Cinéphile m'était conté ...

Grande journée caribéenne ce dimanche avec 3 films en provenance de Porto Rico, Haïti et la République dominicaine. Et une comédie romantique argentine pour enrober le tout.

Le foot ou moi (El futbol y yo), Marcos Carnevale, Argentine

Gros succès public en Argentine, Le foot ou moi a mis tous les ingrédients de son côté avec ce récit d'une addiction au football qui met en péril un couple, une situation qui ne doit pas être si rare du côté de Buenos Aires. Inutile de préciser que le film de Marcos Carnevale, cinéaste expert ès comédie, s'amuse beaucoup avec tous les clichés liés à la passion pour le ballon rond et qui lui servent de carburant dans une intrigue sans temps morts avec ses moments tour à tour burlesques, absurdes, mélancoliques et, bien entendu, romantiques. Un film qui file droit au but, sympathique, bien troussé même si sans grande surprises à la clé. Une recette implacable pour conquérir le box-office, au moins local, encore faut-il lui donner un tempo vif et un équilibre stable entre situations prêtant à rire et scènes susceptibles de susciter l'émotion. Mission accomplie.

El chata, Gustavo Ramos Perales, Porto Rico

El chata (sparring partner), premier film portoricain, est plein de bonne volonté et son ton naturaliste reflète sans aucun doute la réalité locale dans le camp de ceux qui doivent se battre au quotidien pour survivre. Ainsi agit le personnage principal du film, qui sort de prison et doit se réhabituer à sa femme et à son enfant sans retomber dans les filets des voyous qui l'attendent. Les intrigues se croisent mais manquent sérieusement de clarté, enlevant toute volonté de s'intéresser plus avant à des enjeux certes grossièrement définis mais pas dans le détail. Pour un film qui tourne autour du monde un peu glauque de la boxe amateure, El chata est singulièrement dépourvu de punch, hélas, à moins que ce ne soit l'absence d'explication des codes portoricains qui entrave une compréhension plus satisfaisante.

Ayiti mon amour, Guetty Felin, Haïti

Ayiti mon amour est le film des premières. Premier long-métrage réalisée par une haïtienne dans son pays et premier film haïtien présenté pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère (en 2018). Le projet n'a pas été facile à financer, 4 ans ont été nécessaires, et 2 supplémentaires ont permis un tournage au long cours. Pour la réalisatrice, il s'agit de donner une image de son pays éloignée des stéréotypes, une manière de "faire converser Haïti avec le reste du monde." Pour ce faire, Guetty Felin a rejeté toute narration linéaire en optant pour une sorte de réalisme magique. Elle a bien fait, il faut se laisser entraîner par son film poème à une contrée meurtrie mais bien vivante. Avec ses bribes d'histoires et ses fragments de personnages, Ayiti mon amour séduit d'abord par sa douceur et sa bienveillance. Une image rêvée d'Haïti qui est sans doute bien plus proche de la réalité que la vision habituelle toute empreinte de pitié bien-pensante.

Dans ta peau (En tu piel), Matias Bize, République dominicaine

Le cinéaste chilien Matias Bize a réalisé En la cama en 2005. L'histoire simple d'une liaison entre deux personnes déjà mariées et qui se retrouvent régulièrement jusqu'à ce que se pose la question du devenir de ce couple illégitime qui croyait pouvoir s'en tenir aux plaisirs du sexe. Le film avait fait son petit effet dans les festivals et lancé pour de bon son réalisateur. 13 ans plus tard, le voici à la tête d'un remake, de nationalité dominicaine, dont on ne voit guère l'utilité. L'unité de lieu est respecté, il n'y a toujours que 2 personnages dans le film et quelques scènes vaguement torrides viennent pimenter une intrigue qui n'a qu'une profondeur relative. S'y interroge t-on sur le couple ? Pas vraiment. Sur le désir ? Pas davantage. Sur ce qu'est l'amour ? Ne rêvons pas. Les deux interprètes de En tu piel sont très photogéniques et plutôt bons comédiens. Mais leur dialogue manque d'aspérité et le film ne prend aucun risque vers une conclusion triste mais ô combien attendue.