Les toiles d'Angoulême (3)
Iris et les hommes de Caroline Vignal
Curieux, comment ne pas l'être, du nouveau long-métrage de Caroline Vignal après Antoinette dans les Cévennes. C'est toujours avec Laure Calamy, dans Iris et les hommes, mais sans ongulé, cette fois. Est-ce d'avoir laissé de côté l'âne rétif qui explique que le film y aussi perdu son âme, avec cette comédie très poussive qui semble recycler tout un tas de recettes éprouvées pour nous raconter les escapades de sexe buissonnier d'une épouse délaissée ? Il ne suffit pas de se brancher sur des applis dédiées et user des réseaux sociaux ad nauseam pour donner des airs de nouveauté à un sujet qui a alimenté de tous temps la littérature et le cinéma, à savoir la tentation dans le couple d'aller voir ailleurs si l'herbe à brouter n'est pas plus verte. En l'occurrence, comme son titre l'indique, Iris et les hommes ne s'intéresse qu'aux aventures extra-conjugales de l'épouse, qui n'ont vraiment rien de palpitant, en laissant de côté un mari visiblement peu concerné et suspicieux (Vincent Elbaz, qui n'a pas grand chose à faire mais le fait bien). On l'a compris, c'est un festival Laure Calamy, [spoiler]y compris dans un passage façon comédie musicale quelque peu grotesque. [/spoiler]Certainement que l'on pourrait s'en contenter un dimanche soir d'hiver à la télévision ou sur une plateforme quelconque mais au cinéma, sur un bel écran, l'exigence est autre et Iris et les hommes n'est pas loin de tutoyer le néant de la comédie de mœurs.
Première affaire de Victoria Musiedlak
Première affaire est un ... premier film, de Victoria Musiedlak, assez singulier et pas particulièrement aimable, au sens où il est loin de tout faire pour plaire au plus grand nombre. Son héroïne, jeune avocate qui n'a aucune expérience des gardes à vue, est lancée dans le grand bain sans précaution et son apprentissage passe aussi par une éducation sentimentale tardive et douloureuse. Le film ne tient qu'en partie son ambition de montrer une "débutante" aux prises avec la cruauté du monde, sans doute par manque d'assurance dans la mise en scène, qui use et abuse des gros plans, voire de ralentis totalement inutiles. Il y a tout de même une ambiance qui se crée, plutôt glauque d'ailleurs, eu égard à la teneur de cette première affaire, qui contraste avec le physique poids léger de son interprète principale, la talentueuse Noée Abita, qui a plus de coffre qu'il y parait a priori et dont l'affrontement avec le formidable comédien norvégien Anders Danielsen Lie suscite une électricité vraiment inattendue. Pour ce qui est de la localisation de l'intrigue, eu égard à l'atmosphère qui se dégage de Première affaire, qui ne dégage guère de joie de vivre, il n'est pas certain que les habitants de la bonne ville d'Arras soient particulièrement heureux de l'image qui en est donnée, même indirectement.
La fiancée du poète de Yolande Moreau
La fiancée du poète, telle qu'imaginée par Yolande Moreau, et interprétée par elle-même, habite Charleville-Mézières. Si son film n'est pas rimbaldien, il témoigne cependant de toute la fantaisie que l'on connaît depuis toujours à l'actrice/réalisatrice, un côté rêveur et bohème qui s'accommode de quelques arrangements avec la morale et les mensonges, à partir du moment où ces derniers rendent la vie plus douce et moins monotone. Comme attendu, La fiancée du poète est un peu foutraque, avec des personnages très attachants, bien plus intéressants, pour être honnête, que l'histoire improbable dans laquelle ils sont embringués et qui somnole parfois entre quelques coups d'éclat. A qui, alors, outre Yolande Moreau, qui reste à part, revient l'honneur de décrocher le pompon de l'interprétation la plus baroque ? Cela pourrait être Grégory Gadebois, impayable, Estéban, hilarant, ou encore Sergi Lopez, délicieux. Mais non, le plus surprenant de la bande est un débutant au cinéma, qui affiche gaillardement ses 76 ans (au moment du tournage), à savoir l'inénarrable William Sheller, qui joue le décalage de son personnage avec une envie évidente et un talent qui ne l'est pas moins, comme un contrepoint parfait à la singularité de sa réalisatrice.
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