relève même en grande partie de la fiction. Barbier s'est attaqué à cette autobiographie sans inhibitions et il a eu raison. C'est parfois très "gros" ? Et alors, ce qu'écrivait Gary aussi ! La première partie, du côté de Wilno, est sans doute la plus laborieuse du film, cela sent trop la reconstitution et l'accent comme les changements de langage d'une Charlotte Gainsbourg inattendue, car exubérante et excessive, sont perturbants. Mais le film ne fait que s'améliorer, à mesure que la présence de la mère se fait plus lointaine, quoique toujours obsédante, et que Pierre Niney prend le rôle de Gary à son compte, lui dont on doutait que le corps frêle puisse habiter celui du futur arnaqueur du Prix Goncourt. Il est plus que crédible dans le rôle, y compris physiquement, ce qui n'est pas un mince exploit. Ecrit avec un bel art de la synthèse et la dose requise de folie, cette Promesse de l'aube, sans atteindre des sommets artistiques, mériterait un joli succès populaire. Gare au Gary !

 

 



07/11/2017
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