Cinéphile m'était conté ...

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Ici, c'est Auch (4)

 

Le jardin zen de Naoko Ogigami. Sortie le 29 janvier.

Aucun long métrage de Naoko Ogigami n'avait jusqu'alors été distribué en France. Le jardin zen pourrait changer la donne et, pourquoi pas, permettre de voir des œuvres antérieures de cette cinéaste qui semble porter un regard particulièrement acide sur la société et la famille japonaises contemporaines. Les personnages du Jardin zen sont plutôt ambivalents, parfois bienveillants mais assez souvent sans pitié pour leurs compatriotes. Tout, en surface, peut sembler lisse et calme mais la férocité se cache derrière les sourires et les remarques acerbes qui abondent, prononcées avec aplomb mais sans agressivité trop marquée, font invariablement mouche. Le jardin zen, réalisé de manière impeccable et implacable, témoigne d'une grande malice et d'une ironie grinçante qui parleront nécessairement aux amateurs d'humour pince-sans-rire, qui sait être fort cruel, à l'occasion. Si le film en dit long sur la frustration dans les relations familiales, il fustige aussi les nouvelles communautés (pour ne pas dire sectes) qui fleurissent partout au Japon, aux méthodes et aux objectifs plus que douteux. La réalisatrice épingle les comportements et les modes de pensée de l'ensemble de ses personnages, tout en leur gardant leur humanité. Avec sa lenteur étudiée, qui ne suscite nul ennui car le Diable se cache dans moult détails, Le jardin zen est moins paisible que son titre semble indiquer et c'est bien son côté piquant (subversif) qui lui donne toute sa saveur et son alacrité.

 

Les enfants rouges de Lotfi Achour. Sortie en avril 2025

Basé sur des faits réels, survenus dans les montagnes du sud tunisien, Les enfants rouges est réalisé par Lotfi Achour qui jusqu'alors a surtout œuvré dans le monde du théâtre. Son film a d'ailleurs des allures de tragédie, dans ses premières minutes, mais son traitement l'emmène sur d'autres territoires, le plus souvent à hauteur d'enfant, vers le réalisme magique, quoique le terme ne recoupe qu'en partie la tonalité surnaturelle du film. Les paysages, eux, sont somptueux, idéaux pour un western, mais leur aspect idyllique est trompeur, puisque, dans la montagne, les mines sont nombreuses et les terroristes rôdent. Face à eux, les villageois sont démunis, isolés et ignorés des autorités. C'est ce que raconte en filigrane Les enfants rouges, dans lequel coule le sang de jeunes bergers, qui n'ont demandé rien d'autre qu'à vivre dans la dignité et à espérer en des lendemains pleins d'espérance, dans leur village ou ailleurs. L'on peut se sentir frustré devant un film qui n'affiche pas plus ardemment son caractère politique mais le choix de l'onirisme, de plus en plus présent dans le cinéma tunisien actuel, peut se défendre, à partir du moment où le message sur l'enfance assassinée passe sans l'ombre d'un doute

 

Saint-Ex de Pablo Agüero. Sortie le 11 décembre.

Né dans un petit village de Patagonie, Pablo Agüero n'avait qu'un seul livre à la maison, durant son enfance : Le Petit Prince. Avec Saint-Ex, il s'octroie le privilège de rendre hommage à l'auteur qui l'a fait rêver, mais aussi au pilote mythique de l’Aéropostale, tout en revenant tourner dans son pays d'origine, l'Argentine. Ce n'est pas un biopic mais une tranche d'existence, marquée par l'amitié très forte entre Saint-Ex et Guillaumet, eux-mêmes au service d'une entreprise capitaliste qui considérait le passage du courrier plus important que la vie de ses pilotes. D'emblée, sur terre comme au ciel, le film s'épanouit entre réalisme et poésie, prenant la forme d'une aventure humaine et de survie, tour à tour symbolique, mystique et naïve, dans le décor majestueux et périlleux de la Cordillère des Andes, dont le franchissement, dans les années 30 relevait autant de l'héroïsme que de la démence. L'onirisme, fruit d'effets spéciaux splendides, sert à Agüero pour nous conter une épopée réelle sous forme de fable, avec ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines. Garrel, Cassel et Krüger jouent avec bonheur ces êtres pas aussi libres comme l'air qu'ils l'auraient souhaité mais prêts à tout les risques pour maintenir leurs rêves vivants, même et surtout au-dessus des montagnes.

 



07/10/2024
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