Cinéphile m'était conté ...

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L'ascension de l'Everest (Faust)

Avant de voir le dernier film d'Alexandre Sokourov, il faut s'y préparer psychologiquement. Vrai ou Faust ? Vrai, tout comme il serait hasardeux de tenter l'ascension de l'Everest, par la face nord, en tongs ! Faust est une oeuvre monumentale, escarpée et qui donne le vertige. Une oeuvre d'art autant qu'un film, qui aurait pu être signé Murnau, au temps du muet, à la différence près que le film de Sokourov est très, très bavard (trop). Visuellement, c'est une splendeur, mais pas d'un esthétisme chichiteux, c'est de la beauté brutale et viscérale (on en voit dès le début, d'ailleurs, des viscères). Le film agit progressivement comme un envoûtement des sens et l'on est prêt à suivre jusqu'en enfer le docteur Faust et le grotesque Méphisto. Comme le film ne manque pas d'humour (le célèbre pacte est bourré de fautes d'orthographe) et flirte durablement avec le fantastique, voire le gothique, dans un univers médiéval incarné de façon époustouflante, on est en admiration quasi constante devant ces images picturales en mouvement. Chapeau au directeur de la photo, le français Bruno Delbonnel (Dark Shadows, Amélie Poulain), qui accomplit des prodiges. Le danger serait de rester fasciné sans s'intéresser le moins du monde à l'intrigue. On peut perdre le fil dans sa lourde logorrhée mais on s'accroche au drôle de tandem formé par Faust et Méphisto, aux changements de décors et d'ambiance et l'on goûte l'apparition enchanteresse de Margarete. L'interprétation, soit dit en passant, est remarquable. Faust produit le même effet que Le cheval de Turin, en plus fort encore, et l'on imagine bien Goethe se repasser le film en boucle, là haut, qu'il soit au paradis ou en enfer, ce dernier lieu étant plus en phase avec la tonalité de cette montagne cinématographique.

 




22/06/2012
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