Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

9 jours à Fribourg (2)

 

Petite visite touristique de Fribourg avant d'entamer les projections du jour. Au programme, deux films caribéens (pas fameux) et le dernier long-métrage de Yuri Bykov que j'attendais impatiemment.

 

Miriam ment (Miriam miente) de Oriol Estrada et Natalia Cabral, République dominicaine

 

 

Le racisme n'a pas qu'un seul visage. C'est ce que montre le film dominicain, Miriam ment. Disons plutôt qu'il cherche à le montrer mais de façon tellement subtile (?) que le message devient assez difficile à décrypter. Le film se passe chez des gens relativement aisés et blancs hormis Miriam dont le père a la peau foncée. Elle ne souffre d'aucun ostracisme et c'est elle-même qui refuse un ami noir de peur que ses proches ne l'acceptent pas. C'est ce que l'on croit comprendre d'une trame qui évoque la transmission des préjugés et un communautarisme avant tout basé sur les ressources financières. Miriam ment est coréalisé par un couple de cinéastes qui a tourné auparavant deux documentaires. Leur passage à la fiction n'a vraiment rien de mémorable.

 

Le silence du vent (El silencio del viento) de Alvaro Aponte Centeno, Porto Rico

 

 

Voici des migrants dont ne parle jamais. Ils viennent de République dominicaine (sans doute d'Haïti, aussi) et tentent d'entrer à Porto Rico, avec l'aide de passeurs. C'est auprès de ces derniers, notamment une famille, que Le silence du vent nous entraîne. Le ton est au naturalisme et le cinéaste portoricain Alvaro Aponte Centeno. Le problème vient du scénario bourré d'ellipses et incapable de fournir les explications les plus élémentaires sur ce qu'il se passe à l'écran. Et ce, jusqu'à une dernière scène en mer, tragique mais qui n'en finit pas de se terminer. Le sujet et la mise en images sont captivants, l'interprétation est tout à fait correcte, cela rend d'autant plus incompréhensible tous les non-dits de l'intrigue, qu'on pourrait aussi qualifier de trous, tellement ils finissent par susciter un sentiment de désintérêt progressif, ce qui est fort dommage.

 

L'usine (Zavod), Yuri Bykov, Russie

 

 

 

Pour donner une idée de L'usine de Bykov, il faut imaginer ce que pourrait donner un film coréalisé par Ken Loach, John McTiernan et Andreï Zviaguintsev. Un film de genre, avec un aspect social très fort, dans un décor on ne peut plus marqué, à savoir une usine déjà vétuste à l'époque soviétique, rachetée par un oligarque dans les années 90 pour une bouchée de pain. Le mélange d'action et d'une thématique  "gilets jaunes russes" est des plus détonant mais il n'échappe pas tout de même à une certaine surenchère sur des sujets, la corruption des élites et la misère du peuple, que Yuri Bykov a déjà traité, avec plus de subtilité dans ses opus précédents : Le major et L'idiot. Si le cinéaste pousse le bouchon un peu loin avec son scénario (Bykov a écrit, coproduit, réalisé et composé la musique du film), sa mise en scène est impressionnante de puissance visuelle, dans une atmosphère de citadelle assiégée. Le film aurait pu éviter un lourd symbolisme où le bien et le mal semblent s'affronter avec la victoire inéluctable de l'on devine qui. Non, vraiment pas nuancé, le dernier film de Bykov, réalisateur que l'on a cru un moment capable de rivaliser avec Zviaguintsev. Il l'a fait avec L'idiot mais démontre avec L'usine que s'il n'est pas capable de rester à ce niveau-là d'un film à l'autre, il demeure un metteur en scène d'une efficacité redoutable, apte à produire un spectacle de haute volée.

 



17/03/2019
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