Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Exilées de la mémoire (Certaines n'avaient jamais vu la mer)

Le plus frappant dans Certaines n'avaient jamais vu la mer est son mode de narration. Pas de "je" mais un "nous" qui rassemble plusieurs existences, toutes différentes, mais qui, collectivement sont confrontées aux mêmes événements. Le livre décrit le départ de femmes japonaises vers les Etats-Unis, au début du XXe siècle, à la rencontre d'époux inconnus d'elles, jusqu'à Pearl Harbour et ses conséquences, la suspicion et enfin l'envoi en "centres d'accueil". Et, entre temps, Julie Otsuka raconte leur quotidien difficile, leur adaptation à un nouveau mo(n)de de vie pour ces exilées à perpétuité. Par son rythme, scandé, ses lancinantes répétitions, ses "nous" qui reviennent sans cesse, la romancière réussit un véritable tour de force avec une économie de moyens basée sur une langue sèche et précise. Grand est le pouvoir d'évocation de ce livre aux images réalistes qui ne cède jamais à un quelconque chantage à l'émotion ou au misérabilisme. La dignité de ces femmes se retrouve fidèlement transposée dans l'écriture de Julie Otsuka. Les faits sont là, tus et méconnus, l'écrivain les met en scène avec une puissance tranquille qui est la plus belle façon de rendre hommage à ces oubliées de la mémoire et de l'Histoire.

 




15/10/2012
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