Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Tout à fait Alès (1)

Me revoilà à Alès pour un festival à nouveau placé en ses dates traditionnelles. J'ai prévu 23 séances en 10 jours. Allons-y !

 

En même temps de Gustave Kervern et Benoït Delépine.

En même temps a failli s'appeler L'un dans l'autre, titre très premier degré puisque deux hommes politiques y sont littéralement collés ... l'un à l'autre, par la faute d'activistes féministes. Drôle de postulat de départ, qui n'étonne cependant pas de la part du duo Kervern/Delépine qui s'attaque ici à la politique (le film devait absolument sortir avant l'élection présidentielle) à travers le double portrait d'un écologiste et d'un opportuniste, jusqu'à ce que la colle tue ... les préjugés, ou peut-être pas. Les cinéastes n'y vont pas de main morte, n'ayant peur ni de la vulgarité induite par la posture embarrassante de ses deux héros ni d'un effet de répétition qui finit cependant par lasser. Mais En même temps traite aussi du féminisme, de manière primesautière mais radicale, jusque dans des dernières scènes beaucoup trop démonstratives qui alourdissent le propos, déjà pas spécialement nuancé. Ira t-on jusqu'à prétendre que le film la joue un peu démagogique et très dans l'air du temps, en tirant à boulets rouges sur les politiciens et en faisant de l'écologie et du féminisme les valeurs d'avenir pour faire évoluer notre société sclérosée par des années de patriarcat et de libéralisme ? Sans doute qu'on le peut même si le film ressemble aussi à une blague potache, qui a pour but essentiel de nous amuser ... intelligemment. Grâce à Vincent Macaigne, India Hair et surtout Jonathan Cohen, il y parvient, mais pas tout le temps.

 

Inexorable de Fabrice du Welz.

La définition du film noir, selon Fabrice du Welz ? "Un genre qui ne fait que des victimes." Cinéphile passionné, le réalisateur d'Inexorable assume des influences multiples, conscientes ou inconscientes, du Théorème de Pasolini à Laura de Preminger, en passant par les films de fantômes japonais ou le Giallo. Écrasé sous les références, alors cet Inexorable ? Qui plus est avec une sorte de prévisibilité de son intrigue cheminant vers le pire ? Pas si vite, si du Welz nous dévoile presque d'emblée le fond de son histoire, c'est pour essayer de déconstruire des schémas archétypaux, laisser quand même de la place au suspense (et à l'épouvante) et montrer qu'il est avant tout un styliste, comme le montrent ses images (argentiques) et son utilisation efficiente de la musique (entre autres choses). Et puis, il est capable, dans une poignée de scènes, d'inviter une sorte de folie dans une écriture qui ne se veut pas réaliste, de toute manière (la danse d'anniversaire, un passage en voiture). Enfin, le cinéaste manifeste une sorte de compréhension vis-à-vis des mensonges de ses personnages (et leurs châtiments), leur donnant un caractère humain profond dans leur recherche d'harmonie, cependant impossible, puisque nous sommes dans ... un film noir. Rayon interprétation, il n'y a pas de faute de goût, avec un Poelvoorde impressionnant, une Mélanie Doutey excellente et la révélation d'Alba Gaïa Bellugi, aux faux airs de Charlotte Gainsbourg, en beaucoup plus inquiétante (qui a reconnu la fillette d'Intouchables ?).

 

Les repentis (Maixabel) d'Iciar Bollain.

Le mariage de Rosa, l'avant-dernier long-métrage d'Iciar Bollain, n'a pas été distribué dans les salles françaises (disponible en VOD). En sera t-il de même pour Maixabel (Les repentis) qui, contrairement à son prédécesseur, est tout sauf une comédie. Il y est question du conflit basque, peu avant que l'ETA ne dépose les armes, et de ses combattants, meurtriers de sang froid pour la cause, qui eurent, pour certains, l'occasion de rencontrer les familles de leurs victimes passées. L'histoire de Maixabel est inspiré de faits réels, ce qui donne encore davantage de poids émotionnel à un scénario qui se partage entre les regrets des uns et le chagrin des autres. Il faut une sacrée maîtrise, avec un tel sujet, pour ne pas tomber dans le piège du larmoyant, tout en rendant compte du caractère poignant de certaines scènes où les assassins confessent et cherchent le pardon dans les yeux de ceux qu'ils ont endeuillés à jamais. Le titre espagnol du film, soit le prénom de son héroïne, dont le mari a été tué des années plus tôt, est le plus explicite car il s'agit véritablement du personnage central du film, dont le courage s'exprime au moment et surtout après la tragédie qui l'a frappée. Blanca Portillo a obtenu le Goya de la meilleure actrice 2022 pour ce rôle déchirant, qu'elle interprète avec une pudeur et une lumière particulières. Elle fait face, notamment, au grand acteur espagnol Luis Tosar, lequel aurait tout autant mérité d'être récompensé. A eux deux, ils incarnent l'idée qu'une certaine forme d'apaisement est possible, même au sortir d'un drame indélébile.

 

 



27/03/2022
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 51 autres membres