Cinéphile m'était conté ...

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Passion interdite (Amours)

Une petite ville de province quelques années avant le début de la guerre 14. La vie coule comme le Cher, du moins en apparence, tranquille, dans le foyer d'un notaire et de sa femme auquel il ne manque qu'un enfant. Anselme couche avec Céleste la bonne. Banal. Victoire s'ennuie en feuilletant un roman de Flaubert. Ne serait-elle pas en voie de "bovarysation", elle qui s'impose comme l'une des deux héroïnes d'Amours de Léonor de Récondo ? De prime abord, la toile de fond de son livre n'est pas follement original. Mais justement, de ce matériau familier aux amateurs de littérature française, la romancière va faire quelque chose de prenant et d'intense en y introduisant un ingrédient dévastateur : la passion amoureuse. D'autant plus que celle-ci est "interdite" à double titre : entre deux personnes d'un même sexe ; entre deux femmes de conditions sociales opposées. C'est ce qui est beau dans Amours : Victoire et Céleste sont deux victimes de la société dont le rôle est déterminé depuis la naissance, donner une progéniture pour l'une, servir et ne pas rêver pour l'autre. Leur fusion sensuelle, aussi magnifique soit-elle est aussi un acte de rébellion inouï contre leur condition. Léonor de Récondo déroule son intrigue dans une langue débarrassée de toutes scories et d'une élégance rare. C'est un livre magnifique sur la liberté et sa privation, sur l'éveil des sens et sa condamnation. On n'oubliera pas le personnage lumineux de Céleste ni celui tourmenté de Victoire. Pas plus que certains "seconds rôles" dont le portrait précis et plein d'empathie participent à la réussite du livre (le cocher/jardinier sourd et muet).

 

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24/07/2015
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